L’Encyclopédie/1re édition/STRABISME

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STRABISME, s. m. terme de Chirurgie, mauvaise conformation des yeux, qui consiste dans une direction dépravée du globe de l’œil, qui rend louche, qui fait regarder de-travers, soit en-haut, soit en-bas, soit sur les côtés. L’on convient assez généralement que cette indisposition dépend de la contraction de quelques muscles de l’œil, & du relâchement de leurs antagonistes, & que les muscles contractés tirent le globe de leur côté, pendant que les muscles relâchés cedent à leur action. On donne pour preuve de ce sentiment, que les enfans sont sujets à devenir louches, par la faute de ceux qui les placent dans leurs berceaux, de maniere qu’ils ne voyent la lumiere, ou certains objets remarquables, qu’obliquement ; les muscles habitués à cette contraction, s’y affermissent & tournent toujours les yeux de ce côté-là. Pour y rémédier, on change la situation des enfans, on met du côté opposé les objets qui les attachoient ; on leur met des mouches de taffetas gommé, pour leur faire tourner l’œil de ce côté. Paul d’Ægine a inventé un masque qui couvre les yeux, & où il n’y a que deux petits trous correspondans au centre de la vue, pour recevoir directement les rayons lumineux : c’est ce que les modernes ont nommé bésicles. M. de Buffon a parlé du strabisme, dans les mémoires de l’académie royale des Sciences, & a conseillé d’obliger les enfans de se regarder souvent dans un miroir, afin de se redresser la vue. Antoine Maître-Jean, fameux chirurgien & oculiste, prétend que le strabisme ne dépend pas de l’action des muscles, mais d’une mauvaise conformation de la cornée transparente, plus tournée d’un côté que de l’autre ; que c’est un vice naturel, irréparable, & que tous les moyens proposés pour rendre la vue droite à ceux qui l’avoient de travers, ont été sans effets. Cette matiere offre encore un champ à des observations très-utiles. (Y)