LA CONCHYLIOLOGIE  [1]

Si l’étude des mammifères et des êtres supérieurs de l’échelle de la création offre un immense intérêt, celles des coquillages, des mollusques, aux conformations singulières, aux organismes variés et bizarres, n’est pas moins attachante et instructive. Un savant des plus distingués, ancien aide paléontologiste au British Muséum, a récemment publié un livre qui servira de guide à tous les amateurs de conchyliologie, comme à tous ceux qui sans faire de collections veulent connaître les êtres inférieurs et étudier leurs mœurs et leur histoire. Pour donner le moyen de se faire une juste appréciation de ce bel ouvrage, nous en publions quelques extraits, relatifs à des coquilles fort curieuses.

Fig. 1. — Argonauta argo.
Fig. 2. — Belemnoteuthis.
Fig. 3. — Dolium perdix.
Fig. 4. — Eucyclus goniatus.

Voici ce que dit l’auteur au sujet de l’Argonaute, un des plus curieux céphalopodes. La coquille de l’Argonaute est mince et transparente ; elle n’est pas moulée sur le corps de l’animal, et n’est pas attachée par des muscles ; la cavité inoccupée de la spire sert de réceptacle pour les petits œufs déposés en paquets. On croit que la coquille est spéciale à la femelle. Sa fonction est relative à la protection et à l’incubation des œufs. Elle n’est pas l’homologue des coquilles chambrées ou des coquilles rudimentaires internes des autres céphalopodes, mais peut être comparée au cocon de la sangsue ou au flotteur de la Janthine. L’Argonaute est placée dans sa nacelle avec son siphon tourné du côté de la carène, et ses bras véliformes (dorsaux) appliqués étroitement contre les côtés de la coquille, comme dans la figure 1, où ils sont toutefois représentés en partie rétractés, de manière à laisser voir le bord de l’ouverture. L’animal nage en chassant l’eau par son entonnoir, et rampe dans une position renversée, en portant sa coquille sur sou dos comme un escargot.

Une autre espèce, appelée Belemnoteuthis, n’offre pas moins d’intérêt. Sa coquille consiste en un phragmocone semblable à celui des Bélemnites ; une plume cornée dorsale, avec de vagues rubans latéraux et un mince rostre fibreux, ayant deux crêtes divergentes sur le côté dorsal. L’animal est pourvu de bras et de tentacules de longueur presque égale, munis d’une double série alterne de crochets cornés, formant de 20 à 40 paires sur chaque bras ; le manteau est libre dans le tour ; les nageoires sont grandes et médio-dorsales.

La classe des gastéropodes n’est pas moins riche, que celle des céphalopodes ; elle est étudiée dans la troisième partie de l’œuvre de M. Woodward, dont la première est consacrée à des généralités sur les mollusques en général, et sur la récolte des coquilles.

La figure 3 repésente l’aspect du dolium perdix, coquille ventrue, qui porte des côtes spirales, et qui se trouve en abondance dans la plupart des rivages : on la rencontre dans la Méditerranée, à Ceylan, en Chine, en Australie, et dans l’océan Pacifique.

La figure 4 reproduit l’aspect d’un Encyclus, ainsi nommé du grec en-kuklos, en cercle, par allusion aux nombreux plis ou anneaux de la spire et de la hase. La surface de cette coquille est ornée de nodosités et de plis longitudinaux ; l’ouverture est ovale et anguleuse dans la partie supérieure.

C’est ainsi que, dans l’ouvrage, si patient, si complet de M. Woodward, chaque espèce est décrite avec soin, avec exactitude, d’après des naturalistes consciencieux. Comme le dit l’auteur, « chaque créature vivante a son histoire particulière, chacune a ses caractères propres qui servent à la distinguer des êtres voisins ; chacune a son territoire, sa nourriture spéciale et son rôle à jouer dans l’économie de la nature. »


  1. Manuel de conchyliologie, ou histoire naturelle des mollusques vivants et fossiles, par le Dr S. P. Woodward ; traduit de l’anglais par Aloïs Humbert. Avee 25 planches contenant 579 figures et 297 gravures dans le texte. — Paris, F. Savy, éditeur.