L’Encyclopédie/1re édition/PIACHES

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PIACHES, s. m. (Hist. mod. culte.) nom sous lequel les Indiens de la côte de Cumana en Amérique désignoient leurs prêtres. Ils étoient non-seulement les ministres de la religion, mais encore ils exerçoient la Médecine, & ils aidoient les Caciques de leurs conseils dans toutes leurs entreprises. Pour être admis dans l’ordre des piaches, il falloit passer par une espece de noviciat, qui consistoit à errer pendant deux ans dans les forêts, ou ils persuadoient au peuple qu’ils recevoient des instructions de certains esprits qui prenoient une forme humaine pour leur enseigner leurs devoirs & les dogmes de leur religion. Leurs principales divinités étoient le soleil & la lune, qu’ils assuroient être le mari & la femme. Ils regardoient les éclairs & le tonnerre comme des signes sensibles de la colere du soleil. Pendant les éclipses, on se privoit de toute nourriture ; les femmes se tiroient du sang & s’égratignoient les bras, parce qu’elles croioient que la lune étoit en querelle avec son mari. Les prêtres montroient au peuple une croix, semblable à celle de S. André, que l’on regardoit comme préservatif contre les fantômes. La médecine qu’exerçoient les piaches consistoit à donner aux malades quelques herbes & racines, à les frotter avec le sang & la graisse des animaux, & pour les douleurs ils scarifioient la partie affligée, & la suçoient long-tems pour en tirer les humeurs. Ces prêtres se mêloient aussi de prédire, & il s’est trouvé des Espagnols assez ignorans pour ajouter foi à leurs prédictions. Les piaches, ainsi que bien d’autres prêtres, savoient mettre à profit les erreurs des peuples, & se faisoient payer chérement leurs services. Ils tenoient le premier rang dans les festins ou ils s’enivroient sans difficulté. Ils n’avoient aucune idée d’une vie à venir. On bruloit les corps des grands un an après leur mort, & les échos passoient pour les réponses des ombres.