L’Encyclopédie/1re édition/VIATIQUE
VIATIQUE, s. m. (Hist. anc.) c’étoit chez les Romains non-seulement la somme ou les appointemens que la république donnoit aux magistrats qu’elle envoyoit dans les provinces pour subvenir aux frais de leur voyage ; mais encore on donnoit ce nom aux habits, esclaves, meubles que l’état leur fournissoit pour paroître avec dignité. Du tems d’Auguste on convertit le tout en une somme d’argent, sur laquelle les magistrats étoient eux-mêmes obligés de pourvoir à toute la dépense. Tacite en fait mention dans le premier livre des annales, chap. xxxvij. viaticum amicorum ipsiusque Cæsaris. Il parle là des appointemens qu’on accorda à Germanicus & aux officiers de sa suite ; mais on n’a point de détail précis sur les sommes auxquelles se montoient ces appointemens, on présume qu’elles étoient réglées sur le rang & la dignité des personnes : on donnoit aussi le même nom à la paye des officiers & soldats qui étoient à l’armée.
Parmi les religieux on appelle encore viatique la somme que la regle de l’ordre accorde à chacun d’eux lorsqu’ils sont en voyage, ou qu’ils vont en mission. Voyez Mission.
Quelques-uns ont encore nommé viatique le denier, piece d’or, d’argent, ou de cuivre, que les anciens avoient coutume de mettre dans la bouche des morts, pour payer le passage à Charon.
Viatique, s. m. (Hist. ecclés.) sacrement qu’on administre aux mourans, pour les disposer au passage de cette vie à l’autre. Les peres & les conciles ont donné ce nom à trois sacremens que l’on donnoit aux mourans pour assurer leur salut : savoir le baptême, l’eucharistie, & la pénitence. Le baptême à l’égard des cathecumenes ; S. Gregoire, S. Basile, Balsamon, & les autres auteurs grecs, l’appellent en ce sens ἐφόδιον, c’est-à-dire viatique. L’eucharistie pour les fideles qui étoient dans la communion de l’église, & souvent à l’égard des pénitens qui avoient reçu l’absolution. La pénitence ou absolution, à l’égard de ceux qu’on réconcilioit à l’article de la mort. Aujourd’hui le nom de viatique ne se prend plus que dans le second sens, c’est-à-dire pour l’eucharistie administrée à ceux qui sont en danger de mort. On ne l’accorde point en France aux criminels condamnés & conduits au supplice pour leurs crimes.