L’Encyclopédie/1re édition/SOSIPOLIS

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SOSIPOLIS, s. m. (Mythol. grecq.) dieu des Eléens. Pausanias raconte que les Arcadiens ayant fait une grande irruption en Elide, les Eléens s’avancerent contre eux pour éviter la prise de leur capitale. Comme ils étoient sur le point de livrer bataille, une femme se présenta aux chefs de l’armée, portant entre ses bras un enfant à la mamelle, & leur dit, qu’elle avoit été avertie en songe que cet enfant combattroit pour eux. Les généraux éléens crurent que l’avis n’étoit pas à négliger ; ils mirent cet enfant à la tête de l’armée, & l’exposerent tout nud ; au moment du combat cet enfant se transforma tout-à-coup en serpent, & les Arcadiens furent si effrayés de ce prodige, qu’ils se sauverent ; les Eléens les poursuivirent, en firent un grand carnage, & remporterent une victoire signalée.

Comme par cette avanture la ville d’Elis fut sauvée, les Eléens donnerent le nom de Sosipolis à ce merveilleux enfant, bâtirent un temple à sa gloire, & instituerent une prêtresse particuliere pour présider à son culte. Le temple étoit double : la partie antérieure étoit consacrée à Lucine, qui selon l’opinion des Eléens, avoit singulierement présidé à la naissance de Sosipolis. Tout le monde jouissoit d’une entrée libre dans cette partie du temple ; mais dans le sanctuaire du dieu, personne n’y entroit que la prêtresse qui même, pour exercer son ministere, se couvroit la tête d’un voile blanc.

Les filles & les femmes restoient dans le temple de Lucine, chantoient des hymnes & brûloient des parfums en l’honneur du dieu d’Elide. On représentoit ce dieu sous la forme d’un enfant avec un habit de plusieurs couleurs, & semé d’étoiles, tenant d’une main une corne d’abondance.

On peut croire que les chefs des Eléens pour effrayer leurs ennemis, & donner du courage à leurs troupes, s’aviserent du stratagême d’exposer un enfant à la tête du camp, & de substituer ensuite avec adresse, un serpent à la place. Enfin on fit intervenir la religion pour soutenir une ruse qui avoit si bien réussi. Voilà le premier tome de la Pucelle d’Orléans.

Jupiter est aussi quelquefois nommé Sosipolis, c’est-à-dire sauveur de la ville. (D. J.)