L’Encyclopédie/1re édition/PESENAS

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PESENAS, (Géog. mod.) ville de France, au bas Languedoc, dans le diocèse d’Agde. Elle est dans une situation charmante, sur la Peyne, à 4 lieues N. E. de Beziers, 8 de Montpellier, 3 N. d’Agde, 160 S. de Paris. Long. 21. 5. Latit. 43. 26.

Pesenas est une ville fort ancienne, puisque Pline, 1. 48. c. 8. en fait mention ; il la nomme Piscenæ, & il loue la laine des environs, la teinture qu’on lui donnoit, & les étoffes durables qu’on en faisoit. Saint Louis acquit cette ville en 1261 de deux seigneurs qui en étoient co-propriétaires, & il l’unit au domaine royal ; c’étoit une châtellenie que le roi Jean érigea en comté l’an 1361, en faveur de Charles d’Artois ; ce comté entra par la suite des tems dans la maison de Montmorenci, vint à M. le prince de Condé, & enfin est échu en partage aux princes de Conti.

C’est à Pesenas que le poëte Sarrazin (Jean-François) mourut de douleur en 1664, pour s’être mêlé d’une affaire qui n’avoit pas réussi. Il étoit né à Hermanville près de Caën en 1605, & devint secretaire du prince de Conti. Un jour le maire & les echevins d’une ville étant venus pour complimenter ce prince, l’orateur resta court à la seconde période, sans pouvoir continuer son compliment. Sarrasin saute aussitôt du carrosse où il étoit avec S. A. se joint au harangueur, & poursuit la harangue, l’assaisonnant de plaisanteries si fines & si délicates, & y mêlant un stile si original, que le Prince ne put s’empêcher lui-même d’en être extrèmement surpris. Le maire & les échevins remercierent Sarrasin de tout leur cœur, & lui présenterent par reconnoissance le vin de la ville. Ses œuvres en prose & en vers mériteroient d’être réimprimés, parce qu’elles sont pleines d’esprit, de naturel & d’agrémens. Il écrivoit de génie, avec une facilité qui n’étoit égalée que par sa paresse. Dans une ode à M. le prince d’Enguion, il s’excuse de le louer par ces deux vers :

Car je n’ai qu’un filet de voix,
Et ne chante que pour Silvie. (D. J.)