L’Encyclopédie/1re édition/ROYAUME

ROYAUTÉ  ►

ROYAUME, s. m. (Droit politiq.) « ce mot signifie (je ne dirai pas ce que disoient ces républicains outrés, qui firent anciennement tant de bruit dans le monde par leurs victoires & leurs vertus) un tyran & des esclaves ; disons mieux qu’eux, un roi & des sujets ».

Un royaume est donc un état où un seul gouverne le corps politique par des lois fixes & fondamentales.

La plûpart des auteurs prétendent que parmi les rois, les uns sont les maîtres de leur couronne, comme d’un patrimoine qu’il leur est permis de partager, de transférer, d’aliéner, en un mot dont ils peuvent disposer comme ils le jugent à propos. D’autres n’ont la souveraineté qu’à titre d’usufruit, ou de fidei commis, & cela, ou pour eux seulement, ou avec pouvoir de la transmettre à leurs descendans suivant les regles établies pour la succession.

C’est sur ce fondement que les mêmes auteurs ont divisé les royaumes en patrimoniaux & en usufructuaires, ou non-patrimoniaux ; ils ajoutent que ces rois possedent la couronne en pleine propriété, qui ont acquis la souveraineté par droit de conquête, ou ceux à qui un peuple s’est donné sans reserve pour éviter un plus grand mal ; mais qu’au contraire les rois qui ont été établis par un libre consentement du peuple, ne possedent la couronne qu’à titre d’usufruit. Telle est la maniere dont Grotius explique cette distinction, en quoi il a été suivi par Puffendorf, & par la foule des écrivains.

Le celebre Coccéius, Thomasius, Bohmer, M. Barbeyrac & autres savans, ont adopté une opinion différente dans leurs ouvrages sur cette matiere, dont voici à-peu-près le précis.

Ils conviennent d’abord que le pouvoir souverain peut entrer en commerce aussi-bien que tout autre droit, & qu’il n’y a en cela rien de contraire à la nature de la chose ; ensorte que si la convention entre le prince & le peuple porte expressément que le prince aura plein droit d’aliéner la couronne, & d’en disposer comme il le trouvera bon ; on nommera si l’on veut un tel royaume, un royaume patrimonial ; & les autres royaumes, des royaumes usufructuaires ; mais les exemples de pareilles conventions sont si rares, qu’à peine en trouve-t-on d’autres que celui des Egyptiens avec leur roi, dont il est parlé dans la Genèse, ch. xlvij. v. 18. & suiv. & les disputes des docteurs sur le pouvoir d’aliéner la couronne, regardent les cas où il n’y a point eu de convention là-dessus entre le prince & le peuple.

La distinction qu’on fait ici se réduit à un cercle vicieux, car quand on demande quels sont les princes qui ont pouvoir d’aliéner le royaume, on répond que ce sont ceux qui possedent un royaume patrimonial ; & quand on demande ce que c’est qu’un royaume patrimonial, on dit que c’est celui dont le prince a pouvoir d’aliéner la couronne. Il est vrai que les uns prétendent que les royaumes successifs sont patrimoniaux ; les autres, que ce sont les royaumes despotiques ; les autres, que ce sont ceux qui ont été conquis ou établis de quelqu’autre maniere par un consentement forcé du peuple ; mais aucune de ces opinions n’établit de fondement solide d’un droit de proprieté proprement ainsi nommé, & accompagné du pouvoir d’aliéner.

De ce que l’on s’est soumis par force ou par nécessité à la domination de quelqu’un, il ne s’ensuit pas non plus qu’on lui ait donné par cela même le pouvoir de transferer son droit à tel autre qu’il voudra. Envain objecteroit-on que si le prince eût stipulé qu’on lui donnât le pouvoir d’aliéner, on y auroit consenti ; le silence, tout au-contraire, fait présumer qu’il n’y a point eu de telle concession tacite, puisque si le roi avoit prétendu acquérir le droit d’aliéner la couronne, c’étoit à lui à s’expliquer, & à faire expliquer là-dessus le peuple ; mais le peuple n’en ayant point parlé, comme on le suppose, il est & doit être censé n’avoir nullement pensé à donner au roi un pouvoir qui le mît en état de lui faire changer de maître à sa fantaisie.

