L’Italie libérée - Lettres au prince Napoléon/02

L’Italie libérée - Lettres au prince Napoléon
Revue des Deux Mondes7e période, tome 13 (p. 550-575).
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L’ITALIE LIBÉRÉE
(1857-1862)

LETTRES ET DÉPÊCHES

DU ROI VICTOR EMMANUEL II
ET DU COMTE DE CAVOUR

AU PRINCE NAPOLÉON

II [1]
LA CRISE
(17 MARS — 10 MAI 1859)

La solution du problème italien dépendait d’un point essentiel : que les Puissances européennes, — Angleterre, Russie et Prusse, — laissassent, sans s’en mêler, la France et le Piémont régler la question avec l’Autriche seule.

Sans doute, celle-ci était-elle encore de force à lutter, et avait-elle, de 1791 à 1815, prouvé son extraordinaire endurance et sa faculté à « encaisser les coups. » Depuis la déclaration de Pilnitz (27 août 1791] jusqu’à la Convention du 2 août 1815, qui donna à la captivité de l’empereur Napoléon un aspect de légalité, l’Autriche n’avait connu que des défaites : à Campo-Formio, à Rastadt, à Paris, à Lunéville, à Presbourg, à Vienne, elle avait dû demander grâce et implorer, moyennant ses sujets et ses provinces, un pardon chèrement acheté. Et, quelques années, quelques mois plus tard, elle était debout, en armes, prête à soutenir une lutte plus sévère encore que toutes les autres. Mais les événements de 1849 avaient montré la fêlure, et prouvé que cet agglomérat d’États qui n’avaient ni la même nationalité, ni la même langue, ni la même constitution sociale, ni le même idéal ethnique, et qu’avait seul unis un loyalisme suranné, résisterait malaisément à une attaque du dehors, combinée avec des révoltes au dedans. L’expérience de 1849 avait démontré que l’Autriche avait été incapable de réduire seule la révolte d’une des nations dont son Empire était formé, si cette nation unanime ne perdait point ses forces à des dissensions intestines, et si l’étranger n’intervenait point pour l’asservir. Tel avait été le cas lorsque l’Autriche avait dû son salut à l’intervention de l’armée russe, et de quelle ingratitude n’avait-elle point payé l’empereur Nicolas Ier, lorsque celui-ci avait eu, à propos de la Turquie, à lutter contre la France et l’Angleterre ? La Russie dûment avertie s’était donc engagée à conserver une neutralité presque bienveillante, et les garanties en avaient été données au prince Napoléon lors de son voyage à Varsovie.

L’Angleterre simulait pour l’Italie une grande passion, mais cette passion était platonique. Elle exigeait que, pour le moment, on ne troublât point la paix, car, absorbée par la question d’Orient, elle ne pouvait s’occuper de l’Italie, « soit, disait Cavour à d’Azeglio, parce qu’on ne peut mener de front deux affaires d’une immense importance, soit parce qu’elle est obligée de ménager l’Autriche qu’elle considère comme l’épée destinée à tenir la Russie en respect, » Il y avait mieux : de très anciennes alliances avaient tissé entre les deux pays, leurs souverains peut-être, leurs aristocraties certainement, des liens qui ne pouvaient facilement être rompus, et, bien que préconisant une politique libérale dans la péninsule, l’Angleterre ne souhaitait aucunement qu’une Italie libérée, devenue par là une des grandes Puissances européennes, changeât sur l’échiquier la disposition des pièces, réglée par le prince de Metternich, avec, pour objet principal, d’annihiler la France et de la mettre en servage. Si la France était, dans une mesure, parvenue à s’émanciper, — car il avait bien fallu que l’Angleterre usât d’elle contre les Russes, — il ne convenait certes pas qu’elle s’avisât de battre en brèche le dogme essentiel : celui des Traités de Vienne ; que, de la libération de l’Italie elle tirât une alliée dont on pouvait, l’histoire en main, prédire la vigueur, les immenses ressources et les destinées épiques. Il ne fallait point qu’on vît, sous le drapeau que Napoléon lui avait donné, renaître un peuple dont les ancêtres avaient conquis le monde, et qui lui avait donné ses lois.

Néanmoins, l’Angleterre n’irait point jusqu’à tirer l’épée. Sa répugnance pour les armes la menait toujours à chercher des alliés dont elle fit ses soldats, à moins qu’ils ne fussent ses mercenaires..., et, pour le moment, elle ne voyait point de nation disposée à jouer, pour elle, ce rôle ingrat. On pouvait donc penser que, après avoir discuté, après avoir échangé des notes verbales et écrites, après s’être proposée libéralement pour ouvrir des conférences et tenir des palabres, après s’être efforcée surtout à gagner du temps, elle accepterait le résultat une fois acquis, la délivrance une fois opérée, quitte à s’en parer et à tenir, en son propre nom, l’enfant sur les fonts du baptême. Ainsi s’assurerait-elle, à bon compte, une reconnaissance qui ne lui coûterait rien.

Mais il y avait la Prusse ; et que ferait-elle si l’Autriche réclamait son appui ? Sans doute, une rivalité d’un siècle avait créé une curieuse rivalité entre la dynastie si longtemps détentrice de la couronne du Saint Empire Romain Germanique, et la race peu sûre des Hohenzollern, promue à la royauté par brevet impérial de Léopold Ier. Sans doute, Frédéric II avait enlevé à l’impératrice Marie-Thérèse les provinces auxquelles elle devait tenir davantage, et le petit-fils de Marie-Thérèse ne les avait point recouvrées lors de cette refonte de l’Europe que les tenants de la Sainte-Alliance avaient combinée et accomplie à leur profit. Grandie singulièrement alors par ces gîtes d’étapes qu’elle avait ménagés à ses ambitions désormais sans limites, la Prusse de 1700 avait crû au point de devenir, devant l’Assemblée réunie à Francfort, la concurrente unique de l’Autriche aristocratique et catholique, d’y apparaître en qualité de Puissance libérale, presque libre-penseuse, parce que protestante.

Mais on avait bien vu que ce n’était là qu’une apparence ; si jamais la Prusse devait accéder à l’Empire, c’était des rois, non des peuples qu’elle entendait recevoir la couronne, et, dans sa rivalité avec l’Autriche, elle n’avait garde de sacrifier à ses ambitions la solidarité monarchique. Le Prince royal de Prusse, à ce moment lieutenant, à pouvoirs limités, du Roi son frère, ambitionnait une régence qui le mit hors de lisières. Il avait, le 8 octobre 1858, congédié le ministre Manteuffel (anti-autrichien), et appelé au pouvoir le prince Antoine de Hohenzollern, le général Bonin, et le baron de Schleinitz, nettement réactionnaires, inclinant vers l’Autriche, peu portés vers la Russie, hostiles à la France. On prétendait que l’empereur Napoléon III, lorsqu’il avait appris la formation de ce ministère, avait dit : « Cela se comprendrait si l’on se battait en Italie, mais à présent, c’est stupide. » Cavour, lui-même, écrivait au ministre du Roi à Berlin : « Cette modification fâcheuse nous cause une juste inquiétude. » Là était le danger ; il ne se manifesterait point tout de suite, à condition que l’Autriche fût assez habile pour laisser au Piémont le rôle d’agresseur, mais si, par la suite, au lieu de la victoire qu’elle escomptait, et dont elle se croyait assurée, l’Autriche, comme en d’autres temps où sa confiance au succès de ses armes n’était pas moins établie, éprouvait des échecs, la Prusse ne la laisserait point écraser, et peut-être entraînerait-elle la Confédération germanique.

