L’Encyclopédie/1re édition/PHILIPPE

PHILIPPE, (Médailles.) médaille & monnoie de Philippe, roi de Macédoine. On donne sur-tout ce nom aux monnoies d’or & d’argent de ce prince. Les philippes d’or étoient célebres dans l’antiquité, parce que c’étoit une fort belle monnoie & d’excellent or. Snellius, dans son livre de re nummariâ, parle d’un philippe qui pesoit 179 grains d’Hollande. Il y en a parmi les médailles du roi qui pesent 158 grains, & nos grains sont plus pesans que ceux de Hollande, dont Snellius se servoit ; les 179 grains d’Hollande reviennent à 160 de France, & à 154 d’Angleterre. Il y a aussi des philippes d’argent & des philippes de bronze. (D. J.)

Philippe, saint, (Géog. mod.) forteresse de l’île de Minorque, au-dessus de Port-Mahon, sur un rocher près de la côte. Les rois d’Espagne l’avoient fait bâtir dans le siecle dernier pour la défense de cette île, dont les Anglois s’emparerent en 1708 ; les François leur ont enlevé le fort & l’île en 1757, mais la paix leur rendra cette île.

Philippe, (Monnoie.) ou philippus, monnoie d’or de Flandres, d’un titre assez bas. On la nomme rider en Allemand.

Il y a eu aussi des philippus d’argent qui pesent près de six deniers plus que les écus de France, de neuf au marc, mais qui ne prennent de fin que neuf deniers vingt grains.

Les philippus d’Espagne, qui ont eu un grand cours en plusieurs villes d’Allemagne, où on les appelloit philippe-thaler, particulierement à Francfort & à Nuremberg, s’y recevoient sur le pié de cent creutzers communs, ou de 82 creutzers de change : c’est ordinairement sur cette espece de monnoie que se réduisoient & s’évaluoient les payemens au commencement de ce siecle. (D. J.)

Philippes, bataille de, (Hist. rom.) cette bataille se donna l’an 712 de Rome sur la fin de l’automne. Brutus & Cassius les derniers Romains y périrent, & leurs troupes furent entierement défaites par celles d’Octavien. Cette ville de Philippes étoit de Phthiotide, petite province de Thessalie ; & c’est une chose assez remarquable, que la bataille de Pharsale & celle de Philippes qui porta le dernier coup à la liberté des Romains, se soient données dans le même pays & dans les mêmes plaines.

Philippes, (Géog. anc.) en latin Philippi, ville de la Macédoine, selon quelques-uns, & de la Thrace, selon le plus grand nombre, entre le Strymon & le Nestus ou Nessus, assez proche de la mer. Pline, l. IV. c. xj. Pomponius Mela, l. II. c. ij. & d’autres anciens Géographes ont eu raison de mettre Philippi dans la Thrace, parce qu’elle étoit à notre égard au-delà du fleuve Strymon qui sépare la Macédoine proprement dite, d’avec la Thrace.

Avant que Philippe la fortifiât, elle se nommoit Dathos, & auparavant encore on la nommoit Crénides, selon Appien, civil. l. IV. p. 650, qui nous apprend qu’elle étoit située sur une colline escarpée, dont elle occupoit tout le sommet. Les Romains y établirent une colonie. Le titre de colonie lui est donné dans les Actes des apôtres, c. xvj. vers. 12. & dans Pline, l. IV. c. xj. de même dans plusieurs médailles. Aujourd’hui cette ville s’appelle Philippigi, & conserve encore quelques restes d’antiquités.

Elle est célebre à d’autres égards, & particulierement dans le Christianisme par l’épître que S. Paul adressa à ses habitans. Elle est encore bien mémorable dans l’histoire par la bataille qui s’y donna l’an de Rome 712, & qui fut fatale à Brutus & à Cassius, cum fracta virtus, & minaces turpe solum tetigere mento, dit Horace ; cette bataille où la valeur même fut contrainte de céder à la force. Cassius périt dans cette malheureuse journée, & Brutus s’y donna la mort, desespérant trop-tôt du salut de sa patrie.

Comme l’occasion se présentera de peindre ailleurs le caractere de Brutus, je me contenterai de rapporter ici ce que César en augura dans la conjoncture suivante. Le roi Déjotarus eut une grande affaire à Rome, dont personne n’osoit entreprendre la défense ; Brutus s’en chargea, & César l’ayant entendu plaider cette cause dont il étoit juge, dit en se retournant vers ses amis : « Il est de la derniere importance d’examiner si ce que cet homme-là veut est juste ou non, car ce qu’il veut, il le veut bien fort ». Le roi de la petite Arménie n’oublia jamais le service de Brutus ; il se déclara hautement en sa faveur aptes l’assassinat de César, mais malheureusement pour Brutus, ce prince ne survécut guere lui-même à cet événement. (D. J.)