L’Encyclopédie/1re édition/TAILLER

TAILLER, v. act. (Gram.) c’est couper, séparer, diviser, donner la forme & la grandeur convenables avec un instrument tranchant convenable. On taille la pierre, les arbres, la vigne, un habit, un homme attaqué de la pierre, une armée en pieces, &c. Voyez les articles suivans.

Tailler, (Charp.) c’est couper, retrancher. La taille du bois se fait en long avec des coins, de travers avec la scie, & en d’autres sens avec la coignée, la serpe & le ciseau. Dict. de Charpent. (D. J.)

Tailler la frisquette, (terme d’Imprimerie.) c’est découper le morceau de parchemin qui couvre la frisquette, pour que la forme ne porte que sur les endroits qui doivent être imprimés dans les feuilles qu’on tire. Savary. (D. J.)

Tailler en acier, en terme de Fourbisseur, c’est l’art d’orner une garde d’acier de toutes sortes de figures qu’il plait à l’ouvrier d’y graver ; cet art tient beaucoup de la sculpture & de la gravure : de l’une, en ce qu’il consiste à découvrir dans une piece d’acier les figures qu’on y a imaginées ; de l’autre, en ce que dans ses opérations il se sert des burins, comme elles. Pour l’exercer avec succès, non-seulement il faut posséder le dessein, & avoir du goût, mais encore une attention & une adresse particuliere pour finir des morceaux d’histoire entiers dans un si petit espace.

Tailler, l’art de, les pierres précieuses est très ancien ; mais cet art comme bien d’autres, étoit fort imparfait dans ses commencemens. Les François y ont réussi le mieux, & les Lapidaires de Paris, qui depuis 1290 se sont formés en corps, ont porté cet art à son plus haut point de perfection, sur-tout pour la taille des brillans.

Ils se servent de différentes machines pour tailler les pierres précieuses, suivant la qualité de celles qui doivent passer par leurs mains. Le diamant le plus dur se taille & se forme sur une roue d’un acier fort doux, tournée par une espece de moulin avec de la poussiere de diamant, trempée dans l’huile d’olive ; ce qui sert à polir le diamant aussi-bien qu’à le tailler. Voyez Diamant.

Les rubis, saphirs & topazes d’Orient, se forment & se taillent sur une roue de cuivre avec de l’huile d’olive & de la poussiere de diamant, & on les polit sur une autre roue de cuivre, avec du tripoli & de l’eau. Voyez Rubi.

Les émeraudes, hyacinthes, améthistes, les grenats, agates & autres pierres moins dures, se taillent sur une roue de plomb, avec de l’émeril & de l’eau, & on les polit sur une roue d’étain avec du tripoli. Voyez Emeraude, &c.

La turquoise de l’ancienne & de la nouvelle roche, le lapis lazuli, le girasol & l’opale se taillent & se polissent sur une roue de bois avec du tripoli. Voyez Turquoise, &c.

Tailler, v. act. terme de Monnoie ; c’est faire d’un marc d’or, d’argent ou de cuivre, la juste quantité des especes qui sont ordonnées dans les réglemens sur le fait des monnoies. Il y a dans chaque monnoie, des ouvriers & ouvrieres ; ces dernieres s’appellent plus ordinairement tailleresses, qui taillent & coupent les flaons ou flans, c’est-à-dire les morceaux d’or, d’argent ou de cuivre, destinés à être frappés & qui les liment & les ajustent au juste poids des especes. (D. J.)

Tailler carreau, terme d’ancien monnoyage ; c’étoit emporter des lames de métal, des morceaux quarrés, pour ensuite les arrondir & en former des flancs.

Tailler un habit, terme de Tailleur ; qui signifie couper dans l’étoffe les morceaux nécessaires pour en composer un habit, & leur donner la largeur & la longueur requise, pour pouvoir servir à l’usage de la personne qui le fait faire.

Pour tailler un habit, l’ouvrier étale sur sa table ou établi l’étoffe destinée pour le faire, & comme toutes les pieces ou morceaux d’un habit, ainsi que de la doublure, doivent être doubles, afin d’être employées, l’une du côté droit, & l’autre du côté gauche ; il met ordinairement l’étoffe en double pour tailler les deux morceaux à la fois. Alors il applique sur cette étoffe un patron ou modele de la piece qu’il veut couper ; & avec de gros ciseaux faits exprès pour les gens de cette profession, il coupe l’étoffe tout-au-tour du patron, en observant cependant de donner aux pieces qu’il coupe l’ampleur nécessaire pour en former de tous les morceaux cousus & joints ensemble, un tout de la longueur & de la largeur qu’on lui a prescrite.

Tailler le pain, le vin, (Commerce.) ou les autres denrées ou marchandises, qu’on vend ou qu’on prend à crédit ; c’est faire des entailles sur un double morceau de bois, dont l’un est pour le vendeur, & l’autre pour l’acheteur, afin de se souvenir des choses qu’on livre ou qu’on reçoit, ce qui sert comme d’une espece de journal ; on appelle ce morceau de bois taille. Voyez Taille. Dict. de Commerce.

Tailler, v. n. (Jeux de cartes.) c’est tenir les cartes & les paris mis sur ces cartes. Voyez l’article Taille.