Il était donc d’une importance capitale que l’on ne pût imputer aux Alliés franco-sardes d’avoir déclaré la guerre, car un tel acte eût donné ouverture au « casus fœderis, » et eût jeté sur leurs derrières les forces qui n’étaient point négligeables des États confédérés. Un demi-siècle ne s’était point écoulé depuis que la défection, à Leipzig, des régiments, jusque-là, si humblement serviles, avait changé la fortune de la guerre, et interrompu l’épopée française.

Il fallait donc une extrême circonspection, d’une part, pour empêcher l’Allemagne, et surtout la Prusse, de se mêler à la guerre ; d’autre part, pour amener l’Angleterre à un Congrès auquel serait soumis le problème italien. Que ce Congrès aboutît à un résultat efficace, il était permis d’en douter ; mais l’Angleterre n’aurait plus rien à objecter.

L’essentiel était encore que, dans ce Congrès, le Piémont fût admis sur le pied des grandes Puissances. En lui ménageant, par la participation qu’il lui avait assurée à la guerre de Crimée, l’entrée au Congrès de Paris, l’Empereur lui avait inspiré un tel orgueil et une telle assurance qu’il l’avait mal disposé à des concessions que réclamait sa politique moins pressée. Aussi eût-il admis que, à côté du Piémont, figurassent au Congrès les États souverains de l’Italie centrale et de l’Italie méridionale, ce que Cavour se refusait violemment à accepter. Cavour n’admettait point qu’il pût risquer ainsi cette extraordinaire posture qu’avait value à son pays l’amitié de la France.

Ce sont là les points essentiels, traités et résolus, dans les dépêches échangées du 17 mars au 14 avril, entre Napoléon III, auquel le prince Napoléon sert d’interprète, et le comte de Cavour. Ce dialogue télégraphique prend une extraordinaire acuité. Le froissement des épées, les feintes des adversaires, les nouvelles qu’ils imaginent, et dont ils garantissent la véracité douteuse, les paniques qu’ils provoquent, les pièges qu’ils tendent et où l’adversaire s’empresse de se jeter, tel est, durant ce mois tragique, le spectacle qu’ils donnent. Il est permis de dire que les jouteurs sont de premier ordre, et que l’un n’est point inférieur à l’autre.


Le 17 mars, à neuf heures et demie du soir, Nigra télégraphie à Cavour, en se servant du chiffre du Prince Napoléon [2] :


J’ai vu l’Empereur aujourd’hui. Sa Majesté croit indispensable que la note contienne l’assurance explicite que nous n’attaquerons pas, puisque l’Autriche a consenti déclaration analogue...

L’Empereur m’a dit que lord Cowley n’a porté aucune proposition et que sa mission n’a abouti à rien de concret.

L’ambassadeur de Russie a communiqué à l’Empereur note très bienveillante de son gouvernement, proposant congrès cinq grandes Puissances, pour résoudre question italienne. L’Empereur veut consentir ; il pense que l’Autriche n’acceptera pas. J’ai demandé à Sa Majesté que le Piémont, en tout cas, y fût représenté.

Nigra termine :

Répondez par le télégraphe au Prince ce que vous pensez à cet égard, afin que Son Altesse Impériale puisse en parler demain à l’Empereur.


Cavour répond le lendemain (18) qu’il prie le Prince de dire à Nigra de modifier la dépêche suivant avis de l’Empereur et d’expédier tout de suite à Londres :


Je crois éviter Congrès pour affaires Italie aurait un effet désastreux en Lombardie et Vénétie. Si le Piémont est exclu, la position devient insupportable. Je serais entraîné ou forcé à donner ma démission. Modène a réclamé les déserteurs, j’ai répondu que la convention n’était pas applicable circonstance, lorsque l’armée sur le pied de guerre est réunie sur nos frontières.


Le 18, à une heure après-midi, le Prince télégraphie à Cavour :

Reçu dépêche de cette nuit. Restez avant tout ministre. Quitter serait déserter. Ne pensez pas à cela. Ce serait odieux et impossible, et tout perdre.

Reçu lettre par Rasponi. Seule combinaison possible est de nommer de suite Nigra premier secrétaire, de déplacer celui qui y est, et de donner ordre à Villamarina de prendre congé. Ainsi, Nigra sera naturellement chargé d’affaires.

La dépêche pour Londres sera préparée et envoyée par M. Nigra.

Je vous demande si vous voulez publier mémorandum à l’Angleterre. Dans ce cas, il faudrait l’envoyer tout de suite, et M. Nigra le donnerait au Nord, très favorable à la cause, et qu’elle vous attacherait.

Je vais voir l’Empereur, j’insisterai pour que le Piémont soit admis au Congrès, s’il y a lieu, — de la façon la plus vive. Ecrivez à l’Empereur dans ce sens, vous et le Roi, par courrier.

Je crois et j’espère que l’Autriche refusera, surtout si vous y êtes. J’attends réponse.


Le 22 mars, à sept heures et demie du soir, il télégraphie :

Je sors de chez l’Empereur qui me charge de vous écrire que l’article du Moniteur de ce matin, dans la partie non officielle, est une simple énonciation de nouvelle et non une déclaration précise des principes adoptés par la France. L’Empereur est prêt, sur vos réclamations, à accepter dans le Congrès les représentants de la Sardaigne et des autres Etals souverains de l’Italie ; c’est une satisfaction pour vous.

La France va insister pour faire admettre ces représentants par l’Angleterre et la Russie au Congrès. Vous êtes autorisé à faire connaître et vos réclamations et la probabilité de les voir admises, soit dans un article de votre journal officiel, soit par une déclaration à la tribune, modérée, mais formelle. Cela vous sera d’un grand secours sur l’opinion en Italie. Dans quelques jours, le Moniteur ici dira la même chose.

L’Empereur a vu et approuve cette dépêche.

Répondez ce que vous ferez.


Le 23, Cavour répond :

L’Empereur, en nous mettant sur le même rang que Modène et la Toscane, empire notre position déjà déplorable. Annonce Congrès commencé porter ses fruits. Ministère Toscane, qui hésitait, s’est décidé pour système réaction, a aboli la liberté de la presse politique. Demain, je prendrai les ordres du Roi.


Le même jour (23 mars), le Prince télégraphie :

Nigra chez moi en sortant de chez l’Empereur. J’ai eu l’idée de proposer votre arrivée à Paris. Cette idée est adoptée et approuvée par l’Empereur. Venez donc tout de suite, sans perdre une heure. Effet sera très bon sur nos amis, et abattra nos ennemis. N’hésitez pas, c’est un coup décisif. Donnez grande publicité à votre voyage. Dites que c’est pour vous concerter avec la France sur la conduite à tenir au Congrès où vous irez représenter le Piémont. Ici, vous aurez grande influence et tout peut encore tourner à votre avantage. Dites que vous êtes invité par l’Empereur à venir le voir. Nigra vous a déjà écrit. Je joins mes prières aux siennes ; si vous partez demain soir, 24 mars, nous vous attendons le 26 au matin.

