L’Encyclopédie/1re édition/TOURNUS

◄  TOURNON
TOUROBIN  ►

TOURNUS, (Géog. mod.) petite ville de France, en Bourgogne, sur la droite de la Saône, entre Mâcon & Châlons, à 82 lieues de Paris, dans une situation agréable & fertile.

Tournus a toujours été du diocèse de Châlons, & dépendoit autrefois du comté de la même ville ; aujourd’hui elle est du comté de Mâcon, où ses causes ressortissent. Elle est divisée en deux paroisses ; mais ce qui la distingue est son abbaye d’hommes de l’ordre de saint Benoît, qui a été érigé en collégiale, & qui a un abbé titulaire. La justice, soit dans la ville de Tournus, soit dans ses dépendances, appartient à cet abbé ; il a seul le droit d’en nommer tous les officiers, qui prennent de lui leurs provisions ; il a aussi seul le droit de créer des notaires & des procureurs postulans ; aussi plusieurs auteurs ont écrit à l’envi l’histoire de l’abbaye de Tournus, savoir Falcon, moine de cette abbaye dans le xj. siecle ; Pierre de Saint-Julien, surnommé de Baleurre ; le P. Chifflet, jésuite, & Pierre Juenin. Long. 34. 46. lat. 46. 34.

La ville de Tournus est d’une origine inconnue ; il n’en est parlé que dans le troisieme siecle, sous le nom de castrum Timertium ou Trenorcium ; elle devint ville de la Gaule celtique dans le pays des Eduens, qui avoient Autun pour leur capitale ; ainsi elle étoit comprise dans l’ancienne province Lyonnoise. Pierre Juenin a mis au jour à Dijon, en 1733, en 2 vol. in-4°. l’histoire de cette ville.

Maignon (Jean), poëte françois, étoit de Tournus : il fit ses études chez les jésuites de Lyon, & fut quelque tems avocat au présidial de cette ville : il vint ensuite à Paris & s’y établit. Il y mourut assassiné, dit-on, sur le Pont-neuf en 1661, étant encore assez jeune. Il a composé beaucoup de mauvaises tragédies, entre autres Artaxerce, qui fut représentée par l’illustre théatre ; c’étoit le nom que prenoit une société de jeunes gens, du nombre desquels étoient Moliere & Maignon, & qui s’exerçant à la déclamation, représentoient des pieces, tantôt dans le fauxbourg saint Germain, & tantôt dans le quartier S. Paul. Artaxerce fut imprimé à Paris en 1645. Les autres pieces de Maignon sont ; les Amants discrets, 1645 ; le grand Tamerlan & Bajazet, 1648 ; le Mariage d’Orondate & de Statira, 1648 ; Zenobie, reine de Palmire, 1660 ; son Encyclopédie parut à Paris in-4°. sous le titre de la science universelle, 1663. l’auteur mourut pendant qu’on l’imprimoit. Lorsqu’il travailloit à cet ouvrage, quelqu’un lui demandant s’il seroit bien-tôt achevé : bien-tôt, dit-il, je n’ai plus que quelques mille vers. Le singulier, c’est de faire une Encyclopédie en vers ; on n’a peut-être jamais rien imaginé de si ridicule. Despréaux n’a pas eu tort de mettre Maignon au rang des froids écrivains.

On ne lit guere plus Rampale & Mesnardiere
Que Maignon, du Souhait, Corbin, & la Morliere.

Scaron a dépeint admirablement le poëte Maignon dans certaine épître chagrine, où il lui fait dire qu’il a aussi dessein de mettre en vers les conciles. (D. J.)