L’Encyclopédie/1re édition/LESSIVE

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LESSIVE, s. f. (Chimie.) C’est ainsi qu’on appelle une dissolution saline qui a été préparée par le moyen de la lixiviation. Voyez Lixiviation.

On a coutume de spécifier les différentes lessives par les noms des matieres qui ont été lessivées : c’est ainsi qu’on dit lessive de soude, lessive de potasse, pour désigner une eau qui a été appliquée à la soude ou à la potasse pour en retirer le sel. (b)

* Lessive du linge, (Art méchan.) c’est la maniere de le décrasser quand il est sale. Pour cet effet on a un grand cuvier percé au bas latéralement d’un trou qu’on bouche d’un bouchon de paille. On met le linge sale dans ce cuvier ; on le couvre d’un gros drap qui déborde par-dessus le cuvier. On charge ce linge ou drap d’une grande quantité de cendres de bois neuf & non flotté. Cependant on a fait chauffer de l’eau dont on arrose les cendres, sur lesquelles on rejette les bords du drap, & l’on couvre le cuvier d’un couvercle de natte ; cette eau chaude met en dissolution le sel du bois contenu dans les cendres : ce sel dissout, se sépare des cendres, passe à-travers le drap avec l’eau, va impregner le linge sale qui est dessous : la dissolution ou l’eau de lessive tombe au fond du cuvier, & sort par le bouchon de paille qu’on a mis au trou latéral du cuvier, d’où elle est reçue dans un autre cuvier plus petit placé au-dessous du premier. On reverse cette dissolution sur les cendres, on les arrose de nouvelle eau chaude, & l’on fait en sorte que tout le sel contenu dans les cendres soit dissous & déposé sur le linge. Quand on a épuisé les cendres de sel par l’eau chaude, quand on a fait repasser la lessive ou sa dissolution sur le linge sale, on enleve le drap avec les cendres, on tire le linge du cuvier, on le lave & on le bat dans l’eau claire, on le frottant de savon. Quand il est blanc & bien décrassé, on le lave & relave dans de l’eau claire seulement, jusqu’à ce qu’il n’y reste plus aucun vestige ni d’eau de lessive, ni d’eau de savon, ni de crasse. On l’étend sur des cordes pour le faire sécher : sec, on le détire & on le plie, puis on le serre dans des armoires à linge. La raison de cette opération est assez simple ; la saleté du linge est une graisse ; le sel des cendres s’y unit un peu, & forme avec elle une espece de savon. Ce premier savon, formé dans le cuvier, s’unit facilement avec celui dont on frotte le linge au sortir du cuvier : ils se dissolvent ensemble ; en se dissolvant l’eau les emporte avec la crasse. D’ailleurs toute cendre n’est pas bonne pour la lessive : celles du bois flotté ne contiennent presque point de sel ; il a été dissous dans le flottage, & toute eau n’est pas également bonne pour la lessive ; les eaux séléniteuses, par exemple, sont mauvaises ; la sélénite venant à se dissoudre, son acide s’unit au sel du savon, & l’huile du savon reste seule & surnage à l’eau en petits flocons.

Lessive des aiguilles, terme d’Aiguillier, qui signifie laver les aiguilles dans de l’eau de savon après qu’elles sont polies, afin d’en enlever la crasse ou cambouis qui s’y étoit attaché pendant le poliment. Voyez Aiguille.

Lessive, (Jardinage.) on appelle de ce nom l’eau qui sort de la lessive du linge ; cette eau est pleine de sels, dont elle s’est chargée en passant sur les cendres de la lessive, & elle dépose ses sels dans les terres où elle se mêle. On peut s’en servir pour arroser celles qu’on prépare pour les orangers, citroniers, ou pour mouiller une planche où l’on a semé des plantes qui demandent une terre substantielle.

Lessive d’Imprimerie, est la même que celle dont on s’est servi pour lessiver le linge ; mais pour la rendre plus douce & plus onctueuse, on y fait fondre une suffisante quantité de drogue, que l’on nomme aussi potasse. C’est dans cette lessive, qui dans le bon usage doit être chaude, pour ménager l’œil de la lettre, qu’on lave les formes avec la brosse, de façon qu’il ne doit rester aucun vestige d’encre sur la lettre, sur les garnitures ni sur le chassis. Voyez nos Planches d’Imprimerie.