Venez et prévenez-moi par le télégraphe. Cette démarche est de la dernière importance. Venez.

Les événements se pressent. Le 7 avril, Cavour télégraphie.

Le Roi vous prie d’appeler l’attention de l’Empereur sur un ordre du jour qui vient d’être lu dans les casernes de l’armée autrichienne, et que Havas publiera demain matin.


Le Prince répond, le 8, à cinq heures du soir :

Reçu votre dépêche d’hier, 10 h. 20 du soir.

Vu l’Empereur ; lord Cowley s’y trouvait. L’Empereur ne peut pas croire que l’ordre du jour à l’armée autrichienne soit vrai. Il a remarqué que, d’après la correspondance Havas, il n’était pas signé.

Lord Cowley a répété combien M. Buol à Vienne lui avait donné l’assurance formelle de ne pas vous attaquer. L’Empereur pense que cela peut être une manœuvre pour vous exciter à prendre l’initiative d’attaquer, ce qu’il faut éviter à tout prix. L’Autriche est dans une impasse, elle ne peut attaquer après promesse faite à l’Angleterre, et ne peut cependant rester dans l’état où elle est.

Congrès embourbé.

Répondez tout de suite en m’envoyant preuve de la vérité de l’ordre du jour.

Mes hommages au Roi.


Le même jour, dépêche de Turin :

Copies de l’ordre du jour arrivées en grand nombre à Turin hier au soir et ce matin. Lettre de l’intendant de Novare dit que le général Giulay, après avoir passé en revue la garnison de Milan, a adressé, en allemand, aux Croates nouvellement arrivés, un discours que des spectateurs ont reproduit sous la forme d’un ordre du jour répandu à profusion dans Milan. Excitations et manœuvres de l’Autriche sans influence sur le Gouvernement et sur la population.

Sir Hudson appelé à Londres.

Massimo Azeglio, arrivé à Turin, partira dans quelques jours pour Paris.


Le 10, réponse du Prince :

Reçu dépêche d’hier 4 heures et communiqué le soir à l’Empereur.

Les renseignements reçus .directement par lui, conformes à ce que vous m’écrivez. Il comprend extrême gravité de la situation. Hier soir et ce matin, rien encore décidé. A l’instant, reçois ordre de vous envoyer communication suivante : « Veux-tu répondre au Roi que demain je prendrai une décision que je te ferai connaître ; qu’en attendant, je vais choisir un officier pour lui envoyer. »


Le 11, à huit heures du soir, le Prince télégraphie :

L’Empereur attend une réponse de Vienne sur les armements pour rappeler nos hommes en congé (125 000 hommes).

En attendant, notre armée à Lyon se renforce.

Il envoie chez vous un officier d’état-major, M. Saget.

Envoyez-moi sans retard M. Nigra, en attendant M. Azeglio ; il manque beaucoup ici.


Mais Cavour, qui presse le mouvement, télégraphie, le 12 :

Marquis Villamarina écrit que comte Walewski a admis en principe désarmement simultané de France, Sardaigne, Autriche. Impossible pour nous d’accepter sans garantie rempart de la liberté de la rive droite du Pô et du principe non intervention ; je pense ayant été France ne peut, sans manquer aux engagements envers nous, accepter d’autres conditions ; impossible renvoyer volontaires avant issue finale du Congrès. Veuillez soumettre ce qui précède à l’appréciation de l’Empereur.


Le 13, à 6 heures et demie de l’après-midi, le Prince télégraphie :

Reçu dépêche d’hier soir.

Ni l’Empereur qui me charge de vous écrire « que le principe du désarmement admis ne concerne que les cinq grandes Puissances allant au Congrès. C’est une retraite déguisée pour l’Autriche. La France n’a voulu s’engager à aucune démarche dans ce sens vis à vis de la Sardaigne qui reste libre. On ne sait pas encore ce que répondra l’Autriche, et si elle accepte Congrès dans ces conditions. Depuis vingt jours, ministre de la Guerre a prévenu M. Villamarina, 20 000 fusils étaient prêts pour le Piémont, à Grenoble, en demandant que vous les fassiez prendre. Hier seulement, votre ministre a répondu en remerciant, sans donner d’autre indication.

J’ajoute personnellement que cette réponse de l’Empereur prouve que tout se fait par équivoque, rien franchement et clairement. Il est évident pour mdi que l’Autriche refusera une promesse de désarmement qui ne tomberait que sur elle. Restez donc fermes et modérés, et attendez les événements. Je doute toujours même de la réunion du Congrès.

Ce que l’Empereur vous fait dire sur l’indolence de Villamarina devrait vous faire prendre un parti. Enfin, il est impossible d’être plus mal servi. Donnez ordres pour prendre les 20 000 fusils à Grenoble. Quand arrive M. Nigra ?


Cavour répond le 14 par télégraphe :

Le chargé d’affaires anglais doit venir demander le désarmement de la Sardaigne : je répondrai ne pouvoir prendre parti jusqu’au retour du Roi qui est à Pollenza.

Le chevalier Nigra arrivera demain à Paris. Votre Altesse pourra me faire dire quelque chose sur réponse à l’Angleterre.

Azeglio arrivera samedi.

J’envoie par la poste explication sur l’affaire des fusils.


Le roi Victor-Emmanuel au prince Napoléon.


14 avril 1859.

Mon cher beau-fils,

Je te remercie de ta lettre dans laquelle tu me dis de bonnes choses pour la situation présente, et je te remercie aussi du vif intérêt que tu portes à notre cause.

Je t’assure que, dans ces derniers temps, j’ai passé de bien mauvais moments, mais pourtant tout marche encore assez bien ici, il y a du calme. Je suis obligé, moi, figure-toi, de calmer un peu Cavour, un peu le parti, et je t’assure que ce n’est pas mon fort ; pourtant, grâce au ciel, j’y réussis. Il faut que je t’avertisse confidentiellement que Cavour a perdu ici dans l’opinion des gens sérieux et éclairés, à cause de ses fureurs momentanées, et d’une confiance illimitée qu’il accorde parfois à des gens qui ne la méritent pas, ce qui lui a fait du tort, mais en un mot, il n’y a rien à craindre, tous se resserrant étroitement autour de moi, et je leur fais faire tout ce que je veux, même dans les moments tristes et difficiles.

Je t’envoie Azeglio, mon ami, comme tu le désires, et je te prie de le recommander à l’Empereur de ma part, à qui il plaira, je suis sûr. Cet honnête homme a beaucoup plus de calme que Cavour et voit toujours juste en politique. Il a les meilleures volontés et désirs pour me servir, et pour l’avenir de notre chère Patrie ; il vit dans l’Autriche le sentiment de la crainte, opinion que, depuis une semaine, je partage aussi moi. Ce qu’elle fit, fut pour nous effrayer. Actuellement, elle craint la guerre et est prête, sauf que je me trompe, s’il y a le Congrès, à céder. S’il n’y a pas le Congrès, c’est la guerre ; si le Congrès a lieu, elle cédera et cédera en délivrant toute la droite du Pô de sa possession, et alors, pour le moment, si on ne peut pas faire mieux, cela me suffirait ; le premier coup de pied lui serait donné, et, dans une époque pas très reculée, on ferait le reste, et [à] meilleures conditions, et cela serait mon affaire. Ce qui me fortifie toujours plus dans ces idées, c’est le détail que j’ai eu hier d’un Conseil tenu par l’Empereur à Vienne, où il y avait tous les archiducs, vieux et jeunes, Buol et Ess. L’Empereur voulait tout détruire. Le doyen des archiducs et Ess lui dirent de terribles vérités, pour ne pas faire d’imprudences, et pour céder afin de ne pas perdre le tout. Demande à Nigra, je lui ai tout conté.

