L’Encyclopédie/1re édition/OBLIAGE

OBLIAGE, s. m. (Jurisprud.) est une redevance annuelle dûe en certains lieux au seigneur. Quelques uns ont prétendu qu’obliage se ditoit pour oubliage, & que ce terme venoit d’oubli ; c’est ainsi que l’interprete de la coutume de Blois, sur l’art. 40, dit que l’obliage est l’amende que le sujet doit à son seigneur, pour ne lui avoir pas payé la rente ou devoir annuel au jour accoutumé, & pour l’avoir oublié. En effet, les cens & rentes emportent communément une amende faute de payement ; mais M. de Lauriere remarque avec raison que c’est une imagination ridicule de faire venir obliage du mot oubli.

Le droit appellé obliage vient du latin oblata. C’étoit le nom que l’on donnoit autrefois aux pains qui étoient présentés pour la communion, ainsi qu’il se voit dans le seizieme concile de Tolede, ch. xvj.

On donna aussi le même nom à des pains ronds & plats que les sujets étoient tenus de présenter à leur seigneur. Ces pains furent appellés oblata quasi munera oblata, seu oblationes ab offerendo, à cause qu’ils étoient présentés au seigneur, & peut être aussi parce qu’ils étoient à l’instar de ceux que l’on donnoit pour la communion. On les appella en françois oblies, & par corruption oublies ; c’est de-là qu’on appelle oublies ces menues pâtisseries rondes & plates que les pâtissiers font avec de la farine & du miel ; & c’est aussi de-là que les pâtissiers sont appellés oblayers dans le livre noir du chatelet.

Du mot oblie l’on fit obliage & oubliage, pour exprimer la redevance des oublies ou pains dûs au seigneur ; & en effet, dans la coutume de Dunois, pains & oublies sont employés indifféremment & dans la même signification.

Ces oublies étoient plus ou moins grands & de divers prix, selon la convention ou l’usage de chaque lieu.

Ce terme d’obliage a aussi été employé pour exprimer toute sorte de redevance dûe au seigneur, comme oublies de vin, oublies de froment, oublies de chapons ; mais quand on disoit oublies simplement, ou oubliage sans autre explication, cela s’entendoit toûjours d’une redevance en pain.

Dans presque toutes les seigneuries, ces droits d’obliage ont été convertis en argent. Voyez le gloss. de Ducange, au mot oblata ; & celui de M. de Lauriere, au mot obliages. (A)