En un mot, le pouvoir souverain, de quelque maniere qu’il soit conféré, & quelque absolu qu’il soit, n’emporte point par lui-même un droit de proprieté, ni par conséquent le pouvoir d’aliéner ; ce sont deux idées tout-à-fait distinctes, & qui n’ont aucune liaison nécessaire l’une avec l’autre. Le grand-seigneur, tout despotique qu’il est, n’a ni la puissance d’aliéner l’empire, ni de changer à sa fantaisie l’ordre de la succession.

Il est vrai qu’on allegue un grand nombre d’exemples d’aliénations faites de tout tems par les souverains ; mais il faut remarquer sur ces exemples qu’on allegue, 1°. que la plûpart de ces aliénations n’ont eu aucun effet ; 2°. que nous ignorons les conditions sous lesquelles les princes ou les états anciens dont on parle, avoient acquis la souveraineté de tel ou tel peuple. Ainsi il pourroit se faire qu’il y eût quelque clause formelle par laquelle ces peuples avoient donné à leurs souverains le pouvoir d’aliéner la souveraineté même. 3°. Souvent ces aliénations n’ont eu d’autre titre que la force, & elles ne sont devenues légitimes qu’en vertu du consentement donné après coup, lorsque les peuples aliénés se sont soumis sans opposition au nouveau souverain. 4°. Il a pû y avoir aussi un consentement tacite entierement libre, dans le tems même de l’aliénation, & cela en deux manieres ; ou quand le peuple qu’on vouloit aliéner, n’y témoignoit aucune répugnance, quoiqu’il ne fût point contraint par une force majeure ; ou parce que l’usage s’étant introduit en orient & ailleurs, d’attacher au droit de souveraineté absolue un plein pouvoir de propriété, qui autorisât le souverain à aliéner ses états comme bon lui sembloit ; ceux qui se soumettoient à un tel souverain, étoient censés le faire sur le pié de la coutume établie, à moins qu’ils ne déclarassent expressément le contraire. Ainsi tous ces exemples ne prouvent point que le pouvoir d’aliéner, suive nécessairement de la souveraineté la plus absolue, & considerée en elle-même, & de quelque maniere qu’on l’acquiere.

Concluons donc, comme un principe incontestable, que dans le doute, tout royaume doit être censé non patrimonial, aussi long-tems qu’on ne prouvera pas d’une maniere ou d’une autre, qu’un peuple s’est soumis sur ce pié là à un souverain. Voyez Barbeyrac, dans ses Notes sur Grotius ; & Bohmer, dans son Introduct. ad jus publicum universale. (D. J.)

Rovaume de Dieu, (Critique sacrée) ce mot se prend dans l’Ecriture, pour le souverain empire de Dieu sur toutes les créatures ; le royaume des cieux, est une expression commune dans le nouveau testament, pour signifier le royaume de Jesus-Christ, c’est-à-dire la vocation des peuples à la foi, & la prédication de l’évangile ; il marque encore l’état des bienheureux après cette vie ; heureux sont les pauvres en esprit, car le royaume des cieux leur appartient. Matt. v. 3. Les pauvres en esprit sont ceux qui ne sont pas possedés de l’amour des richesses, & qui ne commettent pas d’injustice pour en acquérir. Voyez Pauvre, Critiq. sacrée. (D. J.)

