L’Encyclopédie/1re édition/LILIUM

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LILIUM, (Chimie & Mat. med.) ce remede qui est fort connu encore sous le nom de lilium de Paracelse, à qui on l’a attribué sur un fondement assez frivole, & sous celui de la teinture des métaux, est un de ceux que l’abbé Rousseau a célebrés dans son livre des secrets & remedes éprouvés. M. Baron nous avertit dans une dissertation très-étendue & très profonde sur cette préparation, dissertation qui fait une de ses additions à la chimie de Lémery, qu’on doit bien se garder de croire que l’abbé Rousseau soit l’inventeur de ce remede, puisque, selon la remarque de M. Burlet, le premier qui ait rendu publique la description de la teinture des métaux, est l’auteur anonyme d’un livre intitulé Chimia rationalis, imprimé à Leyde en 1687. On s’est un peu écarté depuis ce tems du procédé de l’inventeur. Voici celui qui est décrit dans la Pharmacopée de Paris ; prenez des régules de cuivre, d’étain, & d’antimoine martial, de chacun quatre onces, (voyez sous le mot Antimoine, regule martial, regule de vénus, regule jovial) mettez-les en poudre, mêlez-les exactement, & réduisez-les par la fusion en un seul regule selon l’art : mettez-le de nouveau en poudre, & mêlez-le avec du nitre très-pur & du tartre, l’un & l’autre en poudre, de chacun dix-huit onces, projettez ce mélange dans un creuset, & le faites détonner, & ensuite faites-le fondre à un feu très-fort, versez la matiere dans un mortier pour l’y réduire en poudre dès qu’elle sera prise, & versez-la encore toute chaude dans un matras ; versez dessus sur le champ suffisante quantité d’esprit-de-vin rectifié, digerez pendant quelques jours au bain de sable en agitant de tems en tems, & vous aurez une teinture profondément colorée.

Le lilium est fort communément employé dans la pratique de la Medecine comme un cordial très actif, & même par quelques medecins, (ceux de Montpellier, par exemple) comme la derniere ressource pour soutenir un reste de vie prêt à s’éteindre. La teinture des métaux differe à peine quant à sa constitution intérieure ou chimique de la teinture du sel de tartre, & n’en differe point du tout quant à ses qualités medicinales ; en sorte que c’est par une erreur, ou du-moins une inexactitude, que nous devons relever ici, que le lilium est qualifié de préparation d’antimoine dans l’art. Antimoine. Voyez Esprit-de-vin à l’art. Vin, Sel de tartre à l’art. Tartre, & Teinture.

On trouve encore parmi les secrets de l’abbé Rousseau, & dans la chimie de Lémery, une autre préparation chimique, sous le nom de lilium minéral, ou sel métallique. Cette préparation n’est autre chose qu’un alkali fixe, qui ayant été tenu dans une longue & forte fusion avec un regule composé de cuivre, d’étain, & de regule martial, qui se réduit en chaux dans cette opération, a été rendu très caustique par l’action de ces chaux, desquelles on le sépare ensuite par la lotion. Toute cette opération n’est bonne à rien qu’à fournir la matiere de la teinture des métaux, supposé que la teinture des métaux soit elle-même une préparation fort recommandable. Car quant à son produit plus immédiat, le prétendu sel métallique, il n’est & ne doit être d’aucun usage en Medecine, ni intérieurement, parce qu’il est vraiment corrosif ; ni extérieurement, parce que la pierre à cautere avec laquelle il a beaucoup d’analogie, vaut mieux, & se prépare par une manœuvre beaucoup plus simple. Voyez Pierre à cautere. (b)