Mon cher, je viens de recevoir une charmante nouvelle. On vient de m’apporter une dépêche : on va proposer à France, Autriche et Piémont, de désarmer ensemble, et que la France accepte, il ne manquerait plus que cela pour aller en avant. Si cette proposition est faite à Piémont et à Autriche, très bien ; Piémont répondra non jusqu’après Congrès, avec politesse pourtant. Mais si l’Empereur l’admet aussi, que dois-je faire ? Si je refuse, l’avenir de ma politique est ruiné au Congrès. Si j’accepte le désarmement avant le Congrès, et sans un résultat qu’on puisse faire comprendre aux Italiens, je passe pour un traître, et l’Empereur aussi. Est-il possible qu’on agisse toujours ainsi et qu’on me mette toujours dans de tels embarras, lorsque moi, j’ai toujours agi si loyalement avec la France ? Qu’avez-vous à craindre, vous autres, puissante nation, lorsque moi, si petit, je tiens la tête haute en face du monde entier, et que je ne crains rien ?

En un mot de vendredi ou samedi, fais-moi savoir en chiffre, 1° s’il y aura conférence et quand ; 2° si France accepte désarmement. Je t’en prie.

Adieu, je t’embrasse, toi et ta femme, je vous aime tant.

Ton très affectionné beau-père.

VICTOR-EMMANUEL.

Avant d’avoir reçu cette lettre, le Prince a, le 14, à une heure et demie, télégraphié à Cavour.

Hier, ai chargé M. Nigra de vous donner avis de l’Empereur sur votre réponse à faire pour le principe du désarmement. Ce matin, M. Nigra apporte votre réponse qui demande mon avis.

Conseil de Walewski à Villamarina sans importance. Je suis d’avis, comme le premier jour de votre arrivée, que vous devez répondre « que, si vous êtes admis au Congrès sur le pied d’égalité avec les grandes Puissances, vous ferez ce qu’elles feront pour l’adoption du principe du désarmement, mais qu’étant dehors par le refus de l’Angleterre de vous y faire admettre, vous ne pouvez désarmer, ou le promettre, avant de savoir les garanties que le Congrès obtiendra de l’Autriche pour vous. » Il faut vous attendre à voir admettre les autres Etats italiens, mais n’en dites pas un mot. Cette réponse est celle que l’Empereur a faite hier à Londres. Elle embarrasse l’Angleterre et sera refusée probablement par l’Autriche. Ce qu’il faut, c’est soutenir l’opinion italienne, et cependant ne pas passer pour vouloir la guerre à tout prix aux yeux de l’Europe. Il faut, toujours et sans cesse, présenter l’Autriche comme menaçante, provocante, agressive, et vous, vous défendant seulement. Je crois que votre réponse devrait être publiée. Cela ferait bon effet. Pourquoi ne la liriez-vous pas demain à votre Parlement, afin qu’elle fût connue à la discussion anglaise du lundi 18 ? Il faudrait que votre ministre à Londres s’entendit avec Palmerston, Clarendon et John Russell. Ils approuveront, je crois, votre réponse qui peut embarrasser le ministère.


Les tentatives de négociations se heurtent à des démonstrations militaires des Autrichiens, que Cavour annonce par une dépêche du 17.

Huitième corps est sur l’Adda, quatre corps entre le Tessin et l’Adda ; nouvelles de Berlin, Londres, Milan font considérer attaque comme très prochaine, pourrait avoir lieu jeudi. Priez Empereur envoyer sans retard général Bourbaki avec sa division à Briançon et lui donner ordre être prêt partir sur avis passage Tessin par ministre France.

Le prince Napoléon répond le même jour, à onze heures du soir :


Reçu dépêche du 17, 5 heures du soir,

Vu l’Empereur. Marquis d’Azeglio a communiqué même nouvelle ce matin. L’Empereur ne veut pas croire à attaque de l’Autriche si soudaine, si prochaine. Nouvelles reçues d’Angleterre sur effet de la proposition de vous admettre au Congrès, assez favorables, sans cependant être décisives. J’ai vu dépêche de Pélissier ; nous n’aurons nouvelles certaines de la conduite de l’Angleterre que demain après Conseil qu’ils doivent tenir à Londres avant d’aller au Parlement. L’Empereur m’a assuré que les ordres étaient donnés à Bourbaki, à Briançon, pour se tenir tout prêt. Il est parti de Paris avant-hier. Il y a, outre cette division, deux autres, très fortes, toutes prêtes aux environs de Lyon. Le général La Marmora doit s’être entendu avec l’officier envoyé pour détails militaires.

Ecrivez-moi quel plan stratégique vous avez arrêté en cas d’attaque. Défendrez-vous Turin et position sur la Dora ? Commandement de votre armée est-il organisé et fonctionne-t-il ? Où est votre Grand Quartier Général ? Ce commandement me parait indispensable.

Ecrivez-moi tous les jours une ou deux fois, pour donner tous les détails sur mouvements autrichiens.


Cavour répond le 18 :

Le prince de La Tour d’Auvergne m’a engagé, au nom du comte Walewski, à accepter principe désarmement avec admission au Congrès, simplement pour discuter application du principe en annonçant guerre en cas de refus. Impossible accepter sans nous déshonorer. Nous sommes prêts à nous défendre, mais indispensable que Empereur envoie ordres pressants à l’armée, car il y a encore peu de troupes à Briançon. Gouvernement de Toscane s’est décidé pour neutralité. Croyez-vous bon que nous demandions tout de suite alliance éventuelle ? Quelles instructions aurait dans ce cas ministre de France ?


Le 19, à une heure un quart, le Prince répond, acceptant la suggestion de Cavour :

Reçu dépêche d’hier, cinq heures du soir.

Je l’ai envoyée tout de suite à l’Empereur d’où je sortais, avec une lettre pour me plaindre de ce qu’il me faisait écrire que vous seriez admis sur le pied d’égalité avec les grandes Puissances au Congrès, en admettant principe de désarmement, tandis que Walewski vous faisait dire que vous ne seriez admis que pour discuter l’application de ce principe. Empereur a fait publier article ce matin au Moniteur qui expose situation. Il n’a pas voulu que la France apprit par le Parlement anglais ce qui se passait. Angleterre vous accepte donc au Congrès ; Autriche est furieuse. On assure qu’elle viendra au Congrès avec vous, j’en doute encore. C’est un triomphe moral pour le Piémont que son entrée au Congrès. Vous savez que c’était ma première idée. Quant au désarmement, c’est le mauvais côté pour vous, mais il y a moyen de le diminuer dans l’exécution ; d’abord gardez le corps de volontaires ; ensuite, surveillez bien la façon dont Autriche désarmera. Ecrivez-moi effet produit chez vous par la nouvelle phase de la question. En Europe, cela sera regardé comme un succès pour France et Piémont, et un échec pour Autriche.

