L’Encyclopédie/1re édition/PÉTROL

PÉTROL, s. m. (Hist. nat. des huiles minér.) on disoit auparavant pétréol ; en italien petroglio, en anglois petroly ou rock-oil. Huile minérale, subtile, inflammable, d’une odeur forte de bitume, & de différente couleur.

Les hommes rapportent tout assez volontiers à leurs goûts, ou à leurs passions. Il y a peu de nos dames qui ignorent la cause à laquelle Rousseau attribue la mort de l’amoureux fils d’Alcmene, & peut-être pensent-elles comme ce poëte. Pour moi qui ne songe qu’à la nature du pétrol, & qui suis rempli des détails qu’en racontent divers auteurs ; je m’imagine avec quelques-uns d’eux, que la robe fatale qu’on supposoit teinte du sang de Nessus, & que Déjanire envoya ensuite à Hercule, de même que celle que Médée envoya à Glaucé, causerent la mort du ravisseur d’Iole, & de la fille de Créon, parce que ces deux robes avoient été trempées dans le pétrol, qu’on trouvoit aux environs de Babylone.

Ce pétrol ou ce naphte de Babylone, étoit d’une nature si subtile, qu’il s’enflammoit dès qu’on l’approchoit du feu, & l’on ne pouvoit l’éteindre qu’en étouffant ce feu avec de la boue, du vinaigre, de l’alun & de la glu : Alexandre en fit l’expérience sur un jeune garçon, qu’on eut bien de la peine à sauver. Ces faits qu’on lit dans l’histoire, m’ont conduit à rechercher avec avidité les observations de nos meilleurs physiciens sur ce bitume liquide.

Les noms du pétrol chez les anciens. Le nom de naphte que porte le pétrol, dérive du chaldéen noph, découler, parce qu’il découle & dégoute des rochers, tantôt plus liquide, & tantôt moins ; le prophete Daniel ch iij v. 46. dit que l’on alluma la fournaise où l’on devoit jetter Misack, Sidrack & Abdenage, avec du naphte, de la poix & d’autres matieres combustibles ; mais le naphte dont il s’agit ici, est le pissasphalte ou le bitume de Judée. De même, quand il est dit dans la genèse, ch. xj. v. 3, que les murs de la tour de Babel étoient liés avec un mortier où il entroit beaucoup de naphte ; ce mot désigne du pissasphalte, espece de bitume qui mêlé avec le limon argilleux, fait un ciment pour joindre les pierres des murailles, lequel tient lieu de celui que l’on fait avec la chaux. C’est avec ce ciment que Vitruve pense que les murs de Babylone ont été bâtis ; cependant les Babyloniens nommoient proprement naphte une huile blanche, ou noire, qui découloit de quelques fontaines auprès de Babylone.

Les Grecs appelloient communément le naphte, πετρέλαιον, c’est-à-dire huile de pierre ; d’autres simplement huile, ou huile par excellence, & quelques-uns ἔλαιον Μηδείας, huile de Médée, ce qui justifie ma conjecture sur la mort de Créuse ; les Latins disoient petroleum par syncope, parce qu’elle découle des roches. Nicolas Myrepse le nomme μύρον τοῦ ἁγίου Βαρβάρου, huile de sainte Barbe, d’autres, huile de sainte Catherine & huile sainte, quelques-uns enfin νάφθα, ἄφθα, du verbe τοῦ ἅπτεσθαι, qui signifie être allumé. Saint Ambroise tire l’origine du mot naphte, de σνάπτειν, attacher, lier, joindre, parce que le naphte, dit-il, colle, joint, unit ; mais cela n’est vrai que du pissasphalte, & l’étymologie chaldéenne de naphte paroît la seule bonne.

Ses noms dans nos auteurs modernes. Nos naturalistes modernes nomment l’huile de pétrol, naphta, naphta alba, & nigra, Kempf. Amoen. 274. petroleum, oleum petræ ; bitumen liquidum oleo simile, quod innatat lacubus. Kentm. 20.

