L’Encyclopédie/1re édition/SAPIENCE

◄  SAPHORIN

SAPIENCE, s. f. (Gram.) se dit quelquefois pour sagesse, pradence. Lafontaine a appellé la Normandie le pays de sapience.

Sapience de Jesus, fils de Sirach, (Critiq. sacrée.) c’est le titre grec ordinaire du livre communément appellé l’Ecclésiastique, mis par les uns au rang des livres canoniques de l’Ecriture, & par les autres au rang des apocryphes ; nous ne répéterons pas ici ce qui en a été dit au mot Ecclésiastique, pour ne point faire de doubles emplois.

L’an 132 avant Jesus-Christ, & la 38. de Ptolomée Evergete II. plus connu sous le nom de Physeon, Jesus, fils de Sirach, juif de Jérusalem, vint s’établir en Egypte, & y traduisit en grec pour l’usage des Juifs hellénistes, le livre que Jesus son grand-pere avoit composé en hébreu, & qui est intitulé dans nos Bibles l’Ecclésiastique. Les anciens l’appellent Panareton, mot grec qui signifie le trésor de toutes les vertus, parce qu’ils le regardoient comme un recueil de maximes les plus vertueuses. Jesus l’avoit écrit en hébreu vers le tems du pontificat d’Onias II. & un autre Jesus son petit-fils le mit en grec. Ce dernier est distingué du grand-pere qui en étoit l’auteur, par le titre de fils de Sirach. L’original hébreu est perdu ; on l’avoit encore du tems de saint Jérôme, car il déclare dans sa préface aux livres de Salomon, & dans son épît. 115. qu’il l’avoit vû sous le titre de paraboles.

Il est vraissemblable qu’il y a dans la traduction grecque des choses qui n’étoient pas dans l’original. La conclusion du ch. l. v. 27. & suiv. & la priere du dernier chapitre, sont sans doute des additions du traducteur ; car ce que l’auteur y dit du danger qu’il a couru de perdre la vie par une fausse accusation portée au roi contre lui, appartient au regne barbare de Ptolomée Physeon, & ne peut pas regarder le grand-pere de Jesus, qui demeuroit à Jérusalem, trois générations auparavant, lorsqu’il n’y avoit point de tyrannie exercée sur le pays.

La version latine de ce livre de l’Ecclésiastique contient aussi plusieurs choses qui ne sont pas dans le grec. Il faut qu’elles y aient été insérées par celui qui l’a traduit en latin. A présent que l’hébreu qui étoit l’original est perdu, le grec qui est la traduction du petit-fils de l’auteur en doit tenir lieu, & les versions devroient toutes être faites sur le grec, & non sur le latin.

Les juifs modernes ont un livre qu’ils appellent le livre de Ben-Sira, ou du fils de Sira. Comme ce livre est aussi un recueil de sentences de morale ; quelques critiques ont pensé que ce Ben-Sira, ou fils de Sira, étoit le même que Ben-Sirach, ou fils de Sirach ; & que son livre est le même que notre Ecclésiastique ; mais c’est une erreur facile à connoître par la confrontation des deux ouvrages. Celui des Juifs modernes a été imprimé plusieurs fois. Voyez la Bibliotheque rabinique de Buxtorf, pag. 324. (D. J.)