E. Sansot et Cie (p. 16-17).
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NUIT


Le lac semble le cœur de la félicité,
Il déborde, si plein, dans le vent argenté…

Mon âme fait le chant de l’onde qui s’épanche…
Comme un bouquet trop doux se meurt ma robe blanche.

Je rêve de pleurer près d’un visage en pleurs,
J’évoque du silence et des morceaux de fleurs…

Oh ! désirer l’amour, être pure, voilée,
Être vierge au milieu des lis de la vallée !…

Sœurs chères, adorons cette adorable nuit
Où d’un souffle d’espoir, à peine, est fait le bruit,
Où la brise est un fruit qui se fond sur ma bouche,
Où l’herbe, sous son poids de bonne odeur, se couche…

Où l’infini, là-haut, sait qu’il est l’infini…


Nuit de suavité, mon cœur à toi s’unit
Par un songe, à la fois, splendide et taciturne,
Ta transparence, ô nuit, a la forme d’une urne…

Quand pourrai-je enlacer l’unique bien-aimé,
Et baiser, en tremblant, son manteau parfumé,
Et voir, en écartant la blancheur de mes voiles,
Que notre double rêve a doublé les étoiles ?…