La Renaissance du Livre (p. 17-21).



IV


Ier décembre. Il y deux mois qu’on joue la pièce de papa. Comme certaines périodes passent vite !… On dirait que le temps a doublé le mouvement. Il me semble que c’était hier, cette générale des Folies…

L’Aubaine fait le maximum. Ç’a été un engouement de la part du public ; la pièce restera le succès de l’année : peut-être est-ce son titre qui lui porte la veine ? Papa, remis à flot du coup, m’a acheté une étole de renard bleu et rêve de dépenses fastueuses.

Ce cher prodigue affirme avec gravité que, si les pièces d’argent sont rondes, c’est pour mieux rouler.

Aujourd’hui, il revient déjeuner, après un tour au Bois ; et, dès le seuil, en rentrant dans la bonne chaleur, il se secoue d’un geste frileux des épaules, retire ses gants épais, et, me tendant ses mains glacées :

— Brrou !… Je suis gelé, fait-il. Il y a des mares de boue aux Poteaux. Toutes les femmes qui passent, le nez rouge de froid et les joues blanches de poudre, ressemblent à Footit : l’hiver leur farde une tête de clown. Décidément, Paris est triste sous ce ciel de grisaille qui s’empanache de nuages fumeux. Et cette pluie qui tombe en mesure, énervante comme un métronome ! Quelle sale saison ! Je rêve de thé bouillant et de soleil intense. Oh ! devenir une oie pour rôtir délicieusement à la broche ! Sais-tu Nicole, que, si ce fut en hiver qu’on grilla saint Laurent, il dut bénir son supplice… Ah ! voir du soleil, se réchauffer… Dire qu’en ce moment le printemps règne dans certaines contrées. Que dirais-tu, fillette, d’un petit tour sur la Riviera ?

— Je dirais : c’est chic !

— Tu m’amuses, Nicole, quand tu fais cette mine gourmande de petite fille qui guigne du dessert. Eh bien ! Partons à Nice, c’est convenu. Rien ne nous retient, n’est-ce pas ?

— Rien

— Quatre ou cinq jours pour les courses, les préparatifs. Nous serons là-bas la semaine prochaine. Où ai-je fourré l’indicateur ?

— Ça coûte cher, une saison à Nice. Je croyais que tu voulais — ou plutôt que tu avais l’intention de faire des économies ?

— Bah ! tu es trop sérieuse… Zut ! pour la sagesse. J’ai froid, moi, ici. À Nice, dans bien des maisons, il n’y a même pas de cheminées : on ne fait jamais de feu. Tu vois : en allant dans le Midi, nous éviterons des dépenses de bois et de charbon…

— Dis donc, moqueur, tu oublies que le propriétaire a installé ici un calorifère qui chauffe l’appartement…

— Es tu contente à l’idée de voir Nice, toi qui ne connais pas la Riviera ?

— Certes. Je me figure que Nice, ça doit être une ville de conte oriental, tout en or, avec le ciel et la mer comme médaillon d’émail bleu ; une terre de corail brûlé… des arbres exotiques, portant des fruits de topaze et de sardoine… tout ça éclairé par une lumière blanche et brillante, scintillant ainsi qu’un diamant liquide fluide…

« Bref, pour moi, Nice est un bijou de joaillerie moderne, tels ces pendentifs tarabiscotés de pierres multicolores… ou bien encore ; une image d’enlumineur japonais exagérée de pourpre…

— Bravo, ma reine Mab !… Tu en jugeras bientôt par tes propres yeux.

À ce moment, le groom entre dans la salle à manger et tend une carte à papa. Celui-ci dit :

— C’est bien… Une minute.