Le pétrol est une huile naturelle. Outre ces huiles artificielles & végétales, c’est-à-dire tirées des plantes par expression, il y en a de naturelles & de minérales, qui sortent d’elles-mêmes des entrailles de la terre. On les appelle en général, huiles de pétrol, parce qu’elles sortent de quelques fentes de pierres. Le pétrol est donc un bitume liquide qui ne differe que par sa liquidité des bitumes solides, tels que l’asphaltum ou le bitume de Judée, l’ambre ; le jayet, &c. Il est de différentes couleurs, blanc, jaune, roux, verd, noirâtre, suivant les lieux qui le produisent.

On en trouve aux Indes, en Asie, en Perse, &c. Il y a quelques pays chauds des Indes & de l’Asie qui fournissent du pétrol. Dans l’île de Sumatra, on en recueille une espece très-célébre, fort estimée, & on l’appelle miniar-tannah, qui signifie huile de terre. L’on en tire une grande quantité de certaines sources qui sont près de Hit en Chaldée, selon Edrissi. On en trouve aussi dans les montagnes de Farganah dans la province de Transoxane, selon Ebu Hancal. Oléarius assure qu’il en a vû plusieurs sources auprès de Scamachie en Perse, aujourd’hui Schirvan, ville renversée de fond en comble par un horrible tremblement de terre.

Nous ne voyons point en Europe aucun des pétrols dont nous venons de parler, & nous ne connoissons que ceux de France & d’Italie. Ce dernier pays abonde en huile de pétrol, qui se trouve dans les duchés de Modene, de Parme & de Plaisance.

On tire le pétrol en quantité de différents puits & de plusieurs fontaines dans le duché de Modene, car tout le Modénois paroît rempli de cette huile bitumineuse, mais sur-tout elle abonde auprès du fort de Mont-Baranzon, dans un lieu appellé il Fiumetto. On creuse des puits de 30 ou 40 brasses de profondeur, jusqu’à ce qu’il paroisse une source d’eau mêlée avec de l’huile. Les puits que l’on creuse au bas des collines, fournissent une grande quantité d’huile rousse ; ceux que l’on creuse au haut donnent une huile blanche, mais en moindre quantité. Il y a encore dans le même pays dans une vallée très-stérile du bailliage de Mont-festin, un grand rocher à douze milles de Modene ; du côté du mont Apennin, près du mont Gibbius, d’où découle continuellement une fontaine d’eau, où nage le pétrol ; elle est si abondante, que deux fois la semaine, on en retire environ six livres chaque fois.

On trouve aussi du pétrol en France, mais grossier.

Nous avons aussi en France de l’huile de pétrol dans la Guyenne près du village de Gabian, qui n’est pas éloigné de Beziers, il découle des sentes de certains rochers, une huile noirâtre, mêlée avec de l’eau, que l’on recueille avec soin. On appelle cette huile de pétrol, huile noire de Gabian. On la vend ordinairement pour l’huile de pétrol noire d’Italie, quoiqu’il s’en faille bien qu’elle approche de ses qualités. Elle est d’une consistence moyenne, d’une odeur forte & puante, d’une couleur noire ; elle se contrefait avec de l’huile de térébenthine qu’on colore avec de la poix noire. Elle étoit autrefois assez estimée, & faisoit une partie du revenu de M. l’evêque de Beziers, à qui la roche appartient, & qui la faisoit recueillir, mais à présent il ne s’en fait plus de commerce.

On parle encore d’une fontaine de cette huile, près de Clermont en Auvergne, dans un lieu qu’on appelle le puits de Pége, mais on n’en peut tirer aucun parti. Elle est noire, épaisse, de mauvaise odeur.

Examen du pétrol de Modene. Le seul pétrol recherché est celui d’Italie, & sur-tout du duché de Modene qui est constamment le meilleur ; c’est même un bonheur assez singulier d’en posséder qui soit hors de tout soupçon d’avoir été falsifié, car les drogues rares & peu connues le sont presque toujours. M. Boulduc profita de ce bonheur-là en 1715, pour faire des observations qui appartinssent sûrement aux vrais pétrols, & il a donné ces observations dans l’histoire de l’académie des Sciences de la même année.

