L’Encyclopédie/1re édition/MONTARGIS

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MONTARGIS, (Géograph.) ville de France dans l’Orleanois. Son nom latin du moyen âge est Mons Argisus pour Mons Argisi. Le roi saint Louis donna Montargis & tout le pays voisin à son fils Philippe. Louis XIV. le donna en appanage à son frere Philippe ; & c’est à ce titre que M. le duc d’Orleans en est aujourd’hui possesseur. Son ancien château bâti par le roi Charles V. tombe en ruines.

Montargis a un bailliage, un présidial, une coûtume particuliere réformée en 1531, & une belle forêt composée de 8300 arpens.

M. de Valois pensoit que le Vellaunodunum de César étoit Montargis ; mais il n’y a rien qui puisse appuyer ce sentiment que la seule autorité de ce savant homme. Montargis est une cité nouvelle du moyen âge, dans laquelle on ne trouve aucune trace d’antiquité, & dont la position ne quadre point avec le passage entier de César.

Cette ville est sur le Loin à 6 lieues de Nemours, 20 de Nevers, & 24 de Paris. Long. selon Cassini, 20. 14′. 30″. lat. 47. 59′. 55″.

Madame Guyon (Jeanne-Marie-Bouvieres de la Mothe) si célebre par ses écrits & ses disgraces, naquit à Montargis le 13 Avril 1648. On sait ses avantures. Elle abandonna ses biens à ses enfans pour devenir supérieure d’une communauté établie à Gex ; les regles de cette communauté n’ayant pas été de son goût, elle précha d’autres maximes, & se vit obligée de se retirer chez les Ursulines de Thonon, de-là à Turin, à Grenoble, à Verceil. Au milieu de toutes ses courses, elle composa plusieurs livres, entr’autres le Cantique des Cantiques, interpreté selon le sens mystique, & les Torrens spirituels. Elle se rendit à Paris pour sa santé, dogmatisa, & fut mise dans un couvent. Mais la protection toute-puissante de madame de Maintenon lui rendit la liberté ; elle vint à Versailles remercier sa bienfaitrice, vit l’abbé de Fénelon, alors précepteur des enfans de France, & gagna son amitié. Elle répandit bientôt dans Saint-Cyr ses sentimens, & madame de Maintenon l’abandonna. Alors elle fut renfermée au château de Vincennes, & ensuite à la Bastille ; elle en sortit, & se retira à Blois, où elle mourut le 9 Juin 1717, à 69 ans. Veuve dans une grande jeunesse, avec du bien, de la beauté & un esprit fait pour le monde, elle s’entêta, dt M. de Voltaire, de ce qu’on appelle la spiritualité, devint chef de secte, & finalement mit aux mains les deux plus grands hommes qui fussent alors dans l’Eglise, M. Bossuet & M. de Fénelon, qu’elle eut la gloire d’avoir pour disciple, & qu’elle appelloit son fils. (D. J.)