Et lorsque nous sommes seuls, me lance la carte d’une pichenette. Je lis :

Paul Bernard

— Crois-tu, fait mon père, c’est encore lui !… Voilà une chose cocasse : il ne se passe pas trois jours sans qu’il vienne nous voir. Je ne sais si tu as remarqué comme moi que ce bel engouement pour ma personne date de la générale de l’Aubaine ? C’est curieux d’observer à quel point le succès nous donne du prestige auprès des gens du monde, même au yeux d’un multimillionnaire tel que Bernard. Car, enfin, je ne le connaissais pas plus que ça… Je le rencontrais au théâtre, aux courses, dans les restaurants… Mais il ne m’avait jamais manifesté l’amitié qu’il me témoigne aujourd’hui !… Et aux Folies-Joyeuses, donc !… Il invite instamment le directeur à me demander ma prochaine pièce… Après tout, c’est peut-être l’actionnaire qui parle en lui : il a de gros intérêt dans la maison et se félicite que mon œuvre actuelle augmente la valeur marchande du théâtre… Quand on a du sang d’homme d’affaires dans les veines, on ne néglige aucun bénéfice…

Ô subtilité littéraire, finesse théorique ! vous servez l’homme de lettres lorsqu’il s’agit d’analyser des sentiments imaginaires, d’agencer habilement des scènes ingénieuses, ou de trouver le mot qui « porte »… Mais, vous le laissez dans la vie réelle aussi crédule, aveugle et désarmé que l’être le plus naïf — abandonnant ses facultés d’observation, son intelligence professionnelle, dès qu’il quitte la table de travail, tel l’ouvrier accroche à un clou les outils du métier en sortant d’un chantier, son labeur accompli !

Nous ouvrons la porte du salon. Paul Bertrand est là, humant l’odeur sauvage et poivrée d’une botte de chrysanthèmes jaunes. Il se retourne et dit gaiement, en voyant dans l’autre pièce la table encore servie, les compotiers de fruits, les serviettes taponnées :

— J’arrive un peu tôt, n’est-ce pas ?… C’est pour être certain de vous trouver. Voyez-vous, je suis terriblement sans-gêne, indiscret et mal élevé avec mes amis. Je ne me montre correct qu’à l’égard des gens qui m’embêtent… Ceux-là, je leur fais des visites convenables, à l’heure comme il faut, et je choisis les jours où ils sont sortis, afin de déposer simplement ma carte… Mais les autres, les types qui me plaisent ! je m’amène chez eux toujours en avance, empressé et matinal comme un bon cousin de province… Si je vous dérange, mettez-moi à la porte.

— Vous ne nous dérangez pas du tout, répond papa.

J’ajoute :

— Je vous comprends si bien, moi ! Je faisais la même chose pour mon institutrice : le jour du devoir de style, je venais à la leçon bien exactement, avec plaisir. Mais quand c’était le tour du calcul ! système décimal ou racine carrée, j’arrivais régulièrement en retard. Les visites ennuyeuses, c’est votre leçon d’arithmétique ?

— Excellente comparaison, remarque Paul : les deux nous procurent une bonne migraine et des notions très justes sur les intérêts composés…

Papa, qui ne songe plus qu’à son idée de départ, l’avertit tout à coup :

— Vous avez bien fait de venir aujourd’hui. Dans huit jours, nous serons loin.

— Où allez vous ? interroge Bernard, surpris.

— À Nice. Nous filons. Ç’a été convenu à table, tout à l’heure, en déjeunant.

— Ah ! bah… Si vous ratez le train, ce ne sera pas votre lenteur à prendre des décisions qui vous aura retardé, toujours !

