L’Encyclopédie/1re édition/ROGIANO

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ROGIANO, (Géog. mod.) bourg d’Italie, dans la Calabre citérieure, sur la rive droite de l’Isauro, à quelques milles de Cosenza. On prétend que c’est la ville Vergæ des Brutiens.

Quoi qu’il en soit, c’est un bourg illustré par la naissance de Jean-Vincent Gravina, célebre jurisconsulte d’Italie, mort en 1718, âgé de 54 ans. Il a enrichi le public de ses productions en italien & en latin ; mais on estime sur-tout ses Originum juris civilis libri tres, quibus accessit de romano imperio liber singularis. Lipsiæ 1717. 2. tom. in-4°. On fait aussi beaucoup de cas de son specimen prisci juris, c’est-à-dire image de l’ancien droit.

L’auteur, après avoir marqué dans ce dernier ouvrage, l’origine de l’autorité souveraine, qui est le consentement des particuliers, & qui doit par conséquent avoir pour but leur bonheur, il décide que lorsque le pouvoir souverain se détourne de ce but, & cherche à établir les avantages d’un seul, ou de plusieurs, aux dépens du bonheur public, comme cela ne se peut faire qu’au préjudice des particuliers, le pouvoir souverain revient à sa source, & chacun rentre dans ses droits, parce que le consentement des particuliers sur lequel ce pouvoir est fondé, est absolument éloigné de la tyrannie ; il résulte de là, selon lui, qu’il est permis d’arracher la république des mains d’un tyran, pour empêcher que les biens des peuples ne soient sacrifiés aux débordemens d’un pouvoir injuste ; car, continue-t-il, la liberté est une chose sainte, sacrée, & de droit divin ; Dieu l’ayant si intimement unie à l’essence de la nature humaine, qu’on ne peut l’attaquer sans injustice, la forcer sans impiété, s’en rendre maître sans crime ; ut eam tentare scelus sit, impium circumvenire, occupare nefarium. Il faut que M. Gravina ait été bien hardi pour tenir à Rome un langage aussi fort sur la liberté, que celui qu’on tient dans les pays où elle regne le plus. On trouvera d’autres détails sur cet écrivain dans le Giornale de litterati, tom. XXXIV. (D. J.)