L’Encyclopédie/1re édition/MENU-VAIR

MENU-VAIR, (Blason.) le menu-vair étoit une espece de panne blanche & bleue, d’un grand usage parmi nos peres. Les rois de France s’en servoient autrefois au lieu de fourrures ; les grands seigneurs du royaume en faisoient des doublures d’habit, des couvertures de lit, & les mettoient au rang de leurs meubles les plus précieux. Joinville raconte, qu’étant allé voir le seigneur d’Entrache qui avoit été blessé, il le trouva enveloppé dans son couvertoir de menu-vair. Les manteaux des présidens à mortier, les robes des conseillers de la cour, & les habits de cérémonie des hérauts d’armes en ont été doublés jusqu’au quinzieme siecle. Les femmes de qualité s’en habilloient pareillement ; il fut défendu aux ribaudes d’en porter, aussi-bien que des ceintures dorées, des robes à collets renversés, des queues & boutonnieres à leurs chaperons, par un arrêt de l’an 1420.

Cette fourrure étoit faite de la peau d’un petit écureuil du nord, qui a le dos gris & le ventre blanc. C’est le sciuro vario d’Aldrovandi, & peut-être le mus ponticus de Pline. Quelques naturalistes latins le nomment varius, soit à cause de la diversité des deux couleurs grise & blanche, ou par quelque fantaisie de ceux qui ont commencé à blasonner. Les Pelletiers nomment à présent cette fourrure petit-gris.

On la diversifioit en grands ou petits carreaux, qu’on appelloit grand-vair ou petit-vair. Le nom de panne imposé à ces sortes de fourrures, leur vint de ce qu’on les composa de peaux cousues ensemble, comme autant de pans ou de panneaux d’un habit. On conçoit de-là que le vair passa dans le blason, & en fit la seconde panne, qui est presque toujours d’argent ou d’azur, comme l’hermine est presque toujours d’argent ou de sable. Le menu-vair, en termes d’armoiries, se dit de l’écu chargé de vair, lorsqu’il est composé de six rangées ; parce que le vair ordinaire n’en a que quatre. S’il s’en trouve cinq, il le faut spécifier en blasonnant, aussi-bien que l’émail, quand il est autre que d’argent & d’azur. (D. J.)