L’Encyclopédie/1re édition/MINTURNE

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MINTURNE, (Géog.) Minturnæ ; ancienne ville d’Italie dans le Latium, sur le fleuve Liris, un peu au-dessus de son embouchure, à 80 stades de Formies. Elle devoit sa naissance à une colonie romaine.

C’est à Minturne que Marius fut conduit, après avoir été pris dans les marais de Marica, qu’on nomme Maricæ paludes, ou Minturnensium paludes ; le magistrat de Minturne, croyant ne pouvoir se dispenser d’obéir aux ordres précis du sénat, envoya sur le champ à Marius, un esclave public, Cimbre de nation, pour le faire mourir.

Marius voyant entrer cet esclave dans la prison, & jugeant de son dessein par une épée nue qu’il avoit à la main, lui cria d’une voix forte : « Barbare, as-tu bien la hardiesse d’assassiner Caius Marius ? » L’esclave épouvanté du nom seul d’un homme si redoutable aux Cimbres, jette son épée, & sort de la prison tout ému, en criant : « Il m’est impossible de tuer Marius ».

Les magistrats de Minturne regarderent la peur & le trouble de cet esclave, comme un avis du ciel, qui veilloit à la conservation de ce grand homme ; & touchés d’un sentiment de religion, ils lui rendirent la liberté. On sait la suite de ses aventures, les nouveaux périls qu’il essuya sur les côtes de Sicile, sa jonction avec Cinna, son entrée dans Rome, & les flots de sang qu’il répandit.

Enfin maître du monde, mais repassant dans son esprit ses anciennes disgraces, sa fuite, son exil, & tous les dangers qu’il avoit couru, il en perdit le sommeil. Ce fut pour se le procurer, & pour se débarrasser de ces idées funestes, qu’il se jetta dans la débauche de la table. Il cherchoit à noyer ses inquiétudes dans le vin ; & il ne trouvoit de repos, que quand il n’avoit plus de raison. Ce nouveau genre de vie, & les excès qu’il fit, lui causerent une pleurésie dont il mourut, accablé d’années, & le corps épuisé de fatigues & de tourmens, le 17e jour de son 7e consulat. (D. J.)