Ordres partis pour les troupes sur votre frontière. Elles se massent. Je ne crois plus à attaque de l’Autriche, mais continuez bien mesures de précaution.

Ce que je vous écris m’est personnel et n’a rien d’officiel.

Empereur a reçu rapport de Vienne sur indiscrétion commise dans les Principautés par M. Astraga. Il a trop parlé à Belgrade, a tout dévoilé sur nos projets sur la Hongrie au prince Milosch, qui est assez mou et a été effrayé.

Recommandez à M. Astraga plus de réserve et de prudence/ Il est léger et nous fait grand tort.


Le comte de Cavour au prince Napoléon.


18 avril 1859.

Monseigneur,

Me rendant à l’invitation que Votre Altesse a bien voulu m’adresser par le télégraphe, je commence dès aujourd’hui une série de renseignements journaliers.

Les deux dépêches télégraphiques que j’ai adressées hier, une à Votre Altesse et l’autre à d’Azeglio, m’ont été inspirées par les motifs suivants.

1° Lord Malmesbury a dit à un de mes amis, dans le but que cela me fût répété, qu’il avait lu l’ultimatum que le comte de Buol comptait adresser à la Sardaigne dans le cas où nous aurions persisté dans le refus de désarmer.

2° Un haut personnage de Berlin a dit à notre ministre, M. de Launay, de me prévenir que, si nous n’adhérions pas à l’invitation de désarmer, l’Autriche avait déclaré qu’elle se chargeait d’obtenir par les armes, en passant le Tessin, ce que nous refuserions à la diplomatie.

3° Les dispositions prises dernièrement par les généraux autrichiens indiquent un plan d’attaque prochain. Trois corps d’armée, les 3e, 5e, 7e, sont déjà sur le Tessin ; le 8e se rapproche de l’Adda pour faire place au nouveau corps qui arrive. D’immenses approvisionnements ont été accumulés à Pavie et à Milan. Toutes les communes de la Lombardie ont reçu l’ordre de tenir prêts, et à la disposition des autorités militaires, les moyens de transport dont elles peuvent disposer.

Enfin, des avis parvenus directement du quartier général de Vérone à Turin, ne laissaient aucun doute qu’on s’y préparait à un mouvement offensif.

Voici maintenant quelles sont nos dispositions pour notre défense :

Une division pour couvrir la vallée de la Scrivia, pour couvrir Gênes.

Deux divisions entre Alexandrie, Casai et Valence.

Deux divisions sur la Doire.

Si le gros de l’armée autrichienne venait droit sur Turin, sur la rive gauche, on tirerait encore d’Alexandrie une division ou une brigade.

Nous aurions encore sur la Doire la division de grosse cavalerie. Nous aurions par conséquent sur la Doire, 25 000 hommes au moins.

Pour repousser une attaque de 50 000 hommes, nous avons besoin de l’arrivée des Français. Une division suffirait pour produire un effet très grand sur notre armée et sur l’armée autrichienne. Avec deux divisions, nous sommes à peu près certains de battre les Autrichiens.

C’est par ces motifs que j’ai demandé à Votre Altesse de prier avec instance l’Empereur de faire réunir à Briançon la division du général Bourbaki, qui pourrait ainsi être en ligne en même temps que nos propres troupes.

Je dois prévenir Votre Altesse que ce qui a contribué un peu à nous alarmer, c’est l’avis qui nous est parvenu qu’il n’y a à Briançon qu’un seul régiment composé de 6 300 hommes.

Nous avons répondu à l’Angleterre, qui nous demandait de désarmer immédiatement, et à la Prusse, qui se contentait de l’admission du principe, que nous ne pouvions consentir ni à une chose ni à une autre, si on nous refusait l’admission au Congrès.

Maintenant, si nous entrons au Congrès, et qu’il faille désarmer, je déclare à Votre Altesse que je ne puis me faire une idée de ce qui arrivera. Nous pourrons faire accepter le renvoi des contingents, mais, s’il faut mettre à la porte les volontaires, il est probable, pour ne pas dire certain, que nous aurons des désordres à l’intérieur et la révolution à nos portes. Il faut que Mazzini ait flairé cette éventualité, car on m’assure qu’il a quitté l’Angleterre pour se rapprocher de nous et peut-être même pour venir se cacher dans Gênes.

Il serait possible que l’Angleterre l’encourage dans ses folles entreprises pour s’en faire au besoin une arme contre nous.

J’envisage d’un œil calme l’avenir : mais il est de mon devoir de faire savoir à l’Empereur que, le jour où nous aurons lâché sur l’Italie les 12 000 volontaires qui sont dans notre armée, nous ne sommes plus maîtres de la situation et nous serons entraînés Dieu sait où. Par conséquent, je suis réduit à faire des vœux ardents pour que l’Autriche, dans un moment de mauvaise humeur, nous attaque. Dussions-nous succomber les armes à la main, ce serait moins mal que de tomber dans le désordre et l’anarchie : ou d’être forcé à faire de l’ordre à la façon du roi de Naples. Dans ce moment, nous avons une force morale immense qui vaut une armée. Une fois que nous l’aurons perdue, rien ne nous la rendra plus.

Afin de dissiper le triste effet sur l’humeur de Votre Altesse que doivent produire ces fâcheuses prévisions, je prends la liberté de lui adresser une pastorale de l’évêque de Cagli [3] qui est de nature à édifier le public de l’univers.

Je prie Votre Altesse d’agréer l’hommage de mon respectueux dévouement.

CAVOUR.


Le Prince répond le 19, à 3 heures après midi, à la dépêche que Cavour lui avait expédiée le 18 :

Reçois réponse de l’Empereur par un billet à ma lettre très vive d’hier soir. Il m’écrit :

« J’ai l’explication de la dépêche de Cavour. La Tour d’Auvergne a pris pour une dépêche officielle, une réflexion personnelle de Walewski. Le mal est réparé, le comte Cavour ayant répondu officiellement qu’il acceptait le principe du désarmement s’il était admis au Congrès. L’Angleterre acceptant, les chances de guerre diminuent pour le présent. Si le comte Cavour croit possible d’avoir la Toscane comme alliée, je ne demande pas mieux. »

Je sais que l’Empereur a beaucoup grondé Walewski. Vous avez très bien fait de tenir bon. Continuez à être ferme et modéré, et tout ira bien. Votre entrée au Congrès est une grande victoire et fera grand effet. Je suis plus content aujourd’hui. Discours de Palmerston est bon. Expliquez bien la situation vraie en Italie. Maintenez les corps de volontaires.


Le 20, devant les nouvelles expédiées par M. de la Tour d’Auvergne, ministre à Turin, le Prince télégraphie :


Paris, 20 avril 1859, 3 à et demie après-midi.

Hier soir, j’ai reçu le billet suivant de l’Empereur : « La Tour d’Auvergne écrit que Cavour est très découragé. Je te prie de lui écrire et de lui dire de ma part qu’il ne perde pas courage. Que tout encore peut prendre une bonne tournure. Je ne puis en dire davantage, car la politique change de couleur trois fois par jour. »

J’ajoute que notre position est bien grave et mauvaise, que M. Walewski continue à se bien mal conduire, mais que, malgré tout, il faut que vous teniez bon. N’admettez en aucun cas le renvoi des volontaires et insistez pour désarmer exactement comme le fera l’Autriche ; sinon, non. Je ne sais pas encore si l’Autriche consent à venir au Congrès avec vous. Vous le saurez peut-être avant moi.

