L’Encyclopédie/1re édition/PHARÈS

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PHARÈS, (Géog. anc.) ville d’Achaïe, où Mercure & Vesta avoient conjointement un oracle célebre. Auguste réunit cette ville au domaine de Patra ; voici ce qu’en dit Pausanias.

On compte de Pharès à Patra, environ cent cinquante stades, & de la mer au continent, on en compte environ soixante-dix. Le fleuve Piérus passe fort près des murs de Pharès ; c’est le même qui baigne les ruines d’Olene, & qui est appellé Piérus du côté de la mer. On voit sur ses rives comme une forêt de platanes, vieux, creux pour la plûpart, & en même tems d’une si prodigieuse grosseur, que plusieurs personnes y peuvent manger & dormir comme dans un antre.

La place publique de Pharès, continue Pausanias, est bâtie à l’antique, & son circuit est fort grand. Au milieu vous voyez un Mercure de marbre qui a une grande barbe ; c’est une statue de médiocre grandeur, de figure quarrée, qui est debout à terre, sans piédestal. L’inscription porte que cette statue a été posée par-là par Simylus Messénien, & que c’est Mercure Agoreus, ou le dieu du marché : on dit que ce dieu rend là des oracles.

Immédiatement devant sa statue, il y a une Vesta qui est aussi de marbre ; la déesse est environnée de lampes de bronze, attachées les unes aux autres, & soudées avec du plomb. Celui qui veut consulter l’oracle, fait premierement sa priere à Vesta, il l’encense, il verse de l’huile dans toutes les lampes & les allume, puis s’avançant vers l’autel, il met dans la main droite de la statue une petite piece de cuivre, c’est la monnoie du pays ; ensuite il s’approche du dieu, & lui fait à l’oreille telle question qu’il lui plaît. Après toutes ces cérémonies, il sort de la place en se bouchant les oreilles avec les mains ; dès qu’il est dehors, il écoute les passans, & la premiere parole qu’il entend, lui tient lieu d’oracle ; la même chose se pratique chez les Egyptiens dans le temple d’Apis.

Une autre curiosité de la ville de Pharès, c’est un vivier que l’on nomme hama, & qui est consacré à Mercure avec tous les poissons qui sont dedans, c’est pourquoi on ne le pêche jamais. Près de la statue du dieu, il y a une trentaine de grosses pierres quarrées, dont chacune est honorée par les habitans sous le nom de quelque divinité ; ce qui n’est pas fort surprenant, car anciennement les Grecs rendoient à des pierres toutes brutes les mêmes honneurs qu’ils ont rendus depuis aux statues des dieux.

A quinze stades de la ville, les Dioscures ont un bois sacré tout planté de lauriers ; on n’y voit ni temples, ni statues ; mais si l’on en croit les habitans, il y a eu autrefois dans ce lieu nombre de statues qui ont été transportées à Rome ; présentement il n’y reste qu’un autel qui est bâti de très-belles pierres. Au reste, je n’ai pû savoir si c’est Pharès, fils de Philodamie, & petit-fils de Danaüs, qui a bâti la ville de Pharès, ou si c’en est un autre ; ce récit de Pausanias contient bien des choses curieuses, entre lesquelles il faut mettre l’oracle singulier de cette ville. (D. J.)