L’Encyclopédie/1re édition/SCHIRAS ou SCAIRAZ

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SCHIRAS ou SCAIRAZ, (Géog. mod.) ville de Perse, capitale du Farsistan, près des ruines de l’ancienne Persépolis, dans une vaste & agréable plaine, sur le Bendemir. Long. suivant la plûpart des géographes, 73. 75. latit. septentrion. 29. 36. cependant les tables de Nassir-Eddin & d’Ulug-beg lui donnerent 88d. de longit. ce qui vient sans doute de la position du premier méridien que ces deux auteurs reculent plus avant vers l’orient.

Les sultans Bouïdes ont fait en divers tems de Schiras & d’Ispahan la capitale de leurs états. Les mogols ou tartares de Ginghiz-Kan s’en rendirent les maîtres, & l’ont possédée jusqu’au tems de Tamerlan ; ensuite les sultans Turcomans devinrent possesseurs de cette ville, qui passe aujourd’hui pour la seconde de l’empire de Perse. Son circuit peut être d’environ 9 milles, dont il n’y a cependant qu’une partie qui soit habitée ; la plûpart des maisons sont de torchis ; les plus belles sont de brique cuite au soleil. Celle du kan qui y commande a plusieurs galeries, cours, vergers & jardins ; ce palais est bâti comme une tour, & a trois étages, avec plusieurs balcons & fenêtres. Son sérail joint ce bâtiment.

Les mosquées de Schiras sont belles, & les fontaines ne manquent pas dans cette ville. Les vivres y sont en abondance. Les environs produisent le meilleur vin de tout l’Orient, des raisins admirables qu’on confit à demi-mûrs au vinaigre pour en faire un rafraichissement dans les chaleurs de l’été. Le terroir de cette ville produit aussi beaucoup de capres, de l’opium, & des roses en telle quantité, qu’on fournit diverses provinces voisines de l’eau qu’on tire de ces roses, & qui est singulierement estimée.

Moslach eddin, qu’on connoît aussi sous le nom de Saddi, homme célebre dans tout l’Orient, étoit natif de Schiras, & florissoit dans le xiij. siecle. Abubeker le fit instruire en toutes sortes de sciences, & Saddi ne trouva point dans la suite de termes assez forts pour célebrer les louanges de ce prince. On a de lui, en langue persane, son gulistan, ou son jardin des roses, ouvrage plein de traits de morale sur les mœurs des princes, l’éducation des enfans, la jeunesse, la vieillesse, &c. Nous n’avons que des foibles traductions françoises & latines de cet ouvrage. L’autre livre de Saddi, intitulé le bustiah, ou le berger, est un poëme en dix livres, dans lequel l’auteur traite de la justice, de l’amour, de la folie, des bonnes mœurs, de la constance, de la tempérance, &c. Il n’a point encore été traduit dans aucune langue européenne, mais il n’est pas moins estimé que le gulistan dans tout l’Orient. Saddi passe pour un des grands poëtes de la Perse. (D. J.)