L’Encyclopédie/1re édition/RAMOLLISSANT
RAMOLLISSANT, adj. terme de Chirurgie concernant la matiere médicale externe, c’est la même chose qu’émollient. On donne ce nom à tous les médicamens qui ont la vertu de rendre la souplesse aux parties solides trop tendues, & de redonner de la fluidité aux liqueurs épaissies. Les liquides forment, par la lenteur de leur circulation, ou par leur stagnation, deux especes de tumeurs, des douloureuses, & des indolentes ; il y a des émolliens qui agissent dans le premier cas, en calmant la douleur, ce sont des émolliens anodyns ; on en emploie d’autres dans le second cas ; on les appelle émolliens résolutifs, parce qu’ils ont la vertu de résoudre les fluides épaissis. Il y en a qui agissent principalement sur les solides trop tendus, ce sont des émolliens relâchans.
La premiere classe d’émolliens que nous disons être anodyns, sont des remedes remplis de mucilages aqueux & adoucissans, dont les particules s’attachent aisément aux vaisseaux, assouplissent leurs fibres, & les rendent moins susceptibles d’agacement & d’irritation. A l’aide de la chaleur qu’on donne à ces médicamens, leurs parties déliées s’insinuent dans les pores, raréfient insensiblement les humeurs, & leur font reprendre les voies ordinaires. Tels sont l’eau tiede, le lait, l’althea, la mauve, la pariétaire, le bouillon blanc, le violier, les semences de lin, de fenugrec, de psyllium, &c. Ils conviennent en fomentations & en cataplasmes dans les engorgemens inflammatoires.
La seconde classe d’émolliens est composée de médicamens qui unissent la vertu résolutive à l’émolliente ; ils contiennent des parties actives, qui donnent un peu de ressort aux vaisseaux, & qui les font agir sur les liqueurs stagnantes ; la résolution se fait, si ces liqueurs ont assez de fluidité pour obéir à cette action : & dans le cas contraire les vaisseaux se brisent sur les fluides épaissis, & il en résulte une suppuration, ou purulente, ou putride, suivant la nature de l’humeur qu’on a mise en dissolution dans le lieu de sa stagnation, en excitant à faux le jeu des vaisseaux. Les médicamens émolliens, résolutifs, ou maturatifs, tirent principalement des matieres gommeuses, telles que le galbanum, l’opopanax, le sagapenum, la gomme ammoniaque. Les quatre farines résolutives, les fleurs de camomille & de mélilot réduites en poudre, servent aussi à faire des cataplasmes émolliens résolutifs, & les gommes susdites entrent dans la composition d’emplâtres, qu’on met avec succès sur des tumeurs dures, dont on a calmé l’inflammation précédente, avec les cataplasmes émolliens anodyns, & qui ont ensuite été prédisposées par les cataplasmes émolliens résolutifs. Les emplâtres de vigo, de savon, de ciguë, de diabotanum, de diachylon gommé, sont propres à fondre les tumeurs rénitentes. Voyez Rénitente.
Les émolliens relâchans, ou chalastiques, doivent produire dans les fibres un changement, par lequel elles deviennent plus alongées sans se rompre. Il suffit pour cet effet, que des particules lubrifiantes s’insinuent entre les solides & les assouplissent. Les émolliens des deux premieres classes ont cette vertu, mais elle réside éminemment dans les remedes onctueux, tels que le beurre, les huiles de lys, de lin, d’amandes douces, les graisses de différens animaux, & leurs moëlles. Les composés sont l’onguent d’althea, de populeum, les huiles de chien, de vers, l’emplâtre de mucilages, celui de diachylon simple, &c. Ces remedes gras ne conviennent point sur les parties enflammées ; ils deviendroient stimulans & suppuratifs ; mais on les employera avec succès sur la peau saine du ventre, pour remédier à l’inflammation des parties internes, comme dans le cas des hernies avec étranglement, de disposition inflammatoire des intestins, pour ramollir les articulations qui ne jouent pas, à cause de la sécheresse ou de la roideur des muscles & des liqueurs, &c. Voyez dans le second tome du recueil des pieces qui ont concouru pour le prix de l’académie royale de Chirurgie, plusieurs mémoires sur les remedes émolliens. (Y)