(p. Frontisp.-xii).

Frontispice

Que tout Bande que tout S’Embrase,
Accourez putins et Ribauds :
Que vois-je… ou suis je… o doux extase !…
Les cieux n’ont pas d’objets si beaux.




INTRODUCTION.



La vanité ou l’intérêt ont toujours été les motifs de ceux qui ont écrit des mémoires ; les miens ſont uniquement le déſir d’amuſer & d’inſtruire. On ne manquera pas de dire, en liſant le titre de cet ouvrage ; mais nous ſavons tout cela, on voit cela par-tout ; l’art de multiplier les jouiſſances, en variant les préludes & les poſitions, eſt pouſſé à sa perfection ; d’ailleurs, le principe & le réſultat ne ſont-ils pas toujours les mêmes ? enc...ner & dé....ger, cela eſt vrai : mais c’eſt la façon de le faire qui fait tout ; & j’en appelle à tous les libertins, à tous ces charmans roués, que la curioſité, l’occaſion ou la néceſſité ont fait paſſer des bras de la ducheſſe dans ceux de la ſimple villageoiſe du boudoir voluptueux de l’élégante courtiſane dans le cabinet modeſte de la timide griſette ; par-tout ils ont pu trouver un joli minois, belle gorge, jolie motte, ſans doute même au village plus de fermeté, plus de fraîcheur naturelle ; mais cette propreté recherchée, ces toilettes galantes & laſcives, ces appartemens élégamment meublés, où le jour eſt adroitement intercepté par des rideaux couleurs de roſe ; ces glaces qui deviennent des tableaux animés ; les minauderies d’une femme galante qui fait augmenter le déſir en le prolongeant, & doubler le plaiſir en retardant le moment de la jouiſſance ; mais tous ces jolis préliminaires qu’un homme délicat multiplie à l’infini, & préfère au moment du bonheur ; mais enfin, cette langueur délicieuſe qui ſuccède au délire ; où trouve-t-on tous ces avantages ? eſt-ce au village ? ſeroit-ce même auprès des bergères d’Idalie, qui n’ont jamais éxiſté que dans l’imagination des poëtes ? non, ce n’eſt qu’auprès de ces jolies coquines qui réuniſſent la fineſſe au tempérament, & qui ſuppléent à l’expérience par l’inſtruction.

C’eſt donc pour elle eſſentiellement que j’écris mes aventures libertines, Je croirois faire un vol à mes contemporaines, à la proſpérité galante, ſi je cachois mes jolies découvertes ; & ſi mes lecteurs bandent une ſeule fois en les liſant, je ſuis aſſez dédommagée de mes peines, & je ne demande d’autre témoignage de leur reconnoiſſance, que de voir quelquefois l’effet de mon ouvrage.

Après un ſi joli début dans la carrière du plaiſir, je dois faire de grands progrès, & ſi cette partie de ma vie a fait ſur mes prosélytes, l’effet que je dois en attendre, les mêmes principes m’engageront à leur en donner une ſeconde que mon expérience rendra ; à-coup-sûr, plus inſtructive que la première.