Reçu ce matin votre lettre du 18. Y répondrai par la poste


Le 21, à 4 heures du soir, le Prince télégraphie :

Vous devez savoir ce qui se pisse, mais je veux vous donner quelques détails.

Ce matin, note bien fâcheuse dans le Moniteur, contenant grandes concessions de notre part vis à vis de l’Autriche. A 9 heures du matin, tout a changé. Ai reçu billet suivant de l’Empereur :

« Les nouvelles de Vienne sont à la guerre. Je viens de donner des ordres pour mettre toute mon armée sur le pied de guerre. »

Viens de chez l’Empereur. Voici les détails :

Notre représentant à Vienne a écrit, dans la nuit, que l’Autriche refusait les propositions acceptées par tout le monde, et qu’elle avait expédié un envoyé à Turin pour vous poser un ultimatum de désarmement en vous donnant trois jours. L’Empereur vous prie d’attendre au dernier moment du délai pour répondre, afin de lui donner le temps de vous secourir.

Voilà mesures militaires que nous prenons :

Rappel de tous les hommes en congé.

Mise sur le pied de guerre de toute l’armée aujourd’hui.

Départ de Paris ce soir, par chemin de fer, de deux divisions pour l’armée de Lyon.

Division Bourbaki, près de 10 000 hommes, à Briançon.

Division Renauld, 10 000 hommes, à Grenoble.

3e division, 10 000 hommes, prête à entrer.

Les cinq autres divisions de l’armée de Lyon sont moins fortes (6 000 hommes), parce qu’elles ne viennent pas d’Afrique, et que les hommes en congé n’ont pas encore rejoint.

Cette armée divisée en deux corps : 1er commandé par Canrobert ; 2e par Baraguey d’Hilliers. — Commandant en chef pas encore nommé.

Nous ne savons encore rien d’Angleterre, ni de Prusse, sur effet produit par décision de l’Autriche.

Attendez attaque de l’Autriche qui sera, malgré tout, embarrassée et mettra, vis à vis de l’opinion publique, tous les torts de son côté.

A l’instant, il y a Conseil. J’insiste vivement pour un changement de ministère, mais je doute pouvoir l’obtenir. Je vous tiendrai exactement au courant de tout ce que je ferai. Faites-en autant, sans se préoccuper des répétitions.


Cavour répond aussitôt (le 21).

Reçu avec grande satisfaction votre dépêche.

Remerciez bien l’Empereur pour les mesures militaires. Attendrons les trois jours, il serait à désirer que deux divisions au moins vinssent par Gênes. Pays est très bien disposé, calme, décidé aux derniers sacrifices pour conquérir indépendance.


Le 22, il craint un changement et télégraphie :

A la dernière heure, le comte Buol cède sur les trois premiers points. Nous ne pouvons céder une ligne de plus sur le quatrième. Nous avons été acculés aux dernières limites des concessions. Un pas de plus, nous sommes perdus. Supplie Empereur de ne pas ralentir les mesures militaires. Concentrations énormes sur le Tessin.


L’Empereur est au contraire parfaitement résolu et il fait télégraphier par son cousin (22 avril, à 4 heures après midi) :

L’Empereur me charge de vous envoyer la dépêche suivante qu’il a écrite lui-même :

« Il y aura prêts à entrer en Piémont, dans quelques jours, dix divisions, cinq divisions par Suze, et cinq divisions par Gênes. Télégraphiez, dès que vous aurez reçu la sommation. Répondez le plus tard possible, en disant qu’ayant déjà répondu à l’Angleterre, vous n’avez rien à dire, et surtout n’acceptez pas la demande de médiation que propose l’Angleterre. »

(Minute de la main de l’Empereur.)


Cavour estime, le 23, les choses assez avancées pour télégraphier :

La Chambre des députés, convoquée depuis deux jours pour présentation de loi conférant pleins pouvoirs au Roi, se réunit à midi. Continuons activement mesures défensives. Farini fait dire à Votre Altesse que, lorsque la nouvelle de l’ultimatum est arrivée à Turin, grand nombre de personnes sont immédiatement parties pour les Duchés, la Toscane, les Romagnes, la Haute-Lombardie, préparer mouvement en aide de la guerre. Impossible rappeler ces individus, ce qui fait que nouvelle suspension rendrait probables grandes indiscrétions.


Le Prince accuse, le 23 à midi trois quarts, réception des deux dépêches des 22 et 23 ; il dit :

Veuillez accuser toujours réception de mes dépêches, sans cela confusion dans notre correspondance. Recommandez soins à vos employés. Hier, plusieurs erreurs dans votre dépêche.

Répondu d’avance à votre dépêche du 22 sur nouvelles concessions, puisque l’Empereur vous a fait dire de ne pas accepter nouvelle médiation de l’Angleterre. Tâchez qu’aucun mouvement, ni acte agressif d’aucune sorte ne se produise avant la déclaration de guerre de l’Autriche. Il faut absolument attendre son attaque, ou vous perdez tout. Nous faisons ici tous les préparatifs militaires possibles. Le Moniteur a publié la distribution des commandements, mais il nous faut du temps. Chaque jour gagné est inappréciable.

Avez-vous nouvelles de Klapka ? Je ne sais rien de lui.

Il ne ressort pas clairement de vos dépêches si vous avez reçu ultimatum autrichien.

Répondez sur ce point, tout de suite, sans perdre une heure


Le comte de Cavour répond aussitôt :


Turin, le 23 avril 1859.

Reçu à l’instant lettre du comte Buol demandant mise armée pied de paix, licenciement des volontaires. Porteur de la dépêche attendra trois jours réponse. S’il ne recevait pas de réponse, ou si elle n’est pas complètement satisfaisante, empereur d’Autriche aurait recours aux armes. On peut considérer cette pièce comme véritable déclaration de guerre. Préparatifs d’Autriche immenses. Serait désirable que troupes fussent prêtes à être embarquées et à passer mont Genèvre mardi matin.


Le 25, à 2 h. 15, le Prince télégraphie :

Attends Klapka avec impatience.

Nous venons d’avoir conférence militaire chez l’Empereur-On doit vous avoir écrit officiellement par La Tour d’Auvergne pour vous demander certains renseignements militaires, mais je vous prie de m’écrire, sans perdre une seule minute, et de me répondre aux questions suivantes.

(C’est, je crois, le général La Marmora qui, seul, pourra le faire.)

1o Qui commande votre armée ?

2o Où est le Quartier général ?

3o Où est la personne du commandant en chef ?

4o Donnez-moi emplacement exact et détaillé de vos troupes.

5o Que comptez-vous faire jusqu’à l’arrivée des Français ?

6o Indiquez-moi votre plan général de défense dans le cas où nous pourrions arriver à temps en ligne, ce que je crois impossible.

7° Comment tiendrez-vous tête à première attaque, des Autrichiens si nombreux, réduits à vos propres forces ?

