L’Encyclopédie/1re édition/VITERBE

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VITERBE, (Géog. mod.) en latin Viterbo, ville d’Italie, dans l’état de l’Eglise, capitale du patrimoine de saint Pierre, à 30 milles au nord de la mer, & à 40 milles au couchant de Rome, au pié d’une haute montagne, que les Latins appelloient Ciminius mons.

Quoique Viterbe se vante d’être plus ancienne que Rome, c’est une ville moderne bâtie par Didier, dernier roi des Lombards, qui regna depuis 763 jusqu’en 774. Il la forma de quatre bourgs ou villages, & l’environna de murs ; cette quadruple union fut d’abord appellée Tetrapolis, ensuite Vicercinium, & enfin Viterbum. Ainsi Cluvier s’est étrangement trompé quand il a imaginé que cette ville pourroit être le fanum Voltumnæ de Tite-Live.

Viterbe est grande, les rues sont larges, bien pavées, & chargées d’églises, de chapelles, de couvens, & de monasteres. On y compte à peine douze mille ames, & la ville en contiendroit trois fois davantage par son étendue.

Elle est partagée en seize paroisses, y compris la cathédrale, où l’on voit dans le goût gothique les tombeaux de Jean XXII. & d’Alexandre IV. Les fontaines publiques y sont en grand nombre, & soigneusement entretenues. L’évêché n’a été établi qu’à la fin du douzieme siecle, & se donne aujourd’hui à un cardinal.

Les environs de Vitarbe sont admirables par leur fertilité en vin, en toutes sortes de grains & de légumes, en fruit de toute espece, en mûriers & en oliviers ; tout le territoire est arrosé de petites rivieres poissonneuses, ensorte qu’il ne manque rien à ce pays de ce qui sert à la vie & à la délicatesse.

On trouve au sud-ouest, environ à un mille de Viterbe, des eaux chaudes qu’on nommoit autrefois aquæ caiæ ; ces eaux sont si chaudes qu’elles cuisent en un moment les œufs, les fruits, & les légumes qu’on y plonge. A la distance de deux milles de la ville de Viterbe est le couvent de la Quercia, habité par une riche communauté de plus de soixante religieux. Le pendant de ce couvent est celui de Notre-Dame de Grade, qui appartient aux dominicains. Long. de Viterbe 29. 40. lat. 42. 21.

Les curieux peuvent consulter sur cette ville Bassi Feliciano, historia della cita di Viterbo. Romæ 1742, in-fol. fig.

Nannius (Jean) fameux jacobin, s’appelle ordinairement Annius de Viterbe, parce qu’il naquit en cette ville en 1432. Il a beaucoup fait parler de lui par l’édition de quelques auteurs fort anciens, dont les écrits passoient pour perdus. L’ouvrage d’Annius de Viterbe parut à Rome pour la premiere fois en 1498, & contient dix-sept livres d’antiquités ; mais on découvrit bien-tôt que le bon jacobin avoit publié pour vraies des pieces supposées. Onuphre Panvini, Goropius Becanus, Jean-Baptiste Agucchi, Volaterranus, & autres auteurs l’ont démontré. Il mourut à Rome l’an 1502, âgé de 70 ans.

Latinus Latinius a imité l’exemple de son compatriote Annius, & il est en cela d’autant plus-coupable qu’il n’a pas péché par ignorance, & qu’au contraire il avoit beaucoup d’érudition, comme il paroît par les ouvrages qu’il a mis au jour, & entre autres par sa bibliotheca sacra & prophana, publiée à Rome pour la seconde fois en 1667, in fol. Il supprima tant qu’il lui fut possible tout ce qui n’étoît pas conforme à ses opinions, & c’est ce qui se prouve par le retranchement qu’il a fait de l’épître de Firmilien de Césarée dans l’édition des œuvres de saint Cyprien qu’a donnée Manuce. On l’aggrégea au nombre des savans qui travaillerent à la correction du decret de Gratien, & il employa plusieurs années de suite à ce grand ouvrage. Il mourut en 1593, âgé de 80 ans. (Le chevalier de Jaucourt.)