La Cithare (Gille)/Méléagre

La Cithare, Texte établi par Georges Barral Voir et modifier les données sur WikidataLibrairie Fischbacher (Collection des poètes français de l’étranger) (p. 209-210).
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MÉLÉAGRE


 
Passant, suspends tes pas : cette tombe a reçu
Le dernier fils des dieux. Sous le mouvant tissu
Du lierre verdoyant et souple, où se marie
Au narcisse mourant l’églantine fleurie,
Sur le marbre votif, Voyageur, lis le nom
De Méléagre aimé des Muses, compagnon
Des Grâces. Méléagre, en cet endroit, repose
À l’ombre du laurier, du myrte et de la rose,
Sous les fleurs qu’il aimait fixer d’un doigt errant
Aux tempes de Démo, dont le corps odorant

Extasiait d’amour son cœur tremblant d’esclave.
Jamais lyre plus douce ou flûte plus suave
N’éveillèrent l’écho champêtre des bosquets ;
Et, dans l’heureuse et folle ivresse des banquets,
Où s’épanouissait le luxe de l’Asie,
De ses lèvres coulaient le miel et l’ambroisie.
Spirituel ou tendre, ardent ou gracieux,
Il chanta, tour à tour, Anticlée aux grands yeux,
La verte sauterelle à l’aile harmonieuse,
Et le safran qui croît à l’ombre de l’yeuse.

Terre, salut ! Ô toi, qui gardes plus qu’un roi,
Sois-lui légère : il a pesé si peu sur toi.