Pensive, je ne suis plus la conversation, et je me pelotonne au fond du canapé, en les regardant tout deux, mon père et mon ami. Car, j’ai un ami, maintenant ; ça me semble drôle. Enfant, j’ai vécu isolée, sans camarades, sans compagne. Mon institutrice me faisait l’effet d’une grammaire : c’était une femme sèche et routinière qui sentait le vieux livre et le renfermé. Plus tard, les mères éloignaient leurs jeunes filles avec soin de ma personne mal élevée. Papa ne fut qu’un affectueux boute-en-train, scintillant et voltigeant, une sorte de feu follet familier. Seule, ma maman, si elle fût restée de ce monde, eût pu devenir pour moi cet être rare qui s’intéresse à vous — sans intérêt ; vous avertit — sans vous conseiller ; vous écoute — sans vous trahir ; vous rend service — sans calcul ; et pense à vous — sans arrière-pensée… Enfin l’être parfait, le seul auquel on peut donner ce nom banalisé d’ami, qu’on dispense en général à tort et à travers, aussi facilement qu’une poignée de mains.

Et il faut que cette amitié, jamais rencontrée, me vienne d’une connaissance faite par hasard ; qu’on dise après cela que les rues de Paris sont dangereuses pour les jeunes filles seules : moi, j’y ai pêché un ami sincère… Il arrive bien quelquefois au chiffonnier de trouver un louis dans le ruisseau.

Oui, Paul Bernard est revenu me voir ; trois jours après la générale des Folies exactement. J’ai cru d’abord qu’il voulait poursuivre l’aventure, en agissant d’une autre manière ; qu’au lieu de me prendre pour une demi-mondaine novice, il allait me traiter à présent ainsi qu’une demi-vierge avertie ; me servir des propositions inconvenantes, entortillées de sentimentalité, comme des bonbons acidulés enveloppés de papier de soie. Et, finalement, glisser du flirt permis à l’amour défendu. Il y avait bien mon père… mais on se dit avec un rire de goujat ; « Le papa n’est pas gênant… »

Eh bien ! non. Paul Bernard s’est comporté sans machiavélisme. Je sens dans ses regards, dans sa voix, une franchise indéniable ; je l’amuse, je l’intrigue ; il est revenu parce qu’il est un de ces hommes — peu communs — qui savent aussi s’intéresser aux idées de jolies femmes (quand elles en ont), et il se console de ne pas posséder ma personne physique par la maigre compensation de connaître le petit animal moral que je lui dévoile avec un peu moins de défiance chaque jour… Il me marque une cordialité affectueuse, mêlée d’on ne sait quelle pitié émue…

C’est trop beau : je me méfie quand même.

Ainsi, ma rêvasserie se prolonge, tandis que je considère papa, sa tête fine, spirituelle, sa moustache ébouriffée, ses yeux clairs où brille du rire, et Paul, dont le visage, moins racé, comme modelé par une main grossière, est plaisant à force de santé ; il a un teint frais, des joues pleines d’homme bien portant ; ses yeux ne sont point malicieux, mais se posent longtemps sur chaque chose : ils observent ; ils reflètent une intelligence réfléchie.

Papa se lève, nous laisse sous un prétexte : je soupçonne ce père trop jeune de profiter des visites de notre ami pour s’aller promener sans moi en galante compagnie, qui sait ? Quand nous sommes seuls, Paul Bernard me demande :

— À quoi pensez-vous, jeune fille, en me regardant aussi attentivement depuis un quart d’heure ?

— Je trouve que votre visage est franc et sain… il inspire une sorte de quiétude. Si je vous avais connu autrement, je vous témoignerais de la confiance… tout à fait.

— Et alors, vous en manquez parce que vous ne m’avez pas connu dans un bal blanc ?

— Dame ! Je me souviens de notre première entrevue, aux fortifs… près du Bois.

— Puisque mon visage inspire une sorte de quiétude, on ne doit pas craindre de me rencontrer au coin d’un bois…

— Je ne sais si je peux vous croire un ami « pour de vrai » : au début, vous me faisiez une cour si pressante, vous m’exprimiez le désir d’un amour rien moins que sentimental…

— Entre un homme et une femme, l’amitié commence toujours par là.

