La Cithare (Gille)/Hymne dionysiaque

La Cithare, Texte établi par Georges Barral Voir et modifier les données sur WikidataLibrairie Fischbacher (Collection des poètes français de l’étranger) (p. 95-97).

HYMNE DIONYSIAQUE



 
Je chanterai le dieu ceint du lierre bruyant,
Dionysos, l’éphèbe au cœur de flamme, ayant
Tendu les cordes d’or sur ma cithare creuse :
Ô fils de Sémélé, la divine amoureuse,
Les nymphes de Nysa t’ont bercé sur leur sein
Dans les antres dorés où bourdonnait l’essaim
Des abeilles en feu qu’enivrait ton haleine.
Voluptueux et fier tu grandis, et Silène

De doux vins et de miel parfumé te nourrit ;
C’est Pan au front cornu qui lui-même t’apprit
À moduler tes chants, posant tes doigts agiles
Sur la syrinx de canne ou de roseaux fragiles,
Et, d’un pied cadencé foulant les tendres fleurs,
À danser mollement près des sources en pleurs.
Héroïque et superbe, et les regards humides,
Aux saints enlacements des êtres tu présides ;
Tout ce qui vit t’adore et reconnaît ta loi.
Portant le double thyrse et la coupe, c’est toi
Qui dispenses la force et répartis la sève ;
À ton souffle vainqueur la nature se lève,
Et c’est pourquoi, le plus aimé des Immortels,
Nous avons couronné de roses tes autels.

Roi du monde, Soleil, Foyer de l’énergie,
Conduis dans la forêt ton cortège et l’orgie,
Exalte nos esprits et transporte nos cœurs !
Et, soudain embrasés de tes saintes fureurs,
Nous irons célébrer tes souverains mystères.
Io, Io ! Voici, traîné par des panthères,
Le dieu puissant et doux, imberbe et triomphant,
Plus souple qu’une femme et plus beau qu’un enfant ;
La peau du léopard couvre sa hanche ronde ;
Il s’avance inspiré : sur son épaule blonde
Roule sa chevelure aux flots ambrosiens.
Les prêtres, les danseurs et les musiciens,

 
Aux sauvages accents d’une étrange harmonie,
Enguirlandent son front et sa poitrine unie ;
Les Nymphes font entendre au loin leurs belles voix,
Et le bruit de leurs pieds enveloppe les bois.