8° Que savez-vous de la marche des Français, venant par les Alpes ?

J’attends réponse à ces questions avec grande impatience.


Cavour répond aussitôt (25 avril) :

Le quartier général est à Turin ; le Roi commandera l’armée, mais le général La Marmora sera toujours à ses côtés. Nous comptons couvrir Turin en défendant la ligne de la Doire à la vallée de la Scrivia au moyen du général Jean Durando, Alexandrie et Casale avec 30 000 hommes. Si deux divisions françaises arrivent sur la Doire et deux dans la Scrivia, nous sommes certains de tenir. Indispensable que les divisions viennent se former à Turin.

Les Français sont arrivés à Modane ; si demain commence passage du Mont Genèvre, ils arriveront certainement à temps. Marquis de Villamarina demandera dix mille havresacs ; veuillez appuyer sa demande. ;


Cavour ajoute, le 27 :

Le général Frossard, revenu hier de la Doire, trouve la ligne admirable ; en la défendant, on défend Turin et la vallée de ...

Le Roi, décidé à faire des efforts désespérés pour empêcher les Autrichiens de la forcer ; il est sûr de réussir pour peu que les Français nous aident.

Supplie Empereur de permettre que les divisions se forment à Turin ; l’effet moral de cette mesure double nos moyens de défense.


A quatre heures du soir, le prince Napoléon transmet cette réponse de l’Empereur :

Empereur m’a fait attendre réponse jusqu’à présent. Il m’écrit :

« Réponds au. comte Cavour que le maréchal Canrobert a l’ordre de faire tout ce qu’il pourra raisonnablement faire pour venir au secours de Turin. »

Vous voyez que cela n’est pas bien positif, et qu’en somme Canrobert est libre d’agir comme il le croira.

Notre armée est loin d’être prête. Avant de pouvoir agir vigoureusement, il nous faudra trois semaines. L’inertie et le mauvais vouloir des ministres portent leurs fruits.

Ne vous faites pas d’illusion sur le temps qu’il faut à l’armée française : que le Roi et La Marmora le sachent.

Ecrivez-moi, aussi souvent que possible, moindre mouvement des Autrichiens. J’attends de vos nouvelles au moins trois fois par jour, autant que possible en chiffres.

L’opinion publique en France est excellente, l’armée admirable d’entrain. Politiquement, cela va très bien, sauf le changement de ministère que je ne puis obtenir, mais, militairement, je crains échec pour vous au premier moment.


Cavour répond par des nouvelles des révolutions provoquées par ses agents, et fait part de ses craintes au sujet d’une tentative de médiation des Anglais.

Les Autrichiens ne sont pas entrés aujourd’hui ; ce retard, inexplicable par des motifs militaires, est probablement le résultat d’intrigues de l’Angleterre. Supplie Empereur de ne pas s’y laisser prendre. Enthousiasme est ici à son comble. Dans la Toscane et à Massa-Carrara, nouvelle de l’arrivée des Français a produit la plus grande agitation qui a suffi, sans le moindre désordre, à déterminer la fuite du Grand-Duc et la retraite des Modénais. A Florence, comme à Massa, on veut proclamer Roi de Sardaigne. J’ai insisté pour qu’on nommât des gouvernements provisoires et une espèce de dictature militaire que l’on pourrait confier à Ulloa. Quel est l’avis de l’Empereur ?


Le Prince répond aussitôt, le 28, à deux heures dix du soir :

Inaction des Autrichiens provient de médiation des Anglais qui intriguent horriblement.

L’Empereur me charge de vous dire qu’il tâchera de répondre de façon à gagner quelques jours qui donnent temps à nos troupes d’arriver chez vous, et de façon à ce que l’Autriche ne puisse accepter. Quant aux préparatifs militaires, nous les continuons plus que jamais. Dans deux jours, toute la Garde aura quitté Paris. Ordre à Canrobert, etc., à Gênes, de se presser tant qu’ils peuvent.

La situation de la Toscane et des Duchés préoccupe beaucoup l’Empereur ; la conclusion de longs raisonnements que nous avons faits, est que vous agissiez énergiquement pour obtenir formation de Gouvernements provisoires nationaux d’hommes modérés, mais très fermes ; que ces nouveaux pouvoirs demandent, au nom de leurs peuples, intervention du Piémont, et à la France de venir les défendre contre les Autrichiens. S’ils insistent, cela nous donnera une apparence de droit, si nous voulons y envoyer des troupes. Il faudrait que cela fût fait immédiatement.

Votre projet d’envoyer général Ulloa, comme dictateur militaire, ne me paraît pas bon. Ce général peut y aller comme appelé par le Gouvernement provisoire, pour être chargé de commander les troupes, mais il faut que les Gouvernements provisoires soient composés d’hommes du pays et non d’étrangers.

Envoyez de suite les noms des hommes qui sont à la tête du mouvement dans la Toscane et les Duchés.


Cavour répond immédiatement le 28 :

Tout s’est passé parfaitement en Toscane ; le Gouvernement provisoire est formé de Peruzi, Malemluini et du major Tanzini, tous natifs de Toscane, hommes d’ordre et d’énergie.

La Toscane demande l’intervention du Piémont ; elle demandera aussi celle de la France. Nous n’acceptons pas dictature, mais accordons protection pour l’ordre public et la guerre. Ulloa n’aura aucune autorité hors du commandement des troupes. Comme il faudra les mettre en mouvement pour éviter qu’elles se démoralisent, nous pouvons avoir besoin d’une frégate, si l’on nous demande appui avec démonstration, maintien de tranquillité à Livourne. Il sera bon que vous ayez à Florence un ministre de confiance et d’énergie. Nous avons publié dans la Gazette officielle l’ultimatum de l’Autriche et notre réponse, en ajoutant que, depuis le 26, à cinq heures et demie, nous nous regardons comme en état de guerre avec l’Autriche.

Le maréchal Baraguey pas encore arrivé ; serait urgent, si l’on est attaqué demain, que les troupes françaises à Grenoble partent sans délai pour prendre position au débouché de la Scrivia [4].

Maréchal Canrobert et général Niel couchent à Suze ; seront demain matin à Turin. Nous n’avons aucune inquiétude pour la ligne de la Doire.

Reçu à l’instant avis que les Autrichiens se préparent à jeter un pont sur le Pô au-dessous de l’embouchure du Tessin.


Le 28, à 7 heures du soir, le Prince fait connaître :

Sors d’un grand Conseil réuni pour décider réponse à faire à une proposition de médiation, assez vague, de l’Angleterre.

Après longue discussion, l’Empereur s’est arrêté à ne pas accepter cette médiation, et à faire réponse évasive pour maintenir notre position intacte. On espère ainsi gagner cinq à six jours. Mon avis est que, dès que l’Angleterre va connaître notre refus, elle préviendra à Vienne par télégraphe, et que les Autrichiens passeront le Tessin demain matin. Prenez donc toutes vos mesures en conséquence. Aucun doute que les Autrichiens ne déclarent la guerre demain. C’est aussi l’avis de M. Walewski. Répondez-moi.


