L’Encyclopédie/1re édition/MIURE ou MYURE

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MIURE ou MYURE, s. f. (Med. Semiot.) μειουρος, ou μυουρος, nom que les anciens grecs ont donné à une espece de pouls inégal régulier, dont le caractere distinctif est d’aller toujours en diminuant, de façon que la seconde pulsation est moins élevée que la premiere, la troisieme que la seconde, & ainsi de suite, jusqu’à ce qu’elle soit parvenue à une extrème petitesse, ou qu’elle ait dégénéré en intermittence parfaite ; alors, ou le pouls reste dans cet état d’affaissement, ou il remonte tout d’un coup, & passe brusquement d’un extrème à l’autre, ou enfin, les pulsations reprennent leur force & leur grandeur par degrés, & dans les mêmes proportions qu’elles les avoient perdus. Ces deux dernieres especes portent aussi le nom de pouls réciproques, accourcis, reciproci, decurtati ; & l’on a appellé la premiere espece accourcis manquans, deficientes decurtati. Galen. de different. puls. lib. I. cap. xj. La ressemblance qu’on a trouvée ou imaginée de cette espece de pouls à la queue d’une souris qui va toûjours en diminuant, l’a fait appeller par plusieurs μυουρος, nom composé de μυς, qui signifie rat, & de οὐρος, queue. Cette étymologie & cette ortographe, qui se trouvent dans quelques vieux cayers grecs, sont assez naturelles. Galien dit que les Médecins grecs nomment ces pouls μειον ρίζοντας & μεώρους, c’est-à-dire inutiles & comme accourcis, inutiles & quasi decurtatos, empruntant ce nom des figures qui se terminent en pointe. Suivant ce sentiment, il faut écrire ce mot en françois par un i, miure.

Galien, & ses commentateurs serviles, ont tous regardé ce caractere du pouls comme très mauvais, indiquant une foiblesse générale, un ralentissement mortel dans les forces du cœur & des arteres. Cependant il paroît par les observations exactes de M. de Bordeu, que ce pouls n’est pas un signe aussi fâcheux qu’on l’avoit cru jusqu’alors, & qu’au contraire, il annonce quelquefois une évacuation critique & salutaire par les urines. Il paroît, dit cet illustre & judicieux observateur, que dans cette inégalité même, il y a une sorte de régularité qui manque au pouls intestinal. Le pouls des urines a plusieurs pulsations moindres les unes que les autres, & qui vont ordinairement jusqu’à se perdre, pour ainsi dire, sous le doigt ; c’est dans ce même ordre qu’elles reviennent de tems en tems, les pulsations qui se font dans ces intervales, sont plus développées, assez égales, & un peu sautillantes. Recherches sur le pouls, par rapport aux crises, chap. xv. obs. 83. 84. & 80, &c. Ces observations ont été confirmées par M. Michel, médecin de Montpellier. Nouvel. obs. sur le pouls, par rapport aux crises. Et nous avons vu nous-mêmes, dans un malade, le pouls miure préceder une excrétion abondante d’urine. Voyez Pouls.