L’Encyclopédie/1re édition/SUIF

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SUIFFE  ►

SUIF, s. m. est une espece de graisse qu’on trouve dans les daims, les moutons, les bœufs, les porcs, &c. & qui étant fondue & clarifiée, fait ce qu’on appelle suif dont on fait des chandelles. Voyez Graisse & Suif.

Ce mot est formé du latin suedum, sebum ou sevum qui signifie la même chose, & qui vient à sue à cause de la graisse de cet animal.

Les Anatomistes, &c. distinguent quatre sortes de graisse dans le corps d’un animal : la premiere qui se lie, & qui après qu’on l’a fondue, se refroidit & acquiert beaucoup de consistance, se nomme suif. On la trouve en grande quantité dans le bas-ventre & autour des reins.

Le P. Lecomte fait mention d’un arbre qui vient dans la Chine, & qui porte le suif. Voyez Arbre a suif .

Suif, (Pharm. & Mat. médic.) espece de graisse qui ne mérite une considération particuliere, quant à ses usages pharmaceutiques, qu’à cause de sa consistence ferme & cassante jusqu’à un certain point, à laquelle on doit avoir égard lorsqu’on l’emploie dans des compositions pharmaceutiques, dont il modifie la consistence générale par cette qualité. Le suif n’a d’ailleurs que les qualités médicinales communes des graisses. Voyez Graisse, Chimie, &c.

On distingue dans les boutiques le suif de bélier, celui de mouton, celui de bouc, celui de bœuf, & celui de cerf.

On demande dans la Pharmacopée de Paris le suif de bélier pour l’onguent de la mere, pour le mondificatif d’ochre & pour le sparadrap ; le suif de mouton, pour l’emplâtre appellé ciroëne, & pour l’onguent de litharge ; le suif du bouc, pour le baume d’arcæus & pour l’emplâtre de mélilot composé ; le suif de bœuf, pour l’emplâtre de mélilot simple ; & le suif de cerf, pour l’emplâtre de Nuremberg ; mais il est très-sûr (& c’est assûrément une infidélité très-pardonnable) que les Apoticaires emploient tous ces suifs fort indifféremment, à la réserve seulement du suif de cerf, qu’ils se gardent bien d’employer, au-moins dans les contrées où cette drogue est rare & chere. Des quatre autres suifs moins magnifiques, celui de bouc est le plus beau & le plus ferme, mais ses qualités méritent cependant fort peu de préférence dans l’usage pharmaceutique. (b)

Suif, bois de, (Hist. nat.) on trouve à la Chine un arbre qui fournit une substance parfaitement semblable à du suif. Le fruit de cet arbre est renfermé dans une enveloppe qui, lorsque le fruit est mûr, s’ouvre d’elle-même comme celle de nos châtaignes, il en sort deux ou trois fruits de la grosseur d’une noisette, dont la pulpe a les mêmes propriétés que le suif, & qui, fondue avec un peu d’huile ou de cire, devient propre à faire des chandelles, dont on fait usage dans tout l’empire de la Chine. Pour séparer cette espece de suif de son fruit, on le pulvérise, après quoi on le fait bouillir dans de l’eau, à la surface de laquelle il surnage une substance semblable à de l’huile, qui se condense lorsqu’elle est refroidie, & qui prend la même consistence que le suif. On mêle dix parties de cette substance avec trois parties d’huile de lin & avec un peu de cire, afin de lui donner de la solidité, & pour l’empêcher de s’attacher aux doigts. Les Chinois donnent la forme d’un segment de cône aux chandelles faites de cette substance, que l’on y colore quelquefois en y incorporant des couleurs avec des parfums, pour en rendre l’odeur plus agréable. Les meches que l’on y met sont de coton.

Le bois de suif a précisément l’odeur du suif ordinaire.

Suif-noir, (Marine.) c’est un mélange de suif & de noir, dont les corsaires frottent le fond de leurs bâtimens, afin qu’il ne paroisse pas qu’on l’a suivé.

Suif, mettre les cuirs en suif, terme de Corroyeur & de Hongrieur, qui signifie imbiber les cuirs avec du suif chaud par le moyen d’une espece de tampon de laine, appellé gipon.