L’Encyclopédie/1re édition/PATRIMOINE

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PATRIMOINE, s. m. (Jurisprud.) se prend quelquefois pour toute sorte de biens ; mais dans sa signification propre il se dit d’un bien de famille : quelquefois même on n’entend par-là que ce qui est venu à quelqu’un par succession ou donation en ligne directe.

Patrimoine du roi, c’est son domaine particulier. Voyez au mot Domaine. (A)

Patrimoine de saint Pierre, (Hist. ecclés. & politiq.) dans le tems de la décadence de l’empire romain, c’est-à-dire, lorsque les Goths, les Ostrogoths, les Lombards, &c. se furent rendus les maîtres de l’Italie, l’Eglise romaine, soit par achat, soit par la générosité des princes & des seigneurs, acquit des terres, non-seulement en Italie, mais encore en Sicile & dans d’autres parties éloignées de l’Europe. L’Eglise de Rome ne posséda point d’abord ces terres à titre de souveraineté, & souvent les empereurs de Constantinople & les rois lombards les confisquoient, comme ils auroient pû faire les biens de leurs sujets, lorsqu’ils étoient mécontens de la conduite des papes. Ces biens que possédoit l’Eglise furent appellés le patrimoine de saint Pierre ; ils furent dans la suite considérablement augmentés par les bienfaits de Pepin, roi de France, qui après avoir vaincu les Lombards, donna au souverain pontife l’exarchat de Ravenne, dont l’empire d’orient avoit été dépouillé depuis peu de tems. Charlemagne, après avoir détruit la domination des Lombards en Italie, enchérit encore sur les bienfaits de son pere Pepin ; il donna au pape plusieurs villes & provinces, qui font aujourd’hui, avec la ville de Rome dont les papes se sont peu-à-peu rendus les maîtres, ce que l’on appelle l’état de l’Eglise, où le pontife exerce l’autorité souveraine. Il est vrai que les Ultramontains, c. à. d. les flateurs & les partisans outrés du pouvoir du S. siege font remonter son indépendance beaucoup plus haut, & prétendent que les terres soumises à l’Eglise lui appartiennent en vertu de la fameuse donation de Constantin, par laquelle ce prince, en recevant le baptême, donna en 324 au pape Silvestre la souveraineté de Rome & de toutes les provinces qui composent l’état de l’Eglise en Italie. Actuellement la saine critique n’ajoute aucune foi à cette prétendue donation de Constantin ; & pour sentir que cette piece est supposée, on n’a qu’à faire attention que Constantin ne fut point baptisé à Rome ; qu’en 324 il étoit à Thessalonique ; & que d’ailleurs les différentes copies que l’on montre de sa donation ne sont rien moins que conformes les unes aux autres. On conserve dans la bibliotheque du Vatican une copie de cette donation, qui differe grandement de celle que le moine Gratien a rapportée. Voyez Giannone, Hist. de Naples.

Patrimoine de S. Pierre, le (Géog. mod.) province d’Italie, dans les états du pape, d’environ 14 lieues de long sur 12 de large. Elle est bornée N. par l’Orviétan & l’Ombrie, & par la Sabine & la campagne de Rome ; S. par la mer ; O. par le duché de Castro & par la mer. Elle renferme, outre le patrimoine particulier, le duché de Bracciano, & l’état de Ronciglione. Viterbe en est la capitale. Cette province est fertile en blé, en vin & en alun.