L’Encyclopédie/1re édition/TURLOTTE

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TURLOTTE, s. f. (Pêche.) est le nom que l’on donne à une sorte de pêche, qui est la même que la pêche à la ligne. Pour faire cette pêche, il est essentiel de savoir la maniere d’enfiler l’hameçon dont on veut se servir, & d’attacher l’amorce. Pour cela, il faut avoir un hameçon & un bout de fil-d’archal jaune, de la grosseur d’une fine épingle, qu’on plie en deux, & qu’on tortille de maniere qu’il fasse un petit chaînon, au bout duquel on laissera un petit anneau. A l’égard des deux bouts du fil d’archal qui resteront du chaînon, on doit les attacher à la queue de l’hameçon avec de la soie ou du fil, en sorte que ce qui sera attaché ne descende pas plus bas que l’endroit vis-à-vis le crochet de l’hameçon. Cela fait, il faut faire un cornet d’un gros carton, ou si l’on veut de terre à potier, dont le dedans ne soit pas plus large que la grosseur d’un tuyau d’une grosse plume à écrire, & de la longueur environ d’un petit doigt ; ensuite passer à-travers du cornet l’hameçon attaché au fil d’archal, puis faire en sorte que toute la queue de l’hameçon depuis l’endroit vis-à-vis le crochet, & environ la longueur d’un travers de doigt du chaînon, soit cachée dans le cornet, & emplir ledit cornet de plomb fondu, en tenant l’hameçon par le bout du chaînon, afin que ce qui doit être enchassé se trouve dans le milieu, & enveloppé également par-tout, après quoi on arrondit les deux extrémités du plomb. L’hameçon ainsi accommodé, il faut avoir un fer de la longueur de quatre pouces ou environ, qui soit fait de maniere qu’on puisse faire entrer dans la queue le bout d’un bâton de la longueur d’une canne, & qu’il y ait au bout un petit anneau par lequel il soit aisé de faire passer la ficelle, & la ligne sera faite. Pour pêcher on prend un petit poisson, on lui passe le chaînon dans la gueule & dans le corps, par l’anneau qui ressortira par l’endroit par lequel le poisson rend son excrément, & on fait en sorte que ce poisson avale tout ce qui est couvert de plomb ; ensuite on tourne la pointe de l’hameçon du côté de l’ouie, & on attache le poisson avec du fil en trois endroits, savoir au-dessus des ouies, au milieu du corps, & au-dessus de la queue. L’amorce ainsi disposée, on passe par l’anneau de fer le bout de la ficelle dont il faut avoir dix ou douze brasses entortillées autour d’un morceau de bois, & on attache cette ficelle à l’anneau du chaînon, ce qui acheve la ligne dont on doit se servir : en voici l’usage.

On tient de la main droite le bâton, & de la main gauche le paquet de ficelle qu’on détortille autant qu’il est nécessaire pour jetter dans la riviere l’amorce, qu’il faut laisser aller à fond, & la faire sautiller en secouant la ligne par sauts ; & lorsque le brochet donne sur l’amorce, on doit la lui laisser prendre & emporter, & lui fournir de la ficelle jusqu’à ce qu’il soit arrêté. Il faut lui donner le tems d’avaler le goujon, & ensuite le sonder doucement en retirant la ligne ; & si l’on sent de la résistance, c’est signe que le brochet n’a pas abandonné l’appât : alors on retire en donnant un petit saut à la ligne par le mouvement du bâton, pour enferrer le brochet que l’on ramene ensuite aisément à bord, en retirant la ligne peu-à-peu : cette façon de ligne est excellente pour pêcher le brochet.