— Ah ?… Ça ne m’empêche pas de douter… Quand j’étais petite, et qu’on me laissait seule, j’aimais jouer avec les allumettes. Un jour, je faillis brûler un rideau ; j’eus plus de peur que de mal… la flamme s’éteignit… N’importe ! il me semblait à chaque instant qu’elle allait se rallumer… Aujourd’hui, ce n’est plus avec les allumettes que j’ai joué, mais c’est avec le feu tout de même… Ça a l’air de s’être éteint Hum ! je crains qu’il ne reste de la braise en dessous…

— Vous dites les choses d’une façon charmante ; tenez, c’est ce qui me plaît chez vous… En vous écoutant, une étrange association d’idées s’est produite dans mon esprit… Vous avez parlé du feu… Dans le mot feu, il y a foyer. Je viens de songer au mien. Mon père m’a fait contracter un drôle de mariage… À vingt-huit ans, pour obéir aux ordres paternels, j’ai épousé la fille d’un banquier viennois enrichi par je ne sais quelle combinaison de Bourse sur les actions d’une raffinerie qu’il racheta au bon moment… Mon union ne fut pas celle d’un jeune homme avec sa fiancée, mais bien plutôt l’alliance de la réglisse Bernard aux sucres de mon beau-père. Je ne vis guère ma femme que le jour de la cérémonie nuptiale et ce fut pour comprendre l’utilité de ce voile lilial qui cache les traits de la mariée… Songez donc que j’aime les femmes minces et que Rachel pèse soixante-quinze kilos… D’ailleurs, vous l’avez vue… De plus, elle est froide, égoïste, sotte et désagréable. Nous vivons ensemble comme deux étrangers descendus dans le même hôtel… J’ai épousé un poids lourd : ne suis-je pas excusable d’étre un mari léger ?

— Vous n’étiez pas forcé de vous marier. Vous pouviez choisir une femme qui vous plût.

— Ah ! vous croyez ça ? On voit bien que vous avez un père exceptionnel… Mais, ma chère enfant, moi je fus un fils de la vieille école, tremblant devant mon père à trente ans comme au temps de ma prime jeunesse ; ayant de lui une terreur de gosse… Jusqu’au dernier jour de sa vie, il m’a mené comme un petit garçon. Je n’aurais jamais osé refuser la main de Rachel… Je fus lâche !

— Pourquoi me racontez-vous tout cela ?… Je n’ai pas à vous juger.

— C’est parce que j’aime à dire des choses intimes, privées, volontiers secrètes, à l’ami — je dis exprès l’ami-i — que vous êtes… au camarade. C’est si rare, une femme qui vous comprend ! En général, les femmes n’admettent point ce qu’elles ne ressentent pas. Vous, même quand vous me désapprouvez, vous me comprenez… Et puis, j’aime aussi à vous écouter, à recevoir les petites confidences que vous me faites à demi, n’osant vous livrer, comme quelqu’un qui craint de trébucher parce qu’il marche sur une planche branlante… La planche branlante, c’est votre situation fausse…

— Ma situation fausse !

— Oui. Ne vous fâchez pas ! Laissez-moi parler en véritable ami, avec le droit, l’autorité que me donne mon intérêt pour vous. Vous êtes une timide, au fond, une sauvage. Vous vous croyez très libre d’idées, très indépendante, et vous souffrez sans vous en rendre compte, par une espèce de pudeur inconsciente, de la vie étrange que vous menez. Jeune fille d’une pureté physique absolue, vous êtes, à dix huit ans, déflorée moralement en quelque sorte par une existence libérée de toute surveillance, et des lectures de hasard. Et chaque fois qu’un hommage masculin vient à vous, subitement sur la défensive (malgré vos airs de tout entendre, vos répliques audacieuses), vous vous rétractez plus nerveusement qu’une vierge timorée de province ; vous doutez de tout, dans la méfiance instinctive que vous inspire votre situation fausse de demi-affranchie.

— Vous avez une façon de me juger qui fait plus honneur à votre imagination qu’à votre perspicacité !

