L’Homme à la longue barbe/15. Un Membre du Bureau Central

◄  Italie
Fabvier  ►



CHAPITRE XV.

Un Membre du Bureau Central.


Duclos donnait un soir le bras à sa maîtresse, qu’il menait voir, au grand théâtre, l’opéra de la Reine de Golconde. En arrivant sur la place de la comédie, il aperçoit un groupe de royalistes tenant à la gorge et étranglant un nommé Solignac, ex-membre du bureau central, qui, le 20 thermidor, avait commandé le feu sur le peuple à la même place où il se trouvait. À cette vue, le Superbe quitte brusquement le bras de sa maîtresse et vole au secours de la victime.

Son apparition produisit sur ces forcenés l’effet de la tête de Méduse.

« Lâches ! leur cria-t-il, laissez aller cet homme, ou je vous extermine ! — Mais il a tué mon frère ! — Il a tué mon père ! — Il a tué mes enfans ! — Eh bien ! lâches que vous êtes, battez-vous l’un après l’autre avec lui, et ne soyez pas douze à l’assassiner ! » Et un signe de sa main leur fit aussitôt lâcher prise. S’emparant alors du bras de l’ex-membre du bureau central : « Ne craignez rien, lui dit-il, c’est moi qui vous ramène chez vous. »

Dès que Solignac se vit en sûreté, il se précipita aux pieds de Duclos, qu’il appela son Dieu, son sauveur ; lui offrit de l’or, des services, tout ce qu’il demanderait. « Rien ! rien de vous ! lui dit le Superbe pas même votre amitié ; je n’en veux pas !… »

Quelques jours après Duclos était à Paris.