L’Encyclopédie/1re édition/TREVES

TREVI  ►

TREVES, (Géog. mod.) ville d’Allemagne en deçà du Rhin, capitale de l’archevêché & électorat du même nom, au bord de la Moselle, qu’on y passe sur un pont, à dix lieues d’Allemagne au nord-est de Luxembourg, à treize au nord-est de Metz, & à dix-sept au sud de Mayence.

Quoiqu’elle ne soit plus si fameuse que lorsque cinq des principales villes situées sur le Rhin lui étoient soumises, elle tient pourtant encore son rang parmi les villes peuplées, à quoi la fertilité de son terroir, son vignoble & la Meuse qui y passe, contribuent beaucoup. Sa situation est au bord de la Moselle entre deux montagnes, & la petite riviere Olebia, en allemand Weberbach, passe au milieu de la ville. On y compte un grand nombre d’églises & plusieurs maisons religieuses. Long. 24. 15. latit. 49. 47.

Treves fut connue anciennement sous le nom de Trevirorum civitas, ou Treviti, du nom des peuples qui l’habitent. Après qu’Auguste l’eut érigée en métropole de la seconde Belgique, elle prit en son honneur le nom d’Augusta Trevirorum. Tacite fait beaucoup mention de cette ville. Ammien Marcellin l’appelle une seconde Rome, à cause de son autorité, de son pouvoir, de la magnificence de ses bâtimens à la romaine, & pour avoir été la plus grande ville en-deçà des Alpes. Quelques empereurs romains & ensuite quelques rois de France, y ont fait plusieurs fois leur séjour. On y voit encore des restes d’antiquité, entr’autres des piliers & des colonnes de son pont sur la Moselle, des vestiges d’anciennes tours & d’un amphithéatre ; mais les Huns, les Francs & les Normands ont détruit par leurs ravages ses autres monumens antiques.

On prétend que Salvien, prêtre de Marseille au cinquieme siecle, étoit originaire de Treves ; ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il mourut à Marseille dans un âge fort avancé. Il nous reste de lui deux traités qui sont écrits d’un style assez orné, l’un sur la providence de Dieu, & l’autre contre l’avarice. Les meilleures éditions des ouvrages de Salvien ont été données par M. Baluze à Paris, & par Conrad Ritterhusius à Nuremberg, en deux volumes in-8°.

Drusille (Julie), fille de Germanicus & d’Agrippine, naquit à Treves, & dégénera de l’exemple de ses pere & mere ; car sa vie fut très-scandaleuse. Elle épousa Lucius Cassius ; mais Caligula son frere l’enleva à ce mari, & vécut incestueusement avec elle comme avec sa femme légitime. Il l’aimoit déjà follement n’ayant pas encore la robe virile ; & quand elle fut morte l’an 791 de Rome, il fit des extravagances impies pour honorer sa mémoire. Il donna à ce sujet des decrets semblables à ceux que l’on avoit faits pour Livie femme d’Auguste, indépendamment de son decret public qui déclaroit Drusille au nombre des immortels.

On la mit en statue d’or dans le sénat : on lui éleva une autre statue dans le forum pareille à celle de Vénus, & sous les mêmes honneurs que l’on rendoit à cette déesse. On lui dédia un temple particulier : on ordonna que les hommes & les femmes lui consacreroient des images, que les femmes jureroient par son nom quand elles attesteroient quelque fait, & que son jour natal seroit destiné à des jeux tels que ceux de Cybele. Elle fut appellée la Panthéa, c’est à-dire, la toute-divine, & on lui rendit les honneurs divins dans tout l’empire. Caligula, dans les choses même de la derniere importance, ne juroit jamais ni au sénat ni à l’armée, que par la divinité de Drusille. Livius Geminus non content de déclarer qu’il l’avoit vu monter au ciel & converser avec les dieux, fit des imprécations contre lui-même & contre ses propres enfans, si ce qu’il disoit n’étoit pas véritable. Cette basse flatterie lui valut une grosse fortune ; les Romains se trouverent alors fort embarrassés ; car s’ils paroissoient tristes, on les accusoit de méconnoitre la divinité de Drusille ; s’ils paroissoient gais, on les accusoit de ne pas regretter sa mort. Enfin c’étoit un crime de pleurer Drusille, parce qu’elle étoit déesse, & de ne la pas pleurer, parce qu’elle étoit la sœur de Caligula. Voyez à ce sujet Dion, Suétone & Séneque. (D. J.)

