L’Encyclopédie/1re édition/XANTHE

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XANTHE, s. m. (Mythol.) les poëtes ne parlent point comme l’histoire. Chez eux rien ne s’opere que merveilleusement.

Un orage terrible aux yeux des matelots,
C’est Neptune en courroux qui gourmande les flots.

Après le sanglant combat qui fut donné sur les rives du Xanthe, le lit de ce fleuve se trouva chargé de corps morts, son eau se déborda dans la campagne, on retira de l’eau les cadavres, on les brûla sur un bucher. Comment Homere raconte-t-il ce fait ? Il feint, Iliad. l. XXI. que ce fleuve oppressé dans son lit, en fit ses plaintes à Achille, & que ce héros ne l’ayant pas satisfait, il se déborda contre lui, & le poursuivant avec rapidité, il l’auroit noyé, si Neptune & Minerve envoyés par Jupiter, ne lui eussent promis une prompte satisfaction. Le même poëte ayant à nous apprendre que les inondations de la mer ruinerent, quelque tems après la retraite des Grecs, cette fameuse muraille, qu’ils avoient élevée pendant le siege de Troie, pour se mettre à couvert des insultes de leurs ennemis, dit que Neptune irrité de l’entreprise des Grecs, étoit allé prier Jupiter de lui permettre de l’abattre avec son trident ; & qu’ayant intéressé Apollon dans sa vengeance, ils avoient travaillé de concert à renverser cet ouvrage. Si Turnus brûle la flotte d’Enée, Virgile fait paroître Cybele, qui change ses vaisseaux en nymphes de la mer. (D. J.)

Xanthe, Xantus, (Géog. anc.) fameuse riviere de la Troade, dans l’Asie mineure. Elle a sa source au mont Ida, & se perd dans l’Hellespont. Pline, l. V. c. xxx. dit qu’elle se joint avec le Simoïs, autre riviere célebre dans les poëmes d’Homere & de Virgile ; ces deux rivieres vont ensemble au port des Achéens.

Bien des auteurs croyent que le Xanthe & le Scamandre ne sont qu’une seule riviere, fondés sur ces vers d’Homere, Iliad. v. 74.

Les dieux l’appellent Xanthe, & les hommes Scamandre.

Elien dans son histoire des animaux, l. VIII. c. xxj. donne une origine assez naturelle de ce double nom. Il dit que le Scamandre a la vertu, que les brebis qui boivent de-son eau, deviennent rousses, ξανθας : de-là, ajoute-il, cette riviere a pris le nom de Xanthe, tiré de la couleur qu’elle donne aux brebis.

2°. Xanthe, riviere de l’Asie mineure, dans la Lycie ; elle a sa source dans le mont Taurus, arrose les villes de Xanthe & de Patare, & se jette ensuite dans la mer Méditerranée. Ptolomée, l. V. c. iij. en met l’embouchure après Telmesse, auprès de Patare. Strabon assure, l. XIV. p. 665. qu’on l’appelloit anciennement Sirbes. Il dit qu’en le remontant dix stades, on trouvoit le temple de Latone, & que soixante stades plus haut que ce temple, étoit la ville qu’il nomme Xanthe. Ovide, métamorph. l. IX. v. 645. dit cette riviere :

Jam Cragon, & Lymiren Xanthique reliquerat undas.

3°. Xanthe ou Xanthopolis, ancienne ville de l’Asie mineure, dans la Lycie. Strabon, l. XIV. p. 666. dit que c’étoit la plus grande ville de cette province. On a vu dans l’article précédent qu’elle étoit à 70 stades de son embouchure, selon cet auteur. Pline, l. V. c. xxvij. l’en met à 15 mille pas ; c’est 6 mille pas de plus que le calcul de Strabon. Ptolomée, l. V. c. iij. la nomme dans sa liste de villes méditerranées. Appien raconte comment les habitans de Xanthe, amoureux de leur liberté, voyant leur ville prise par Brutus, l’un des meurtriers de César, se donnerent eux-mêmes la mort, & brûlerent leur ville, plutôt que de se soumettre au vainqueur. Il remarque que c’étoit pour la troisieme fois que cette ville éprouvoit un pareil destin ; que la même chose étoit arrivée lorsque Harpale, général du grand Cyrus, avoit assiégé la ville de Xanthe, & lorsqu’Alexandre, fils de Philippe avoit cru s’en rendre maître.

Cette ville se releva dans la suite ; car outre que Strabon & Pline, postérieurs au tems de Brutus, en parlent comme d’une ville subsistante, je la trouve au rang des villes épiscopales de la Lycie, sous le nom de Xanthi, qui est le génitif de son nom, dans la notice de Léon le sage. Mais elle est nommée Ξανθος, Xanthus dans celle d’Hiéroclès ; elle est du Mentasili, dans la Natolie, sur la côte méridionale.

4°. Xante, riviere d’Epire. Helenus, qui s’étoit établi dans ce pays là, après le sac de Troie, avoit donné le nom de Xanthe à un petit ruisseau. C’est ce que Virgile, Æneid. l. III. v. 350. exprime par ce vers :

Arentem Xanthi cognomine rivum Agnosco.

5°. Xanthe, ville ancienne de l’île de Lesbos, selon Etienne le géographe.

C’est de Xanthe, ville de Lycie, qu’étoit Olen, poëte grec, plus ancien qu’Orphée. Il composa plusieurs hymnes, que l’on chantoit dans l’île de Délos aux grandes solemnités de la religion, nommément en l’honneur de la déesse Lucine, qu’il disoit être la mere de Cupidon. Quelques auteurs prétendent qu’il fut l’un des hyperboréens qui fonderent l’oracle de Delphes, & qu’il y exerça le premier la fonction de prêtre d’Apollon, je veux dire, celle de rendre réponse aux consultans en vers hexametres.

Ménécrate étoit de la même ville. Il avoit fait l’histoire de la Lycie, celle de Nicée, & celle d’Hercule. Il ne faut pas le confondre avec Ménécrate d’Elée, qui avoit décrit l’Hellespont, & les pays qui le bordent. C’est une perte considérable que celle de cet ouvrage, au-lieu que les œuvres de Ménécrate de Lycie, n’étoient pas de la premiere réputation. (D. J.)