Il s’agit dans les observations de M. Boulduc, du pétrol qu’on trouve près du mont Gibbius. Ce fut un médecin de Ferrare nommé François Arioste, qui le découvrit en 1640. On a ménagé dans le lieu avec beaucoup de dépenses, & même de périls, différens canaux, d’où coulent dans de petits réservoirs ou bassins, trois différentes sortes de pétrol.

Le premier est presque aussi blanc, aussi clair & aussi fluide que de l’eau, d’une odeur très-vive, très-pénétrante, & pas désagréable ; c’est le plus parfait. Le second est d’un jaune clair, moins fluide que le blanc, & d’une odeur moins pénétrante. Le troisieme est d’un rouge noirâtre d’une consistence plus parfaite, & d’une odeur de bitume un peu désagréable.

Les Italiens n’envoyent guéres le premier hors de chez eux ; on seroit encore trop heureux qu’ils donnassent le second pur, mais souvent en le mêlant en petite quantité avec le troisieme, & en y ajoutant quelque huile subtile, comme celle de térébenthine, ils donnent le tout pour le premier. L’odeur de ces petrols est si forte & si pénétrante, qu’on dit qu’on s’en apperçoit à un quart de mille de la source. Quoiqu’il en soit, M. Boulduc a fait sur le pétrol de la premiere espece ou blanc, les observations suivantes.

Il s’allume à une bougie dont il ne touche point la flamme, & quand il est échauffé dans un vaisseau, il attire la flamme de la bougie, quoiqu’élevée de plusieurs piés au-dessus du vaisseau, & ensuite se consume entierement, c’est-à-dire qu’une vapeur subtile, qui s’éleve de ce bitume liquide, va jusqu’à la flamme de la bougie, y prend feu, & que le feu qui se communique à toute la sphere de vapeur, gagne jusqu’au pétrol du vaisseau.

Il brûle dans l’eau, & vraisemblablement, c’étoit là une des matieres du feu grégeois.

Il surnage toutes les liqueurs, & même l’esprit de vin rectifié, qui est plus pésant de .

Il se mêle parfaitement avec les huiles essentielles de thim, de lavande, de térébenthine, quoiqu’il soit minéral, & que ces huiles soient végétales. Mais peut-être aussi le minéral & le végétal ne different-ils pas en cette matiere, car les huiles végétales ont été auparavant minérales, puisque les plantes les ont tirées de la terre.

Le pétrol fortement agité, fait beaucoup de bulles, mais il se remet en son état naturel plus promptement que toute autre liqueur. Cela vient de ce que l’air distribué dans toute la subsistance du pétrol, y est distribué d’une certaine maniere unique & nécessaire, & que les parties de la liqueur n’en peuvent naturellement souffrir une autre ; en effet, les parties d’une huile ont une certaine union, certains engagemens de leurs filets, ou petits rameaux les uns avec les autres, ce qui oblige l’air qu’elles renferment, à s’y conformer.

Le pétrol est d’une extension surprenante : sur l’eau, une goutte s’étend plus d’une toise, & en cet état elle donne des couleurs, c’est-à-dire que ses petits filets deviennent des prismes.

La plus forte gelée n’y fait aucune impression.

Le papier enduit de pétrol ne devient transparent que pour quelques momens ; il cesse de l’être dès qu’il a été séché à l’air.

M. Homberg a fait voir qu’il y a des huiles qui s’enflamment par le mélange d’un esprit acide bien déflegmé. On auroit pû attendre le même effet du pétrol, mais il n’arrive point ; seulement les esprits acides s’y mêlent parfaitement, & le rendent d’une consistence très-épaisse ; ces huiles qui s’enflamment sont des huiles essentielles de plantes aromatiques des Indes, & il n’est pas surprenant que le pétrol n’en ait pas les conditions.

Il se mêle & s’unit difficilement avec l’esprit-de-vin, parce que peut-être sa consistence est trop grasse.

L’esprit-de-vin rectifié, qui est le grand dissolvant des soufres & des huiles, ne tire rien du pétrol, même après une longue digestion.