— Cranez ! J’ai raison au fond. Vous n’êtes pas heureuse, Nicole : rien n’est plus mauvais que les demi-mesures. Il faut choisir. C’est une position dangereuse que de se tenir à califourchon entre deux modes d’existence, sans oser se décider, avec la peur de se laisser choir sans le vouloir, d’un côté ou de l’autre. Il vaut mieux sauter, bon Dieu !

— Alors, selon vous, c’est de cette incertitude que me viennent les idées folles, les projets vagues, les inquiétudes qui me tourmentent parfois ?

— Quelles idées ? Dites, Nicole — vous permettez que je vous appelle Nicole tout court ? — dites-moi vos idées… Je serai heureux de vous entendre, de vous conseiller, au besoin… Moi si je m’étais fait comédien, j’aurais sûrement joué les confidents : Arsace et Nabal sont dans mon tempérament.

— Que puis-je vous dire ?… Que par moment l’insouciance, la charmante frivolité de mon père m’effrayent (et ce sont les rôles retournés) comme une mère dont le fils séduisant ferait des bêtises… Que je suis perplexe en songeant à mon avenir… Que je rêve d’entreprendre je ne sais quoi… d’entrer dans une carrière… Et que fois, aussi, j’éprouve tout à coup le besoin impérieux de ne plus penser à rien et d’aller me réfugier, me blottir entre les bras de quelqu’un que j’aimerais et qui me protégerait… Mais celui-là, je ne le trouverai jamais.

— Prenez garde, Nicole. Vous, si vous aimez, vous en souffrirez terriblement. Vous vous éprendrez, originale comme vous l’êtes, d’un type pas ordinaire, et vous sortirez toute meurtrie d’une aventure peut-être désastreuse… Je sens ça. C’est un homme comme moi qui pourrait vous rendre heureuse…

— Vous êtes orfèvre, monsieur Josse.

— Mais cet homme-là, il est trop simple, trop bon garçon, pour que vous l’aimiez.

— Je vous aime beaucoup.

— Beaucoup… Oh ! Nicole ! Est-ce qu’on aime beaucoup ? Jamais les femmes ne devraient terminer ainsi leur phrase. Songez donc qu’il vaut mieux ne rien dire, ne pas parler de cela… Et que, lorsqu’une femme nous adresse ces paroles exquises : je vous aime… Ce petit mot : beaucoup, ajouté à la fin, c’est une façon de nous gifler avec le verbe aimer.

— Poète !… Vous cessez en ce moment de penser au camarade qui vous comprend, et vos yeux ne me regardent plus comme un ami-i, mais comme une amie-e !

— Pardon ! Je ne vous regarde pas si… ardemment. Je me tiens très bien.

— Vous vous retenez.

— Nicole déconcertante ! Vous ne m’acceptez qu’en qualité d’ami, et pourtant vous êtes coquette à vous en faire battre !… Allez-vous-en, petite fille, allez à Nice flirter au soleil… Je ne veux plus vous voir. Je pars aussi solennellement qu’un héros de théâtre au dernier acte d’une pièce à thèse. Adieu, mademoiselle. Bon voyage !

C’est vrai, ce qu’il a dit. Comme les femmes sont perverses !… Je n’aime pas cet homme ; je ne l’aimerai probablement jamais ; je l’enverrais promener s’il sortait de sa réserve, et lui suis profondément reconnaissante en le voyant se contenter d’une amitié qui me plaît fort…

Et pourtant… pourtant, tout à l’heure, ça m’amusait de faire briller ses yeux et rougir ses pommettes, par mes paroles irritantes et railleuses, tandis que mon pied aguichant, battant la mesure avec innocence, faisait remonter peu à peu la jupe, laissant entrevoir le mollet gaîné de soie mauve… Et les regards orageux de mon ami se détournaient, chargés d’une lueur trouble…

Ô Ève, Ève, ton éternel poison coule toujours dans nos veines !