La Chanson d’Ève/Par cette porte de lumière

Société du Mercure de France (p. 22-23).

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Par cette porte de lumière
Que m’ont entr’ouverte mes mains,
Comment, moi, fille de la terre,
Saurai-je trouver mon chemin ?
Elle est impénétrable, et close,
Et toute obscure encor de roses.

Mais comme je parle en mon cœur,
Mes bras levés entre les branches,
Avec le calme et la lenteur
D’une chose qu’on fait en songe,
J’ouvre et détache, fleur à fleur,
Tout le voile de roses blanches.

Et voici pâle, et peu à peu
Merveilleuse d’espace bleu,
Entre mes hautes mains d’où tombe
Le voile de ce jour mortel,
Naître l’immense fleur du ciel.