L’Encyclopédie/1re édition/USTRINUM

USTRINUM, (Littérat.) c’étoit, selon Servius, une place de bucher, sur lequel on brûloit les corps. Cette place chez les Romains, étoit celle où l’on recueilloit les cendres du mort ; & pour cette raison, elle répondoit à la situation du cadavre, posé sur le haut du bucher.

Festus pense que c’étoit un vase destiné dans le brulement des corps pour en recevoir les cendres. Son sentiment paroît d’autant plus vraissemblable, que dans deux inscriptions antiques, rapportées par Meursius, il est fait mention de cet ustrinum, comme d’une pierre portative, que quelques lois funéraires ou les testamens, défendoient d’être employée à la construction du tombeau de ceux, sur le bucher desquels elle auroit servi. Voici ces deux inscriptions. Premiere inscription ; Huic monumento, ustrinum Applicari Non Licet ; seconde inscription, Ad Hoc Monumentum, ustrinum Applicari Non Licet.

On peut concevoir de-là, que c’étoit une pierre de foyer un peu creusée, pour recevoir les cendres qui tomboient du cadavre, tandis qu’il se consumoit ; cette pierre au moyen de ses bords, pouvoit garantir les cendres d’être dissipées par le vent.

Les bois qui composoient le bucher, étoient éloignés d’un ou deux piés de cette pierre dans toute sa circonférence, & disposés en symmétrie, pour former un quarré plus long que large, autour duquel étoient rangés des cyprès, pour servir de préservatifs contre la mauvaise odeur du cadavre brûlant.

Des gardes du bucher, gens d’une condition servile, appellés ustores & ustuarii, avoient l’œil à ce qu’aucune branche de cyprès ne fût jettée par le vent sur le corps, de crainte du mélange des cendres ; & avec des fourches ils repoussoient les buches qui s’écartoient de leur situation, pour qu’elles ne tombassent point dans le milieu du foyer. Servius n’est pas le seul qui nous ait appris l’usage de ces précautions ; Homere les fait remarquer, en décrivant la situation du corps de Patrocle sur son bucher.

Après la consommation de cet assemblage de bois, des prêtres avoient soin de se porter sur le foyer pour y distinguer les restes du corps, & les mettre dans un vase, qui, selon que la quantité des cendres ou des ossemens consumés, dominoit, prenoit le nom de cinerarium ou celui d’ossuarium.

La cérémonie du choix de ces restes, exprimée par les termes de reliquias legere, étoit un devoir si essentiel à la religion, que plus les morts avoient été qualifiés, plus cette cérémonie s’observoit scrupuleusement.

Suétone nous apprend, que ce fut de la maniere qu’on vient de décrire, que se fit le choix des restes du corps d’Auguste. Eutrope rapporte la même chose à l’égard de celui de Trajan, dont les os brûlés furent mis dans une urne d’or, placée sous sa colonne, & ceux de Septime Sévere, selon Xiphilin, furent recueillis dans un vase de porphyre. (D. J.)