L’Encyclopédie/1re édition/LITIERSE ou LITIERSÉS

◄  LITIERE
LITIGANT  ►

LITIERSE ou LITIERSÉS, s. m. (Littér.) sorte de chanson en usage parmi les Grecs, & sur-tout affectée aux moissonneurs : elle fut ainsi nommée de Lytiersés, fils naturel de Midas, & roi de Celènes en Phrygie.

Pollux dit que le lytierse étoit une chanson de deuil qu’on chantoit autour de l’aire & des gerbes, pour consoler Midas de la mort de son fils, qui, selon quelques-uns, avoit été tué par Hercule. Cette chanson n’étoit donc pas une chanson grecque dans son origine. Aiussi Pollux la met-il au rang des chansons étrangeres ; & il ajoute qu’elle étoit particuliere aux Phrygiens, qui avoient reçu de Lytiersez l’art de l’Agriculture. Le scholiaste de Théocrite assure que de son tems les moissonneurs de Phrygie chantoient encore les éloges de Lytiersez, comme d’un excellent moissonneur.

Si le lytierse a été dans son origine une chanson étrangere aux Grecs, qui rouloit sur les éloges d’un prince phrygien, on doit reconnoître que les moissonneurs de la Grece n’adopterent que le nom de la chanson, & qu’il y eut toujours une grande différence entre le lytierse phrygien & le lytierse grec. Ce dernier ne parloit guere ni de Lytiersez, ni de Midas, à en juger par l’idille X de Théocrite, où le poëte introduit un moissonneur, qui après avoir dit ; voyez ce que c’est que la chanson du divin Lytiersez, la rapporte partagée en sept couplets, qui ne s’adressent qu’aux moissonneurs, à ceux qui battent le grain, & au laboureur qui emploie les ouvriers. Au reste cette chanson de Lytiersez passa en proverbe en Grece, pour signifier une chanson qu’on chantoit à contrecœur & par force. Pollux, lib. IV. c. vij. Erasm. adag. chil. iij. cent. 4. adag. 75. diss. de M. de la Nause, sur les chansons anciennes. Mém. de l’acad. des Belles-Lettres, tome IX. pag. 349. & suiv.