L’Encyclopédie/1re édition/OPIATE

OPIATE, s. m. (Pharmacie.) ce nom qui vient originairement sans doute de ce que le remede dont il s’agit contenoit de l’opium, est donné aujourd’hui indistinctement à un électuaire magistral quelconque, soit qu’on y fasse entrer de l’opium qu’on ne prescrit que très rarement sous cette forme, soit qu’on n’y en fasse point entrer. Le mot d’opiate dans sa signification reçue & vulgaire signifie donc la même chose que électuaire magistral, & même est le nom le plus usité, & presque le seul usité de l’électuaire magistral. Cela n’empêche pas qu’on ne trouve quelques électuaires officinaux qui portent le nom d’opiate, par exemple l’opiate de Salomon. Voyez l’article suivant.

Toutes les considérations que nous avons proposées sur l’électuaire officinal à l’article Électuaire conviennent parfaitement à l’électuaire magistral ou opiate. Voyez cet article. L’opiate s’ordonne communément pour plusieurs doses que l’apoticaire livre en autant de paquets, ou qu’il donne en masse lorsque les doses sont déterminées vaguement par un certain volume, qu’il est dit par exemple que le malade en prendra chaque fois gros comme une noix, comme une noisette, &c.

La consistance de l’opiate ne permet pas de le former en bols. Les malades les plus courageux le prennent au bout d’un couteau ou de la queue d’une cueiller ou bien délayée dans quelque liqueur appropriée. Il faut pour ceux qui ont du dégoût pour les remedes, l’envelopper le mieux qu’il est possible dans du pain-à chanter. (b)

Opiat, opiatum, (Pharmacie.) épithete que porte assez communément le laudanum dans les ouvrages latins de Médecine. Les auteurs françois ne traduisent point cette épithete, & ils appellent simplement laudanum les préparations d’opium, appellées en latin laudanum opiatum. Quelques-uns entendent par laudanum opiatum le laudanum solide, & ils croient que ce mot opiatum signifie la même chose que opiaticum, c’est à-dire ayant la consistance électuaire ou d’opiate. Mais ce n’est pas là ce que les Pharmacologistes ont entendu par l’expression dont il s’agit. Voyez Laudanum. (b)

Opiate mésentérique, (Pharmacie.) composition officinale, dont une préparation mercurielle est le principal ingrédient. Voyez l’article Mercure, (Mat. méd. & Pharm.)

Opiate de Salomon, (Pharm. & Mat. méd.) l’opiate de Salomon est un électuaire officinal, dont l’auteur est incertain ; c’est, comme le mithridate, un amas de drogues aromatiques, principalement de celles qui sont regardées comme éminemment alexipharmaques, antipestilentielles, cordiales, stomachiques, emmenagogues, vermifuges, &c.

Le mithridate est un des ingrédiens de cette inutile & fastueuse composition qui contient d’ailleurs & par duplicata plusieurs ingrédiens du mithridate. Mais le mithridate contenant d’autre part les trochisques cyphi qui sont composés d’une partie des ingrédiens du mithridate, & de ceux-là même qui lui sont communs avec l’opiate de Salomon, il se trouve que la même drogue entre trois fois dans la même composition. Or elle est décrite avec la circonstance de cette répétition puérile dans la derniere édition de la Pharmacopée de Paris. N’est-il pas permis de demander à quoi est bon le renouvellement fréquent de ces sortes d’ouvrages, lorsqu’ils laissent subsister de pareilles inepties ? (b)