Royaume d’Israel et de Juda, (Hist. sacrée) les Israélites, après avoir été sagement gouvernés par des juges éclairés, & choisis dans chaque tribu, se lasserent de cette forme de gouvernement, & déclarerent à Samuël qu’ils ne vouloient plus, à l’exemple d’autres nations voisines, obéir qu’à un seul, qui fût leur maître & leur roi. Samuël pour les détourner de prendre ce parti, leur représenta fortement, mais vainement, quel seroit le droit du roi qui les gouverneroit ; il vous ôtera vos fils, leur dit-il, pour en faire ses serviteurs ; il prendra vos esclaves & vos troupeaux ; il vous fera payer la dixme de vos grains pour enrichir ses créatures, & vous serez ses esclaves. I. Rois viij. 11. Les Israélites n’écouterent point le prophete, & Saül fut nommé leur roi. Cependant ce que Samuël appelle le droit du roi, jus regis, n’est pas le droit légitime des rois, mais l’abus qu’ils font de l’autorité qui leur a été confiée par les peuples, lorsqu’au lieu d’en être les peres & les protecteurs, ils en deviennent les oppresseurs & les tyrans.

A Saül succéda Isboseth pendant quelque tems, sur une partie de son royaume, & à la mort d’Isboseth, David réunit tout Israël. A David succéda Salomon, après la mort duquel le royaume fut partagé ; dix tribus suivirent Jéroboam, car le fils de Salomon ne regna que sur Benjamin & Juda ; alors se formerent deux royaumes, celui de Juda, & celui d’Israël ; le dernier dura 253 ans, sous dix-neuf rois, qui tous moururent dans l’impiété ou dans le crime.

Le royaume de Juda eut aussi dix-neuf rois, depuis Roboam jusqu’à Sédécias, sous le regne duquel Jérusalem fut prise par Nabuchodonosor, le temple brulé, & les habitans emmenés captifs au-delà de l’Euphrate. Dans cette longue suite de rois, il ne s’en trouve que trois, David, Ezéchias & Josias, qui n’aient pas été idolâtres, ou du moins fauteurs de l’idolatrie. Ecclés. xljx. 5.

Après le retour de la captivité, qui dura 70 ans, les Juifs rentrerent dans l’aristocratie, & vêcurent sous la domination des Perses, jusqu’au regne d’Alexandre le Grand, l’an du monde 3672. après sa mort la Judée passa sous l’autorité des rois d’Egypte, ensuite sous celle des rois de Syrie, jusqu’à ce qu’Antiochus Epiphane, ayant forcé les Juifs de prendre les armes pour leur défense, la famille des Asmonéens s’éleva & remit les Juifs en liberté.

D’abord ceux de cette famille ne prirent que le nom de princes, que porterent cinq d’entr’eux, Mathatias, Juda Machabée, Jonathas, Simon, & Hircan ; mais Aristobule prit le titre de roi qu’il transmit à cinq de ses successeurs, Alexandre, Jannée, Salomé sa femme, Hircan, Aristobule, & Antigone. Ensuite Hérode s’empara du royaume, & le conserva sous l’autorité de Rome ; après sa mort, la Judée fut gouvernée sous le nom d’Ethnarchie, par ses trois fils, Archélaus, Hérode Antepas, & Philippe. Enfin elle sut réduite en province romaine. (D. J.)

Royaumes du monde, (Hist. anc.) on compte ordinairement vingt-quatre royaumes célebres jusqu’à la naissance de Jesus-Christ. Les voici :

Le premier royaume est celui de Babylone, que Nemrod fonda 146 ans après le déluge l’an 1802 du monde, & 2233 avant Jesus-Christ. Nemrod y joignit l’Assyrie ; mais on ne connoît pas ses successeurs, & l’Ecriture laisse assez voir que tous ces vastes pays qui ont formé l’empire d’Assyrie, appartenoient à différens maîtres au tems d’Abraham.

Le second royaume est celui d’Egypte, que Mesraïm fonda l’an 1847 du monde, 2188 ans avant l’ere chrétienne. On apprend de Constantin Manassés que ce royaume a été de 1633 ans ; intervalle qu’on trouve depuis Mesraïm jusqu’à la conquête d’Egypte par Cambyses, roi des Perses, l’an du monde 3510, 525 ans avant Jesus-Christ.

