L’Insulaire (fragment) (O. C. Élisa Mercœur)
Il fut plus loin que tous ; il fut loin comme un rêve. |
Élisa Mercœur. |
Qu’importe !… à l’univers appartient sa mémoire !
Je dois, comme poète, un tribut à sa gloire:
Libre à moi de chanter lorsqu’il dort sur l’écueil.
Doit-on, s’il est sans glaive, insulter au courage ?
La mort l’a consacré ; la haine est un outrage
À la majesté du cercueil !
Quand, despote du sort et géant de puissance,
Aux jeux des nations il apportait la France,
Je n’eusse pas vendu mes accens au vainqueur ;
Mais pour ce que je sens, je veux garder mon âme ;
On ne me verra pas en comprimant sa flamme,
Faire un esclave de mon cœur.
Il unit en faisceau vingt sceptres et son glaive ;
Il fut plus loin que tous, il fut loin comme un rêve !…
Qui donc l’expliquera, l’être mystérieux ?
Faut-il qu’on le blasphème, ou faut-il qu’on l’adore ?
Tout marqué de ses pas l’univers doute encore
S’il vint de l’enfer ou des cieux…
Des cieux ! lorsque lui seul manquait à l’équilibre,
Quand un peuple insensé, fatigué d’être libre,
Comme un coursier dompté, reprit le frein des lois.
Mais il vint de l’enfer ! alors qu’au rang suprême,
Il fit, en s’asseyant, paré du diadème,
Son marche-pied du front des rois !
Alors que, s’immolant une jeune victime,
Il fit pâlir sa gloire, et l’entacha d’un crime ;
Ou qu’impuissant rival d’un éternel hiver,
Les donnant à la mort comme un présent d’esclaves,
Aux fêtes du Kremlin, il conduisait ses braves ;
Il venait encor de l’enfer !
Mais .............
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