L’Encyclopédie/1re édition/TABELLION

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TABELLION, s. m. (Jurisprud.) est un officier public qui expédie les contrats, testamens & autres actes passés par les parties.

On confond quelquefois le terme de tabellion avec celui de notaire, sur-tout dans les campagnes, où les notaires des seigneurs sont communément appellés tabellions. Cependant ces termes notaire & tabellion pris par chacun dans leur véritable signification, ne sont point synonymes, & le terme de tabellion n’a point été introduit pour désigner des notaires d’un ordre inférieur aux notaires royaux, qui résident dans les grandes villes.

Le terme de tabellion vient du latin tabula, seu tabella, qui dans cette occasion signifioit ces tablettes enduites de cire dont on se servoit autrefois au lieu de papier. On appella chez les Romains tabularius seu tabellio, l’officier qui gardoit les actes publics ; il exerçoit en même tems la fonction de greffier ; c’est pourquoi les termes de scribæ & de tabularii sont presque toujours conjoints dans les textes du droit, & souvent pris indifféremment l’un pour l’autre.

Les tabellions romains faisoient même à certains égards la fonction de juges, tant envers les parties, qu’envers leurs procureurs, & il n’y avoit point d’appel de leurs jugemens ; ainsi que le remarque Cassiodore en sa formule des notaires.

Les notaires, qui n’étoient alors que les clercs ou les aides des tabellions, recevoient les conventions des parties, qu’ils rédigeoient en simples notes abrégées ; & les contrats dans cette forme n’étoient point obligatoires ni parfaits, jusqu’à ce qu’ils eussent été écrits en toutes lettres, & mis au net, in purum seu in mundum redacti, ce qui se faisoit par les tabellions.

Ces officiers ne signoient point ordinairement la note ou minute de l’acte ; ils ne le faisoient que pour les parties qui ne savoient pas signer.

Quand le notaire avoit fait la grosse ou expédition au net, il la délivroit sur le champ à la partie sans être tenu de la faire enregistrer préalablement, ni même de conserver la note ou minute, laquelle n’étoit plus regardée que comme le projet de l’acte.

Mais ce qu’il faut encore remarquer, c’est que les contrats ainsi reçus par les notaires, & expédiés par les tabellions, ne faisoient pas à Rome une foi pleine & entiere, jusqu’à ce qu’ils eussent été vérifiés par témoins ou par comparaison d’écritures ; c’est pourquoi pour s’exempter de la difficulté de faire cette vérification, on les insinuoit & publioit apud acta.

En France les juges se servoient anciennement de leurs clercs pour greffiers & pour notaires ; ces clercs recevoient en présence du juge les actes de jurisdiction contentieuse ; & en son absence, mais néanmoins sous son nom, les actes de jurisdiction volontaire.

Dans toutes les anciennes ordonnances jusqu’au tems de Louis XII. les greffiers sont communément appellés notaires, aussi-bien que les tabellions, & la fonction de greffiers & tabellions y est confondue, comme n’étant qu’une seule & même charge.

Les greffes & tabelliones étoient communément donnés à ferme ; ce qui continua sur ce pié jusqu’au tems de François I. lequel par un édit de l’an 1542, érigea les clercs des tabellions en titre d’office, & en fit un office séparé de celui du maître, voulant qu’en chaque siege royal où il y avoit un tabellion, il y eût un certain nombre de notaires, au lieu des clercs ou substituts que le tabellion avoit auparavant ; & que dans les lieux où il y avoit plusieurs notaires, il y eût en outre un tabellion : on attribua aux notaires le droit de recevoir les minutes d’actes, & aux tabellions le droit de les mettre en grosse.

Mais depuis, Henri IV. réunit les fonctions de notaire & de tabellion, ce qui a eu son exécution, excepté dans un petit nombre d’endroits, où la fonction des tabellions est encore séparée de celle des notaires.

On entend par droit de tabellionage, le droit de créer des notaires & tabellions ; ce droit n’appartient qu’au roi, & les seigneurs ne peuvent en établir dans leurs justices qu’autant qu’ils ont ce droit par leurs titres, & que la concession est émanée du roi.

On donne quelquefois le nom de tabellion aux notaires des seigneurs, comme pour les distinguer des notaires royaux, quoiqu’ils aient les mêmes fonctions, chacun dans leur district. Voyez la Novelle 44 de Justinien ; Loyseau, des offices, liv. II. ch. v. le recueil des ordonnances, & le mot Notaire. (A)