Le troisieme royaume est celui de Sicyone, ville de Péloponnèse. C’est le premier royaume de l’Europe dont on connoisse un peu les rois. Jusqu’en Grece même, tout ce qui étoit plus ancien qu’Inachus premier roi d’Argos, passoit communément pour inconnu. On fixe le commencement de ce royaume à l’an 1871 du monde, 2164 ans avant Jesus-Christ. On dit qu’Egialée en fut le premier roi, & Zeuxippe le dernier ; que ce royaume dura 959 ans ; qu’ensuite les prêtres de Jupiter Carnien gouvernerent successivement pendant 33 ans ; & que Charidème ayant pris la fuite l’an 2863 du monde, Sicyone resta sous la dépendance des rois de Mycenes. Suivant ce système de Castor, le royaume de Sicyone finit l’an 2830 du monde, 1205 ans avant Jesus-Christ.

Le quatrieme royaume est celui d’Argos, ville du Péloponnèse, qui fut fondée par Inachus l’an 2177 du monde, 1858 avant Jesus-Christ. Il dura 382 ans sous neuf rois, dont le dernier fut Sthélénus. L’an du monde 2559, & avant Jesus-Christ 1476, Danaüs venu d’Egypte, commença une nouvelle dynastie, qui ne subsista que sous cinq rois pendant 163 ans. Acrisius, le dernier de ces rois, fut tué l’an 2690 du monde, 1345 ans avant Jesus-Christ. Il y eut ensuite divers petits rois à Argos, & dans les villes des environs qui avoient composé le royaume d’Argos ; mais ce fut le roi de Mycenes qui eut la principale autorité.

Le cinquieme royaume est celui d’Athènes qui fut fondé l’an 2477 du monde, 1558 ans avant Jesus-Christ par Cécrops, qui ne laissa point d’héritier. Les seize rois qui lui succéderent furent presque tous de différentes familles. Codrus, le dernier de tous, fut tué l’an 2943 du monde, 1092 ans avant Jesus-Christ. Quoiqu’il laissât des enfans, on abolit la monarchie qui avoit subsisté pendant 487 ans, & l’état fut gouverné par des archontes perpétuels ; ce qui eut lieu pendant 316 ans, c’est-à-dire jusqu’à l’an 3283 du monde, 752 ans avant Jesus-Christ. Cette année on regla que les archontes seroient renouvellés tous les dix ans. Il y en eut sept qui gouvernerent pendant 68 ans. Enfin l’an 3351 du monde, 684 ans avant Jesus-Christ, 874 depuis la fondation du royaume, on commença à ne faire que des archontes annuels, ce qui a subsisté jusqu’à ce que la ville d’Athènes perdit sa liberté.

Le sixieme royaume est celui de Troye, ville de Phrygie en Asie. Il fut fondé l’an 2555 du monde, 1480 avant Jesus-Christ, par Dardanus venu de l’île de Crete, & dura 296 ans sous six rois, dont le dernier fut Priam, si célebre par le nombre de ses enfans, & par le chagrin qu’il eut de les voir tous périr. Le royaume de Troye fut détruit par les Grecs l’an 2851 du monde, 1184 avant Jesus-Christ. Astyanax, fils d’Hector & petit fils de Priam, y regna depuis, mais non avec la gloire & la puissance de ses ancêtres ; & on ne sait rien de ses successeurs.

Le septieme royaume est celui de Mycenes, ville du Péloponnèse, qui fut fondé par Persée l’an 2722 du monde, 1313 avant Jesus-Christ, & qui fut détruit par les desendans d’Hercule l’an 2906 du monde, 1129 avant Jesus-Christ, après avoir subsisté 186 ans. Atrée & Agamemon, rois de Mycenes, sont trèscélebres ; le dernier commandoit avec une autorité absolue l’armée des Grecs qui fit le siege de Troye, parce qu’il étoit le plus puissant de tous les rois grecs, & que presque tout le Péloponnèse & une partie de la Grece propre lui étoient soumis.

