L’Encyclopédie/1re édition/TIMARIOTS

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TIMARIOTS, s. m. (Hist. mod.) nom que les Turcs donnent à ceux qui possedent des terres, sur le pié & suivant l’usage des timars. Voyez Timar.

Les timariots sont obligés de servir en personne à la guerre, avec un nombre d’hommes & de chevaux proportionné au revenu du timar ; c’est-à-dire que celui dont le timar est estimé à 2500 aspres par an, qui font environ six livres sterlings, doit fournir un cavalier monté & armé suivant la coutume : celui dont le timar vaut le double, en doit fournir deux, &c. ces cavaliers doivent se tenir prêts à marcher, dès qu’ils en reçoivent l’ordre, & ce à peine de la vie, de sorte que la maladie même ne peut pas leur servir d’excuse.

Outre ce service, les timariots payent le dixieme de leur revenu. Si en mourant ils laissent des enfans en âge de porter les armes, & en état de servir le grand seigneur, ou si, au défaut d’enfans, ils ont quelques parens, à quelque degré qu’ils soient, on a coutume d’en gratifier ceux-ci aux mêmes conditions, sinon on les confere à d’autres.

Si le revenu excede quinze mille aspres, ou trente-six livres sterlings, ceux qui en jouissent s’appellent subassi, ou zatms, & rendent la justice dans les lieux de leur dépendance, sous l’autorité du sangiac de la province.

Les timariots ont des appointemens depuis quatre ou cinq mille aspres, jusqu’à vingt mille ; mais on ne les oblige jamais d’aller à la guerre, à moins que leur timar ne rapporte plus de huit mille aspres, & que le grand seigneur ne se rende à l’armée en personne : dans ce dernier cas on n’exempte personne.

L’origine des timariots est rapportée aux premiers sultans, qui étant les maîtres des fiefs ou terres de l’empire, les érigerent en baronies ou commanderies, pour recompenser les services de leurs plus braves soldats, & sur-tout pour lever & tenir sur pié un grand nombre de troupes, sans être obligé de débourser de l’argent.

Mais ce fut Soliman II. qui introduisit le premier l’ordre & la discipline parmi ces barons ou chevaliers de l’empire ; & ce fut par son ordre qu’on régla le nombre de cavaliers que chaque seigneur eut à fournir à proportion de son revenu.

Ce corps a toujours été extrèmement puissant & illustre dans toutes les parties de l’empire ; mais son avarice, défaut ordinaire des Orientaux, a causé depuis peu sa décadence & son avilissement.

Les vicerois & gouverneurs de province savent si bien ménager leurs affaires à la cour du grand-seigneur, que les timars se donnent aujourd’hui à leurs domestiques, ou à ceux qui leur en offrent le plus d’argent, quand même les timars ne sont pas situés dans l’étendue de leur gouvernement.

Il y a deux sortes de timariots ; les uns appointés par la cour, & les autres par les gouverneurs des provinces ; mais les revenus des uns & des autres, sont plus modiques que ceux des zaïms, & leurs tentes & équipages sont aussi à proportion moins riches & moins nombreux. Voyez Zaims.

Ceux qui ont des lettres patentes de la cour, ont depuis 5 ou 6 mille, jusqu’à 19999 aspres de gages par an. Un aspre de plus, les met au rang des zaims ; mais ceux qui tiennent leurs patentes des vicerois, ont depuis trois jusqu’à six mille aspres d’appointement.

Cette cavalerie est mieux disciplinée que celle des spahis, quoique cette derniere ait meilleure mine & plus de vivacité.

Les spahis ne se battent que par pelotons ; au-lieu que les zaïms & les timariots sont enrégimentés, & commandés par des colonels, sous les ordres des bachas. Le bacha d’Alep, quand il se trouve à l’armée, est le colonel général de cette cavalerie.