La Chine en folie/Petit sauve qui peut

Albin Michel (p. 213-214).

PETIT SAUVE QUI PEUT

Le lendemain matin tous les journaux annonçaient l’imminente catastrophe. Tsang-Tso-lin avait achevé la concentration de ses troupes et lui-même quitté Moukden. Il allait marcher sur Pékin. Wou-Pé-Fou courait à sa rencontre.

Le dragon, fils de la peur, cavalcadait dans le ciel pékinois. Il passait en sifflant, du moins les indigènes le prétendaient-ils. Voyons ! leur disais-je, si le dragon sifflait, étant donné que mon tympan est en excellent état, j’entendrais siffler le dragon. Je n’entends rien.

— Châââ ! Châââ ! glapissaient les boys de l’hôtel.

— Quoi ? Châââ ! Châââ ! Avez-vous fini ce tapage dans le couloir ? Et pourquoi courez-vous tous depuis un moment comme si vous aviez reçu un clystère de poil à gratter ? Portez-moi plutôt mon café au lait.

— Tsang-Tso-lin ! Tsang-Tso-lin !

— Quoi Tsang-Tso-lin ? Où est-il ? Dans l’hôtel ?

— Châââ ! Châââ !

— Allo le manager ! C’est vous qui êtes en bas ? Savez-vous que vos boys mènent un sabbat à mon étage ?

— Client ! répondit le manager, dès ce moment tout est perdu. La débandade commence. Sauve qui peut !