Le huitieme royaume est celui des Latins en Italie, fondé l’an 2705 du monde, 1330 avant Jesus-Christ par Picus, fils de Saturne, auquel succéda son fils Faunus, puis Latinus, vaincu par Enée, dont le seizieme successeur fut Numitor que Romulus mit sur le trône peu avant que de bâtir Rome.

Le neuvieme royaume est celui de Tyr, qui, à le faire commencer au tems où Josephe prétend que la ville de Tyr fut bâtie, fut fondé l’an 2783 du monde, 1252 avant Jesus-Christ. Il est certain que cet historien se trompe pour le tems de la fondation de cette ville célebre, puisqu’Io, qui fut enlevée par des tyriens, est bien plus ancienne, & que de son tems Tyr faisoit déja un grand commerce. Il fait venir le royaume de Tyr l’an 3187 du monde, 848 avant Jesus-Christ.

Le dixieme royaume fut celui d’Assyrie, fondé l’an 2806 du monde, 1229 avant Jesus-Christ, par Sémiramis. On ne connoît aucun de ses successeurs jusqu’à Phul après la mort de qui Babylone fut détachée de cet état l’an 3288 du monde, 747 avant Jesus-Christ, pour former un nouveau royaume. Celui d’Assyrie subsista avec beaucoup d’éclat jusqu’à l’an 3409 du monde, 626 ans avant Jesus-Christ.

L’onzieme royaume est celui de Lydie, au-moins à prendre son commencement au tems où il est connu. Il y eut des rois de Lydie, comme le dit Hérodote, avant Argon ; mais celui-ci est le premier de la famille d’Hercule. Il commença à regner l’an 2817 du monde, 1218 avant Jesus-Christ. Après sa famille qui regna 505 ans, Gygès commença une nouvelle dynastie l’an 3322 du monde, 713 avant Jesus-Christ ; & Crésus, le dernier de ses descendans, fut défait & pris par Cyrus, roi des Perses, l’an 3491 du monde, 544 ans avant Jesus-Christ.

Le douzieme royaume est celui des descendans d’Hercule à Corinthe, lorsqu’Aletes se rendit maître de cette ville l’an 2905 du monde, & 1130 avant Jesus-Christ. Ce royaume subsista 323 ans, & fut ensuite gouverné par des magistrats appellés prytanés ; mais l’an 3377 du monde, 658 avant Jesus-Christ, Cypsele s’empara de l’autorité souveraine, & après lui son fils Périander, qui ne mourut que l’an 3451 du monde, 584 avant Jesus-Christ.

Le treizieme royaume est celui des descendans d’Hercule à Lacédémone ou Sparte. Il fut fondé la même année que celui de Corinthe par Aristomede, qui laissa deux enfans, nommés Eurysthene & Proclès, entre qui l’autorité royale fut partagée, ce qui eut lieu aussi pour leurs descendans.

Le royaume des Hébreux commença l’an du monde 2940, 1095 avant Jesus-Christ, par Saül, qui eut pour successeur David, puis Salomon ; après lequel ce royaume fut partagé en deux souverainetés ; l’une appellée le royaume de Juda, qui eut pour premier roi Roboam, & pour dernier roi Sédécias, vaincu par Nabuchodonozor, roi de Babylone, l’an 3447 du monde & 588 avant Jesus-Christ ; & l’autre le royaume d’Israël, dont Jéroboam fut le premier roi, & Osée le dernier qui fut détrôné par Salmanazar, roi d’Assyrie, l’an 3314 du monde & 721 avant Jesus. Christ.

Le quatorzieme royaume a été celui de Damas, qui fut fondé l’an 2991 du monde, 1044 avant Jesus-Christ, par Rasin, Restin ou Réson, général des troupes d’Adar-Eser, ou Hadadézer ou Hadarhézer, lorsqu’il vit son maître défait par David. Ses successeurs furent presque toujours en guerre avec les rois d’Israël : il n’y eut que le dernier, nommé aussi Rasin ou Retsin, qui s’allia avec Phacée pour faire le siege de Jérusalem, qu’il fut contraint de lever. Il fut défait & tué, & son royaume détruit par Téglatphalasar, Tiglath-Pilnéséer, Tiglath-Piléser ou Tiglath-Péléser, roi d’Assyrie, l’an 3295 du monde, 740 avant Jesus-Christ.