Par la distillation M. Geoffroy l’aîné en a retiré une liqueur huileuse, qui est un peu plus transparente, mais qui perd beaucoup de son odeur & de sa subtilité naturelle ; lorsqu’on l’allume, elle donne une lueur moins obscure, mais plus languissante. Au fond de l’alembic il trouva seulement un peu de marc jaune.

De même M. Boulduc n’a pu tirer du pétrol par la distillation, soit au bain de vapeur, soit au bain de sable, aucun flegme, ni aucun esprit salin. Tout ce qui est monté étoit de l’huile seulement ; il est resté au fond de la cornue une très-petite quantité d’une matiere un peu épaisse & un peu brune ; d’où il résulte que le pétrol ne se perfectionne point par la distillation.

On ne peut donc mieux faire, quand on usera de pétrol en médecine, que de le laisser tel qu’il est ; c’est un remede tout préparé par la nature, comme plusieurs autres, dont nous avons parlé, & où l’art n’a point lieu d’exercer son inquiétude.

Examen du pétrol de Plaisance. Le pétrol de Plaisance est d’une même nature que celui de Modène, c’est pourquoi je n’en dirai qu’un mot. On le tire en abondance du mont Ciaro, situé environ à 12 lieues italiennes de Plaisance. Voici comme on s’y prend.

Il y a dans cette montagne des ardoises grises, couchées presque horisontalement, mêlées d’argile, & d’une espece de sélénite qui paroît d’une nature calcaire. On perce perpendiculairement ces ardoises jusqu’à ce qu’on trouve l’eau, & alors le pétrol qui étoit contenu entre les couches des ardoises & dans leurs fentes suinte, & tombe sur l’eau de ces puits qu’on a creusés. Quand il s’y en est assez amassé, comme au bout de huit jours, on le va prendre avec des bassins de cuivre jaune. Il est mêlé avec de l’eau, mais on pense aisément qu’il est facile de l’en séparer. Ce pétrol du mont Ciaro est clair, blanc, extrèmement inflammable. Il se conserve fort bien sur l’eau dans ces puits, dont nous venons de parler, au lieu que dans des vaisseaux bouchés, il ronge les bouchons dont on se sert ordinairement, il s’évapore en grande partie.

Origine du pétrol. Il nous manque encore beaucoup d’observations sur le pétrol, sur sa nature & sur son origine ; cependant on peut conjecturer avec assez de vraissemblance, qu’il est l’ouvrage des feux souterreins qui élevent ou subliment les parties les plus subtiles de certaines matieres bitumineuses qui se rencontrent dans des terroirs particuliers. Ces parties se condensent en liqueur par le froid des voûtes des rochers où elles s’amassent, & coulent par les fentes ou les ouvertures que la disposition du terrein leur fournit.

Examen du prétendu pétrol d’Angleterre. Quelques anglois ont mis au rang des pétrols une substance bitumineuse qu’on tire dans leur pays par art, d’une pierre noirâtre qui se trouve dans les mines de charbon. Voici ce que c’est.

A Brosely, Bentley, Pitchfort & autres lieux voisins dans la Shropshire, on trouve sur la plûpart des mines de charbon, une couche assez épaisse d’un rocher, ou pierre noirâtre, laquelle est poreuse, & contient une grande quantité de matiere bitumineuse.

On transporte cette pierre dans l’attelier où on la moud avec des moulins à cheval, semblables à ceux dont on se sert pour briser les cailloux dont on fait le verre. On jette cette poudre dans de grands chaudrons pleins d’eau, & on l’y fait bouillir, de façon que la matiere bitumineuse se sépare du gravier, ce dernier se précipitant au fond, & l’autre nageant sur la surface de l’eau.

Cette substance bitumineuse étant recueillie & évaporée, acquiert la consistance de la poix ; & à l’aide de l’huile distillée de la même pierre, que l’on mêle avec elle ; elle devient aussi liquide que le goudron. On n’en tire d’autre utilité que pour le radoub des vaisseaux ; & comme elle n’éclate point, & qu’elle se conserve noire & molle, elle peut être propre à empêcher les vers de s’y mettre.

On tire de semblable pétrol par la distillation de certaines terres & pierres bitumineuses que l’on rencontre en Allemagne & en France.