Treves, archevêché de, (Géog. mod.) l’archevêché de Treves est un des électorats de l’empire. Il est borné par celui de Cologne au septentrion, par la Wetteravie à l’orient, par le palatinat du Rhin & par la Lorraine au midi, par le Luxembourg à l’occident.

Pepin, Charlemagne & Louis le débonnaire ayant enrichi considérablement l’église de Treves, ses archevêques commencerent sous le regne d’Othon II. vers l’an 976, à se gouverner en princes souverains ; & vers ce tems-là les chanoines las de vivre régulierement & en commun, partagerent les biens du chapitre en prébendes, & vécurent dans des maisons séparées. Ludophe de Saxe fut le premier électeur de Treves, suivant l’opinion de ceux qui attribuent l’institution du college électoral à Othon III. Les successeurs de Ludolphe aggrandirent insensiblement leur domaine par des acquisitions, des échanges, des donations, & des cessions que d’autres princes leur firent.

Le pays de l’archevêché de Treves est fertile, surtout en vins ; la Moselle le coupe en partie septentrionale & en partie méridionale ; la premiere est beaucoup plus agréable & mieux peuplée que la seconde, qui ne contient presque que des bois. Cet état est composé de vingt-cinq bailliages, dont celui de Treves capitale, fait le principal.

Les empereurs de la maison de Saxe soumirent la ville de Treves aux archevêques, & les empereurs de la maison de Franconie l’affranchirent de la domination de ces prélats qui s’y opposerent, & ne laisserent pas de reprendre quelquefois leur autorité, selon que les diverses factions de la ville leur étoient favorables. Enfin l’empereur Rodolphe dévoué à l’électeur Jaques d’Elz, déclara en 1580 la ville de Treves déchue de ses prétentions ; & depuis ce tems-là les électeurs en ont toujours été les maîtres.

L’électeur de Treves, comme archevêque, a pour suffragans les évêques de Metz, de Toul & de Verdun, & comme électeur, il prend la qualité d’archichancelier de l’empire pour les Gaules, mais cette dignité n’est qu’un titre imaginaire inventé par les Allemands pour marquer la prétendue dépendance du royaume d’Arles à l’égard de l’empire.

L’électeur de Treves donne le premier son suffrage à l’élection de l’empereur. Il a séance vis-à-vis de lui dans les assemblées, & il alterne pour la seconde place avec l’électeur de Cologne dans le college électoral. Il jouit de plusieurs privileges ; il peut réunir à son domaine les fiefs impériaux situés dans ses états, faute d’hommage rendu dans le tems porté par les constitutions impériales. Il peut user du même droit que l’empereur & l’empire à l’égard des fiefs qui relevent de lui, & qui se trouvent vacans faute d’hoirs mâles, à moins que les héritiers ne produisent un privilege qui déroge à ce droit ; il met au ban ceux qu’il a excommuniés, s’ils ne se réconcilient dans l’année ; & cette proscription a autant de force que si elle étoit faite par les électeurs de l’empire ; il a dans la ville de Treves la gardenoble de tous les mineurs ; on peut cependant appeller de sa justice à la chambre impériale, parce que l’électeur Charles Gaspar de la Leyen ne fit pas confirmer par l’empereur le droit qu’ont les électeurs d’empêcher qu’on ne puisse appeller de leur justice.

On peut lire sur tout ce qui concerne l’archevêché de Treves, un ouvrage imprimé à Augsbourg, & intitulé, historia trevirensis diplomatica & pragmatica. August. 1745, in-fol. trois vol. (D. J.)

Treves, (Géog. mod.) petite ville ou plutôt bourg de France, dans l’Anjou. Il s’y tient quatre foires par an. (D. J.)