Le quinzieme royaume a été celui de Macédoine, commencé par Caranus, l’un des descendans d’Hercule, l’an du monde 3221, & 814 avant Jesus-Christ. Il a duré 490 ans jusqu’à la mort d’Alexandre le grand, qui établit la monarchie des Grecs, & qui mourut l’an 3710 du monde & 325 avant Jesus-Christ.

Le seizieme royaume a été celui des Romains, qui commença l’année de la fondation de Rome la 3282 du monde, & 753 avant la naissance de Jesus-Christ. Romulus en fut le premier roi, & Tarquin le superbe le septieme & le dernier, qui fut chassé l’an du monde 3526, de la fondation de Rome le 245, & 509 avant Jesus-Christ.

Le dix-septieme royaume est celui de Babylone, qui fut fondé l’an 3288 du monde, 747 avant Jesus-Christ, par Nabonassar. Il ne dura que 67 ans sous dix rois, & il fut réuni au royaume d’Assyrie, dont il avoit été détaché l’an 3355 du monde, 680 avant Jesus-Christ.

Le dix-huitieme royaume est celui des Medes, qui fut fondé l’an 3326 du monde, 729 avant Jesus-Christ, par Déjocès, & que Cyrus détruisit l’an 3476 du monde, 559 avant Jesus-Christ. Ce royaume est célebre dans l’histoire ; il y en a qui se conformant à Ctésias, le font commencer bien plutôt.

Le dix-neuvieme royaume est celui des Chaldéens, qui fut fondé par Nabopolassur ou Nabuchodonosor I. l’an 3410 du monde, 625 avant Jesus-Christ. On y compte cinq rois, qui regnerent 87 ans. Le dernier est Nabonnade ou Darius le Mede, qui fut défait par Cyrus l’an 3497 du monde, 538 avant Jesus-Christ.

Le vingtieme royaume est celui des Perses, qui passa d’Archaménidès & de Cambyses à Cyrus l’an du monde 3476, & 559 avant Jesus-Christ, & dura jusqu’à Darius, qui fut tué l’an du monde 3705. & 317 avant Jesus-Christ.

Le vingt-unieme royaume, & le second de Macédoine fondé par Antipater, qui usurpa la couronne après la mort d’Alexandre le grand, & qui la laissa à son fils Cassander l’an du monde 3718 & 317 avant Jesus-Christ. Ce royaume fut éteint dans Persée, qui fut vaincu par les Romains l’an du monde 3867, & le 168 avant Jesus-Christ.

Le vingt-deuxieme royaume est celui d’Egypte, commencé par Ptolémée, fils de Lagus, l’un des successeurs d’Alexandre le grand l’an du monde 3712, & 323 avant Jesus-Christ. Il dura jusqu’à la reine Cleopatre II. maîtresse de Marc-Antoine, qui se donna la mort après la bataille d’Actium l’an du monde 4005, & le 30 avant Jesus-Christ.

Le vingt-troisieme royaume a été celui de Syrie, dont le premier roi fut Séleucus Nicator, l’un des chefs successeurs d’Alexandre, l’an du monde 3723, & 312 avant Jesus-Christ. Il dura jusqu’à Antiochus l’asiatique, fils d’Antiochus le pieux & de Sélene. Ce prince en fut privé par Pompée l’an du monde 3970, & 65 avant Jesus-Christ.

Le vingt-quatrieme royaume a été celui de Pergame dans la grande Phrygie, qui commença l’an du monde 3752, & 283 avant Jesus-Christ, par l’eunuque Philétere, & dura jusqu’à Attale III. surnommé Philométor. Celui-ci mourant sans enfans l’an du monde 3902, & 133 avant Jesus-Christ, institua le peuple romain pour héritier & successeur de sa couronne.