Cavour donne le 1er mai les nouvelles suivantes qui précisent l’entrée des Autrichiens sur le territoire du Piémont :

Les Autrichiens ont continué hier leur passage du Tessin sur plusieurs points ; ils ont occupé toute la ligne de Novare, Arona et le Pô. Le corps passé est sorti de Pavie et longe le Pô ; il est impossible d’en préciser le nombre. Notre armée se concentre entre Casale, Valence, Alexandrie ; le Roi part pour Valence ; urgent envoyer un administrateur supérieur pour organiser le service des vivres, pour éviter confusion. Le duc de Cambridge demande au Roi permission envoyer colonel Cadogan à son quartier général ; Cadogan est très Piémontais. Qu’en pense l’Empereur ?

Les avis de ce matin portent à croire que l’armée autrichienne se concentre le long du Pô, au-dessous de Valence ; probable tenteront passer le fleuve au-dessous du confluent du Tanaro. S’ils exécutent ce passage, ils pourront se porter avec rapidité à Novi où il n’y a pas encore de Français ; il serait indispensable que le maréchal Baraguey se mit en mesure de défendre les fortes positions qui assurent les débouchés de la Scrivia.


Le 2, le Prince lui répond :

L’Empereur ne voit pas d’inconvénient à ce que le Roi permette au Colonel anglais de suivre campagne à son quartier général. Ménageons opinion anglaise. Discours de Palmerston bon.

On a écrit à Baraguey d’Hilliers pour défendre la Scrivia. Je redoute beaucoup absence de commandement général dans ces jours-ci.

M’apprête à partir dès que les troupes de mon corps d’armée seront prêtes, ce qui est bien long.

Empereur ne peut partir que quand son armée pourra entrer sérieusement en campagne. Peut-être aurez-vous engagement avant. D’ici là, il faut une stricte défensive.

Vu Klapka. Nous ferons tout ce qui dépend de nous de ce côté.

Avons décidé :

1° Proclamation aux Hongrois.

2° Organisation d’un comité hongrois directeur.

Espère pouvoir s’entendre avec Kossuth, dont le nom serait une force ; le saurai demain.

Respects au Roi. — Ecrivez-moi le plus souvent possible.


Le 3, alors que la France répond à l’invasion du Piémont par une déclaration de guerre, Cavour télégraphie :

Veuillez remercier l’Empereur de l’ordre donné au maréchal Baraguey. S’il pouvait, avec les nouvelles forces qu’il reçoit chaque jour, occuper la forte position de Tortone, cela améliorerait singulièrement notre position. Veuillez bien le demander à l’Empereur.

L’ennemi a disposé son armée le long du Pô, de Casale à Valence ; on croit qu’il tentera de passer le Pô à Frassineto pour diviser notre armée.

Troupes françaises accueillies partout avec enthousiasme ; au milieu de la plus grande animation, elles tiennent conduite excellente.

Population et troupes de Parme ayant manifesté sympathie pour la cause nationale, la duchesse de Parme est partie.


Le 5, les nouvelles militaires se précisent ; Cavour télégraphie :

Les Autrichiens semblent avoir renoncé au projet de passer le Pô entre Casale et l’embouchure de la Scrivia. Un corps peu nombreux, sorti de Pavie, s’est avancé jusqu’à Tortone, et a fait sauter les ponts sur la Scrivia, de la route ordinaire et du chemin de fer. D’un autre côté, ils se fortifient à Verceil. Ces mesures indiquent projet de marcher sur Turin. Les armées alliées, comptant aujourd’hui 180 000 hommes, ne peuvent assister, arme au bras, à la prise de notre capitale. Ce serait déplorable. Veuillez bien prier l’Empereur de permettre que ses généraux manœuvrent demain de manière à avoir l’air de menacer les derrières de l’ennemi.


Le 6, continuation de nouvelles.

Les Autrichiens marchent vers la Doire en plusieurs colonnes, une paraît se diriger sur Yvrée. Nous n’avons à leur opposer que de la cavalerie. Turin se trouve ainsi exposé à être occupé par un corps de troupes peu nombreux. Avec la garde nationale et les volontaires, nous résisterions à sept ou huit mille hommes ; au delà, impossible. Turin serait sauvé si le Roi pouvait faire une sortie de Casale et attaquer la longue colonne des Autrichiens, mais, pour cela, il faudrait que le maréchal Canrobert occupe Valence et San Salvator, et que le maréchal Baraguey envoie une partie.de ses troupes à Alexandrie. L’ennemi ne menaçant plus la Scrivia ni Alexandrie, ce mouvement ne présente aucun inconvénient.


Le 6, à 10 heures et demie du matin, le Prince répond :

Reçu votre dépêche d’hier soir.

Ce matin, envoyé votre dépêche à l’Empereur qui a mis en marge la réponse suivante :

« Réponds : — l’Empereur part lundi 9, les Maréchaux prendront l’offensive quand ils pourront le faire avec sécurité. Turin ne court, je crois, aucun risque. »

Je partirai avec l’Empereur.

Répondez-moi tout de suite, et tenez-moi au courant. Les ministres de la Guerre et de l’Intérieur sont remplacés par le maréchal Randon et le duc de Padoue [5] .


Le 7, Cavour télégraphie :

Les détachements que les Autrichiens avaient poussés jusqu’à la Doire n’ayant pas réussi à détourner les eaux qui inondent la plaine de Vercelli, les colonnes sorties de Vercelli, environ 10 000 hommes, sous un général de division, se sont dirigées vers Gatinaro, pour tourner le pays inondé, et regagner route de Turin. D’autres troupes, venant de la gauche de la Sésia, les ont remplacées à, Vercelli.

Les Autrichiens ont abandonné province de Tortone et de Voghera en repassant le Pô à Gerola.


En réponse à la dépêche de Cavour du 6, le Prince télégraphie le 7 à dix heures du matin :

L’Empereur vous fait dire qu’il ne peut diriger de Paris l’armée par télégraphe ; qu’il a donné instructions très larges à ses maréchaux, de façon à agir pour le mieux avec le Roi. C’est donc avec eux qu’il faut vous entendre.

J’ajoute personnellement que je ne me rends pas compte de ce que nos armées font. Il y avait deux partis : 1° défendre Turin, en renforçant la position de la Doire et attendre ; 2° se retirer derrière Casale et Alexandrie, et abandonner Turin complètement, en évacuant cette ville ; — tout (sic). Mais croire que les Autrichiens ne tenteraient pas coup sur Turin, s’il n’était pas fortement défendu, me paraît inadmissible. Je suis donc très inquiet pour cette ville et pour vous. Si Autrichiens doivent entrer à Turin, mieux vaut pas de défense, que défense peu sérieuse.

Empereur et moi, partons mardi soir, 10.

Avons arrangé affaire de Hongrie. Comité va être installé à Gênes.


La France a déclaré la guerre à l’Autriche le 3 mai. L’Empereur, accompagné du prince Napoléon, quitte Paris le 10 au milieu de l’enthousiasme de la nation. Il est le 12 à Gênes. Le premier combat, à Montebello, a lieu le 20.

  1. Voyez la Revue du 1er janvier.
  2. Les télégrammes de Cavour sont donnés ici d’après les originaux, déchiffrés par le Prince lui-même.
  3. Ville de l’État ecclésiastique, à 22 kilomètres d’Urbino.
  4. Probablement une erreur ; ce doit être Gênes. (Note du Prince.)
  5. M. Delangle prenait aussi les Sceaux.