L’Origine des Cons sauvages (éd. 1797)/10

Chez Jean de la Montagne (A Lyon) (p. 64-70).

La source du gros fessier des
nourices, et la raison pourquoi
elles sont si fendues
entre les jambes.




Considérant que temps perdu entr’autres choses est bien difficile à recouvrer, et voyant que la debille, languissante et malheureuse oysiveté vouloit tendre ses lacz et filetz de pigricité, pour ainsi que grues me prendre à l’englux ou pipée, affin de plus seurement m’en esloigne, j’ai entreprins estendre, mon vol jusqu’aux théastres philosophaux, et d’iceulx extraire une des plus naturalistes raisons que toutes les autres que je sache, et en laquelle moins d’utilité que récréation vous verrés. Et si est autant loing de mensonge que est un chien de sa queue. Je double que faciez difficulté de la croire, et n’eust esté que vous m’avez trouvé crédible, et que vous me portez cette grande foy, ne me l’eusse ingéré vous en mettre aucune chose en lumière.

Or après avoir attentifvement, et avec pénétrance, contemplé les astres du ciel, et joinct à ma raison les grans argumens et autorités de l’infiny nombre de mes prédécesseurs souverains philosophes, je me suis mis à rememorer comme Prometheus donna charge à Pandora de faire à sa compaigne une ouverture entre ses jambes, par laquelle il peust passer aussi gros que le noyau d’une pesche ; et lui dist outre plus, quant tu auras fait ce pertuys si tu voys que la playe s’eschauffe, et que le feu s’y mette, tu prendras d’une huylle de reins, et lui en frotteras la playe par le dedans. Et si tost que Pandora eust ouy ce commandement alla à sa femme pour l’exécuter, et en allant s’esbayssoit en lui-mesme et pensoit en quelle occasion Prometheus lui commandoit faire telle incision. Pour ce que le dict Pandora estoit un peu sourd, il pensoit que Prometheus lui eust commandé faire ung trou à mettre un hoyau ou une besche, au lieu d’ung noyau de pesche. Toutes fois sans s’enquérir, ne pourquoy, exécute son commandement ; car entre les jambes de sa femme, au bout des cuisses, au plus bas du ventre lui feist la cicatrice aussi grande comme un hoyau, ou une besche, pour le noyau d’une pesche. Je ne vous sçaurois dire si justement lequel se fust des deux : car en grandeur ou longueur ils ne sont guères différens. Je ne m’y suis pas amusé ne arrêté, pour ce qu’on en voit assez tous les jours pour le sçavoir et bien cognoistre. Mais de malheur et de malle fortune le povre homme regardoit de près s’il faisoit bien, et ladicte femme lascha une grosse vesse orde, puante et infecte, qu’il en feust tant estourdy qu’il ne sçavoit ce qu’il faisoit, et en tressaillant de paour son instrument vacillant en sa main feist le trou si très-profond, que de la fente ne sçeust trouver le bout, qui est pourquoy il est incurable : et aussi par sa sourdité l’avoir fait aussi grand que une besche, au lieu de le faire comme pour mettre le noyau d’une pesche. Et le pire que j’y voye, c’est que les femmes qui en sont yssues ont telle playe comme celle que feist ce dict Pandora, et nous povres hommes en sommes détenus en un très-grand servage. Parquoi après que le dict Pandora lui connoissant et sçachant avoir failly et erré grandement envers ladite femme, pour la contenter s’efforçoit du tout de luy donner de son huylle de reins, par quoy nous aultres hommes héritans de ce malheur sommes subjects leur en faire au cas pareil.


FIN.