Nous ne parlerons point ici des royaumes du Bosphore, du Pont en Asie, de Cappadoce, de Bithynie, d’Arménie, des Bactriens, des Indiens, des Scythes ou Massagetes, & autres semblables, parce qu’on ne connoît point l’établissement de ces monarchies, ni la succession de leurs rois. (D. J.)

Royaumes du monde, (Hist. mod.) les royaumes célebres qui se sont établis dans le monde depuis la naissance de Jesus-Christ font un point d’histoire trop étendu pour entrer dans ce détail ; c’est assez de dire que tous les états nommés royaumes en Asie, en Europe, en Afrique & en Amérique ont éprouvé différentes révolutions dans ce long intervalle de tems.

Ainsi dans l’ancien royaume de la Chine, les Tartares se rendirent maîtres de ce vaste empire l’an 1279 ; les Chinois les en chasserent l’an 1369 ; mais en 1644, les Tartares soumirent de nouveau l’empire de la Chine. Alors Xunchi en fut déclaré roi, & c’est un de ses descendans qui le gouverne aujourd’hui.

Le Japon n’obéit qu’à un seul souverain depuis l’an 1550, & le dairo ou chef de la religion n’a plus en partage que de vaines marques de son ancienne autorité.

L’Inde contient plusieurs royaumes, dont l’histoire n’est point connue. On dit que les mogols sortis de la Tartarie établirent l’empire de ce nom vers l’an 1401, & que ce fut un fils de Tamerlan qui en fut le premier empereur. Le plus puissant des royaumes de l’Inde au-de là du golphe est celui de Siam, de qui la plûpart des autres sont tributaires. Dans la presqu’île de l’Inde au-deçà du golfe sont les royaumes d’Orixa, de Golconde, de Narsingue, de Décan, de Balaguate, de Bisnagar, &c. qui obéissent à divers souverains, & qui changent souvent de maître. L’histoire de tous ces divers états est ensevelie dans l’oubli jusqu’au tems que les Portugais, succédés par les Hollandois, se sont établis dans l’Inde.

La Perse obéit aux sophis depuis l’an 1500 de Jesus-Christ ; mais ces sophis ont été différens conquérans, qui tour-à-tour ont usurpé & ravagé ce vaste pays.

L’Arabie reçut la loi de Mahomet vers l’an 625 ; depuis ce tems-là, les Arabes mahométans se nommerent Sarasins, & eurent des rois puissans, qui néanmoins furent soumis par les Turcs, & par les sophis dans le xij. siecle.

La Turquie en Asie comprend le Curdistan, l’Yerac, le Diarbek, la Sourie, l’Anatolie, l’Armenie & la Georgie, qui répondent à-peu-près à ce que les anciens appelloient la Babylonie, la Mésopotamie, la Syrie, l’Asie mineure, la Colchide, &c. Othoman vers l’an 1300 commença cet empire, & l’augmenta par ses conquêtes. L’empire de Trébisonde, établi par Alexis Comnene en 1204, passa dans les mains de Mahomet II. l’an 1461.

La Turquie en Europe est divisée par le Danube en méridionale & septentrionale. Le grand-seigneur est le maître de la méridionale, & les trois principautés de la septentrionale sont ses tributaires.

Je ne parcourrai point les royaumes de l’Europe, parce que chacun d’eux a son article séparé dans ce Dictionnaire.

Les principales parties de l’Afrique sont l’Egypte, l’Abyssinie, le Monomotapa, le Congo, la Guinée, la Nigritie, le Bilédulgérid & la Barbarie. L’histoire de tous ces pays & de leurs états nous est inconnue.

Nous ne sommes pas mieux instruits des anciens royaumes qui ont subsisté en Amérique jusqu’à la découverte de cette partie du monde, où les puissances maritimes ont aujourd’hui établi leur domination. (D. J.)