Choix à faire dans les divers pétrols d’Italie. Il résulte de tout ce que nous avons dit jusqu’ici, que l’huile de pétrol d’Italie est la seule bonne. On estime le pétrol qui est récent, clair, léger, très-inflammable, d’une odeur forte & pénétrante, approchant de celle du soufre. On ne peut le contrefaire, & il ne souffre aucun mélange. Ceux qui en font commerce doivent user de grandes précautions contre le feu, parce qu’il s’enflamme du moins aussi aisément que la poudre à canon.

Le pétrol jaune est le plus estimé après le blanc, ensuite vient le roux, ensuite le verd ; le noirâtre est regardé comme trop grossier, c’est le moindre de tous.

Usage qu’on tire des pétrols. On a coutume de se servir en quelques endroits d’Italie des pétrols grossiers pour s’éclairer à la place d’huile ; il s’en emploie aussi une assez grande quantité par les maréchaux & par ceux qui font des feux d’artifice. Les Persans, au rapport de Kempfer, ne tirent à-présent d’autre usage de leur pétrol que pour délayer leurs vernis.

Dioscoride faisoit grand cas du naphte de Babylone dans plusieurs maladies. Il lui attribue un grand nombre de vertus médicinales très-importantes, qui néanmoins ne nous intéressent point, puisque nous ne connoissons plus ce pétrol. D’ailleurs, on ne peut guere être prévenu en faveur du jugement de Dioscoride, quand on voit qu’il vante le naphte de Babylone pour l’appliquer sur les yeux afin d’en dissiper les fluxions & les taies.

Les Italiens sont mieux fondés à regarder leurs pétrols comme un remede fort pénétrant, incisif, balsamique, propre dans quelques maladies chroniques, & plus encore employé extérieurement, pour fortifier les nerfs des parties affoiblies, donner du jeu & du ressort aux fibres relâchées. Dans ce dernier cas, l’on peut avec succès lui substituer en Languedoc, le pétrol de Gabian.

Je sai tous les éloges que Koenig, Ettmuller, Schroeder, Boecler & quelques autres auteurs allemans donnent à l’huile de pétrol : je sai combien ils la vantent dans la suppression des regles, l’affection hystérique, la fievre quarte, le mal de dents, les vers, les douleurs néphrétiques, &c. Mais que de telles ordonnances ressemblent bien à celles des bonnes femmes, ou des gens du monde qui parlent médecine sans y rien entendre, puisque toutes ces maladies provenant de différentes causes, demandent nécessairement des remedes diversifiés, & opposés aux causes du mal ! Dans les cas mêmes où l’huile de pétrol pourroit convenir, on a de beaucoup meilleurs remedes à employer. De plus, il faut avouer que si l’on devoit compter sur quelques observations véritables des vertus du pétrol, ce ne pourroit être qu’en conséquence d’expériences répétées par d’habiles médecins sur les habitans des pays qui produit ce bitume liquide ; je veux dire dans le duché de Modene, ou de Plaisance. Par-tout ailleurs on ne peut guere prescrire l’huile du pétrol avec confiance par rapport à ses effets. Cette huile perd toute sa vertu subtile par le transport. Nos apothicaires & nos droguistes les plus curieux n’en ont jamais de pure, parce qu’on la leur envoie falsifiée sur les lieux même. Je ne parle pas des autres falsifications qu’y font les détailleurs.

Concluons qu’il faut presque nous passer sans regret de l’huile de pétrol pour la Médecine, nous réduire à ses usages pour quelques arts, & à la considération spéculative de son origine, & des qualités particulieres qui la distinguent de toutes les huiles végétales & artificielles.

Auteurs sur le pétrol. Vossius a écrit une savante dissertation sur le naphte ancien & moderne ; mais c’est Jacobus Oligerus qui a le premier publié en 1690, à Copenhague, la brochure du médecin François Arioste sur le pétrol de Modène, de oleo montis Zibisiti, seu petrolo agri Matinensis ; Ramazzini l’a redonnée plus correcte & plus étendue. Elle est dans le recueil de ses œuvres. (Le Chevalier de Jaucourt.)