L’Encyclopédie/1re édition/ZERUMBETH

◄  ZERUIS
ZERYTHUS  ►

ZERUMBETH, s. m. (Botan. exot.) racine étrangere très-rare & très-peu connue ; voici le précis de ce qu’en dit M. Geoffroi.

C’est une racine tubéreuse, genouillée, inégale, grosse comme le pouce, & quelquefois comme le bras, un peu applatie, blanchâtre ou jaunâtre, d’un goût âcre, un peu amer, aromatique, approchant du gingembre, d’une odeur agréable : on la trouve rarement dans les boutiques de droguistes ou d’apothicaires.

La plante s’appelle zerumbeth. Garz. Zinziber latifolium sylvestre, Herm. Cat. Hort. Lugd. Bat. 636. 386. Kna. Hort. Malab. 11. 13. sab. 7. Walinghuru, sive zingiber sylvestre zeylanensibus, H. Lugd. Bat. Paco-Ceroca, Brasiliensibus, Pison & Marcgr. Zinziber sylvestre majus, fructu in pediculo singulari. Hans Sloane.

Cette plante est fort curieuse, & nous en devons la description au p. Plumier dans sa botanique manuscrite d’Amérique.

La racine de zérumbeth, dit-il, est entierement semblable à celle du roseau ; mais d’une substance tendre & rougeâtre, garnie de petites fibres ; elle pousse une tige haute d’environ cinq piés, épaisse d’un pouce, cylindrique, formée par les queues des feuilles qui s’embrassent alternativement.

Les feuilles sont au nombre de neuf ou de dix, disposées à droite & à gauche, membraneuses, de la même figure, de la même grandeur & de la même consistance que celles du balisier ordinaire, rougeâtres & ondées sur leurs bords, d’un verd clair en-dessus, & d’un verd foncé & luisant en-dessous.

De la même racine, & tout près de cette tige, sortent d’autres petites tiges de couleur écarlate, hautes d’environ un pié & demi, épaisses de quatre pouces, & couvertes de petites feuilles étroites & pointues.

Des aisselles de feuilles naissent des fleurs d’un beau rouge qui sont rangées comme en épi ou en pyramide, & composées de trois tuyaux posés l’un sur l’autre. Ces tuyaux sont partagés en deux parties à leur extrèmité. Le calice, qui porte un pistil alongé, menu, blanc, rouge à son extrémité, devient un fruit ovalaire, de la grosseur d’une prune, charnu, creux en maniere de nombril, rouge en dehors, & rempli d’un suc de même couleur ; il s’ouvre par le haut en trois parties, & contient plusieurs semences, rousses, dures, nichées dans une pulpe filamenteuse.

Cette plante se plaît dans les forêts humides, & le long des ruisseaux ; elle vient en abondance dans l’île de S. Vincent ; son fruit est un aliment agréable aux bœufs & aux autres bêtes de charge. On tire du suc de ce fruit, un beau violet, qui appliqué sur les toiles de lin ou sur la soie, est ineffaçable.

Parmi les preuves qui font voir que la racine de cet aromate contient beaucoup de sel volatil, huileux, aromatique, la distillation en est une principale ; car elle donne dans l’alembic une eau odorante avec assez d’huile, dans laquelle, si la distillation est récente, il nage un peu de sel volatil sous la forme de neige ou de camphre ; ce sel dissous dans l’esprit de vin, & mêlé comme il convient avec des confitures, des électuaires & autres choses semblables, est utile dans les crudités acides, les vents & les douleurs d’estomac. Le suc nouvellement exprimé de la racine, produit le même effet, mais avec une douce dégection du ventre.

La racine seche & réduite en farine, perd beaucoup de son âcreté ; c’est pourquoi on en fait du pain dont les Indiens se nourrissent dans la disette. Le mucilage, qui est attaché dans les interstices de la tête qui est écailleuse, se ressent un peu de la vertu de cet aromate. Les qualités médecinales de la racine, paroissent fort analogues à la zédoaire & au gingembre. Herman prétend que notre zérumbeth est le même que celui des Arabes, mais il faut 1°. convenir que presque toutes leurs descriptions des drogues sont si imparfaites, qu’on n’en peut juger que par conjecture ; 2°. qu’en particulier les descriptions qu’ils nous ont données de leur zérumbeth, ne s’accordent point avec celle qu’on vient de lire. (D. J.)