L’Encyclopédie/1re édition/QUINAIRE

QUINAIRE, s. m. (Art numismat.) Le nom de quinaire n’appartient à proprement parler qu’à une petite monnoie d’argent qui étoit du poids de demi-gros, valoit la moitié du denier, & le double du sesterce. Mais les antiquaires ont à-présent coutume d’appeller abusivement quinaires les médailles du plus petit module, de quelque métal que ce soit, en or, argent, bronze, ou autre, quoique les anciens n’aient jamais donné ce nom aux petites pieces d’or ou de bronze.

Des curieux, comme M. le duc du Maine, & M. l’abbé Strozzi, ont songé à former une suite de quinaires ; & il seroit à souhaiter qu’on eût un catalogue de ce genre de médailles, précédé d’une bonne dissertation sur les changemens arrivés dans le poids, dans la valeur, & dans le nom des plus petites pieces des monnoies que les anciens aient frappées en tous métaux.

M. Geinoz a observé un quinaire remarquable qui représente d’un côté la tête d’Auguste, & de l’autre celle de Marc-Antoine. Ce quinaire est frappé sur un morceau d’argent ou sur un flan, comme disent nos monétaires. Il y a deux fautes dans les légendes ; la premiere n’est que dans la ponctuation, c’est du côte qui représente la tête de Marc-Antoine : on y lit, Marc. Anton. Imp. III. Vi. R. R. L. C. Aug. La lettre R. la troisieme du mot Vir, est séparée des deux premieres par un gros point. La seconde faute se trouve dans la légende qu’on lit au-tour de la tête d’Auguste, Cæsar Imp. Pont. III Vir R. C. Il est visible qu’il falloit R. P. C. qu’on explique ordinairement par Reipublicæ Constituendæ. Cependant si la médaille étoit restée avec cette imperfection, il se seroit sans doute rencontré plusieurs antiquaires qui n’auroient pas manqué de raisons pour nous prouver que cette suppression étoit faite à dessein. En tout cas, le monétaire a levé la difficulté, en ajoutant après-coup le P. dans l’interligne, comme nous avons coutume de faire lorsque nous voulons suppléer une lettre obmise en écrivant. Ce P. est d’une plus petite forme que les autres lettres de la légende ; il est aussi plus élevé, n’ayant pu trouver place entre l’R. & le C. qui se touchent.

J’ai dit ci-dessus qu’il seroit à desirer qu’on eût un catalogue de tous les quinaires connus ; j’ajoute ici qu’une suite de quinaires seroit presque aussi nécessaire dans les cabinets que les suites de grands, de moyens & de petits bronzes. Ce sont de part & d’autre de différentes pieces de monnoie qui nous apprennent combien il y avoit de sortes de pieces en tout métal qui courent dans le commerce. De plus, les quinaires sont communément d’un coin plus fini que les autres médailles, & travaillés par des mains de maîtres. Il auroit été très-difficile à des ouvriers ordinaires de graver des figures entieres dans un si petit espace de métal. Enfin, par le peu de quinaires que nous connoissons exister dans les cabinets, il est aisé de conjecturer que l’on y verroit plusieurs revers qui leur seroient particuliers, & qui ne se trouveroient ni dans le grand, ni dans le moyen bronze.

Au reste, il est bon d’observer que le mot quinaire ainsi que celui de sesterce, ne fut plus en usage dans le tems du bas empire. (D. J.)