L’histoire des États-Unis racontée aux enfans/John Quincy Adams, président

Traduction par Mathilde Leiris.
E. Johns & Cie (p. 134-140).

L’Indien trompé.

LEÇON XXIII.

johns quincy adams, président.


1. À l’époque de l’élection, les Américains étaient divisés entre plusieurs candidats. Les uns voulaient Mr. Adams, d’autres le général Jackson, d’autres encore Mr. Crawford et enfin Mr. Clay.

Ce fut un moment d’un bien grand intérêt que celui de la décision. Chaque parti voulait que son candidat fût nommé. Enfin les voix furent relevées et comptées. Mr. Adams en eut 87 ; le général Jackson 71 ; et Mr. Crawford 54. Mr. Adams, ayant obtenu le plus de suffrages, fut solennellement proclamé président le 4 Mars 1825, et prêta serment de soutenir la constitution.

3. Le nouveau président ne montra pas autant de popularité que ses prédécesseurs. Mais sous son administration, les États continuèrent à prospérer, la paix se soutint avec les autres nations, la dette contractée pour la guerre diminua, enfin des canaux nombreux, des chemins de fer et d’autres travaux publics furent terminés.

4. Pendant les années 1824 et 1825 les Américains reçurent la visite de leur vieil ami Lafayette qui les avait si généreusement aidés à conquérir leur indépendance. Lafayette fut salué comme l’ami et le bienfaiteur de l’Amérique. Le congrès ayant appris qu’il était ruiné vota pour lui deux cent mille dollars et une large portion de terrain. Cette donation fait honneur aux Américains. Lafayette l’avait méritée par les services nobles et signalés qu’il leur rendit. Le 7 Septembre il repartit pour la France, le congrès le fit reconduire sur une superbe frégate.

5. En 1825 on acheva le grand canal d’Érié, dans l’état de New-York. Ce canal qui a trois cent soixante cinq milles de long, joint le Lac Érié avec la rivière d’Hudson à Albany. Il fut commencé le 4 Juillet 1817, et coûta plus de neuf millions de dollars. Le premier bateau parti du Lac Érié arriva à New-York le 4 Octobre 1825.

6. Ce fut l’année suivante, le 4 Juillet 1826, cinquante ans jour pour jour après la déclaration de l’indépendance, qu’arriva la mort de deux ex-présidents John Adams (père de John Quincy Adams) et Jefferson. Il est étonnant que ces deux grands hommes aient vécu cinquante ans depuis cette époque et bien plus étonnant qu’ils aient cessé d’exister presqu’à la même heure.

7. Les opinions furent fortement partagées à l’élection de 1829, Mr. Adams et le général Jackson étaient encore les deux candidats, chacun d’eux avait de puissants amis, mais cette fois Mr. Jackson obtint 178 voix et Mr. Adams n’en eut que 83.

8. Le général Jackson appelé à la présidence le 4 Mars 1829 a été réélu en 1832. Divers jugements ont été portés sur la sagesse de son administration. Chaque président a toujours ses partisans et ses antagonistes. Dans quelques années d’ici l’historien sera plus capable de reconnaître à quel mal ce gouvernement aura remédié et quel bien il aura produit.

QUESTIONS.

1. Quels furent les principaux candidats pour l’élection de 1825 ?

2. Combien de voix Mr. Adams obtint-il ? Et le général Jackson ? Et Mr. Crawford ? Qui fut donc nommé président ? Quel jour fut-il élu ?

3. Mr. Adams fut-il aussi populaire que ses prédécesseurs ? Les États ne continuèrent-ils pas à prospérer sous son administration ? De quelle manière ?

4. Qu’arriva-t-il en 1824 et 1825 ? Quels services Lafayette rendit-il aux Américains ? Comment fut-il reçu ? Que fit le congrès pour lui ? Que dit-on de cette donation ? Quel jour Lafayette repartit-il pour la France ? Sur quel bâtiment ?

5. Quel ouvrage acheva-t-on en 1825 ? Quelle est la longueur du canal d’Érié ? Quelles sont les eaux que ce canal réunit ? Quand fut-il commencé ? Combien de dollars coûta-t-il ? Quel jour le premier bateau parti du lac Érié arriva-t-il à New-York ?

6. Quel événement remarquable eut lieu le 4 Juillet 1826 ? Depuis combien d’années l’indépendance était elle déclarée ?

7. En quelle année eut lieu l’élection suivante ? Quels étaient les candidats ? Combien y eut-il-de voix pour Mr. Jackson ? Et pour Mr. Adams ?

8. Quand le général Jackson fut-il appelé à la présidence ? Quand fut-il réélu ? Que dit-on de la sagesse de son gouvernement ?


HISTOIRE.

1. Je vous ai parlé de la visite que Lafayette fit aux habitans des États-Unis en 1815 et 1826. Je vous citerai un petit incident qui arriva tandis qu’il voyageait dans les états de l’Ouest.

2. Lafayette et ceux qui l’accompagnaient s’étaient arrêtés à un petit village pour y passer la nuit. Levasseur, secrétaire de Lafayette entra dans la boutique d’un marchand pour y acheter quelques objets. Tandis qu’il attendait devant le comptoir, un Indien entra

3. « Monsieur, » dit-il, en donnant au marchand une pièce de dix-huit sous, « du wisky ? » Le marchand prit l’argent et dit à l’Indien d’attendre un instant, quelques moments après l’Indien redemanda son wisky. « Commencez par le payer » reprit le marchand, « Je vous ai déjà donné dix-huit sous. » répondit l’Indien.

4. « Vous êtes un fripon, » s’écria le marchand en colère, « sortez de ma boutique. » — L’Indien allait répliquer, le marchand ne lui en laissa pas le temps, il se jeta sur lui et le poussa brutalement hors de la porte.

5. Levasseur fut saisi d’indignation mais la prudence lui défendait d’intervenir dans cette affaire. Il suivit l’Indien à quelque distance de la boutique, il le vit s’arrêter et rester immobile comme une statue, puis croisant ses bras sur sa poitrine, il fit encore quelques pas, s’arrêta de nouveau, leva les yeux et les mains vers le ciel et parut s’écrier : Les blancs n’ont-ils point de Dieu ? Sa vengeance ne se réveillera-t-elle pas ? Ne prendra-t-il jamais pitié des pauvres Indiens ?

6. Alors, continuant sa route, il s’enfonça dans la forêt et disparut. — Ah, pauvres Indiens ! pensa Levasseur, les blancs vous engagent à acheter du poison et quand vous leur apportez votre argent ils ne vous donnent en revanche que des injures et de mauvais traitements. Ils vous appellent sauvages : ne le sont-ils pas plus que vous ?

7. Écoutez, chers enfans, le conseil que j’ai à vous donner. Vous serez bientôt des hommes, vous vous répandrez dans tout le pays, vous rencontrerez les hommes rouges de la forêt, traitez les avec bonté, ils possèdent une âme comme la vôtre. Ils ont été les premiers propriétaires de la terre que vous habitez, et elle leur appartiendrait encore s’ils n’avaient été repoussés par la force des armes. Les débris de leur malheureuse nation ne doivent donc plus inspirer que la pitié et l’intérêt. Plaise à Dieu que la lumière de l’Évangile brille bientôt parmi eux et qu’ils ne tardent pas à jouir des bienfaits de la civilisation.


FIN.