L’Encyclopédie/1re édition/MONARQUE

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MONARQUE, s. m. (Gouvernement.) souverain d’un état monarchique. Le trône est le plus beau poste qu’un mortel puisse occuper, parce que c’est celui où on peut faire le plus de bien. J’aime à voir l’intérêt que l’auteur de l’esprit des lois prend au bonheur des princes, & la vénération qu’il porte à leur rang suprème.

Que le monarque, dit-il, n’ait point de crainte, il ne sauroit croire combien on est porté à l’aimer. Eh ! pourquoi ne l’aimeroit-on pas ? Il est la source de presque tout le bien qui se fait, & presque toutes les punitions sont sur le compte des lois. Il ne se montre jamais au peuple qu’avec un visage serein : sa gloire même se communique à nous, & sa puissance nous soutient. Une preuve qu’on le chérit, c’est qu’on a de la confiance en lui, & que lorsqu’un ministre refuse, on s’imagine toujours que le prince auroit accordé, même dans les calamités publiques : on n’accuse point sa personne ; on se plaint de ce qu’il ignore, ou de ce qu’il est obsédé par des gens corrompus. Si le prince savoit, dit le peuple : ces paroles sont une espece d’invocation.

Que le monarque se rende donc populaire ; il doit être flatté de l’amour du moindre de ses sujets : ce sont toujours des hommes. Le peuple demande si peu d’égards, qu’il est juste de les lui accorder : la distance infinie qui est entre le monarque & lui, empêche bien qu’il n’en soit gêné. Il doit aussi savoir jouir de soi à part, dit Montagne, & se communiquer comme Jacques & Pierre à soi-même. La clémence doit être sa vertu distinctive ; c’est le caractere d’une belle ame que d’en faire usage, disoit Ciceron à César.

Les mœurs du monarque contribuent autant à la liberté que les lois. S’il aime les ames libres, il aura des sujets ; s’il aime les ames basses, il aura des esclaves. Veut-il regner avec éclat, qu’il approche de lui l’honneur, le mérite & la vertu : qu’exorable à la priere, il soit ferme contre les demandes ; & qu’il sache que son peuple jouit de ses refus, & ses courtisans de ses graces. (D. J.)