L’Encyclopédie/1re édition/LACQUE

LACQUE, s. f. (Hist. nat. des Drog. Arts, Chim.) espece de cire que des fourmis ailées, de couleur rouge, ramassent sur des fleurs aux Indes orientales, & qu’elles transportent sur de petits branchages d’arbres où elles font leur nid.

Il est vraissemblable qu’elles y déposent leurs œufs ; car ces nids sont pleins de cellules, où l’on trouve un petit grain rouge quand il est broyé, & ce petit grain rouge est selon les apparences l’œuf, d’où la fourmi volante tire son origine.

La lacque n’est donc point précisément du genre des gommes, ni des résines, mais une sorte de cire recueillie en forme de ruche, aux Indes orientales, par des fourmis volantes ; cette cire séchée au soleil devient brune, rouge clair, transparente, fragile.

On nous l’apporte de Bengale, de Pégu, de Malabar, & autres endroits des Indes. On la nomme trec dans les royaumes de Pégu & de Martaban.

Garcie des Jardins & Bontius sont du nombre des premiers parmi les auteurs qui nous en ont appris sa véritable origine. Ceux qui prétendent que la lacque est une partie de la féve du jujuba indica, qui suinte à-travers l’écorce, sont dans l’erreur ; car, outre que les bâtons sur lesquels elle a été formée prouvent le contraire, la résine qui distille par incision de cet arbre est en petite quantité & d’une nature toute différente.

Plusieurs écrivains se sont aussi persuadés que la lacque avoit été connue de Dioscoride & de Sérapion ; mais la description qu’ils nous en ont donnée démontre assez le contraire. Quant au nom de gomme qu’elle porte, c’est un nom impropre & qui ne peut lui convenir, puisque c’est un ouvrage de petits insectes.

La principale espece de lacque est celle qu’on nomme lacque en bâtons, parce qu’on nous l’apporte attachée a de petits branchages sur lesquels elle a été formée. Il ne faut pas croire que cette espece de cire provienne des petits rameaux où on la voit attachée, puisqu’en la cassant, & en la détachant de ces petits bâtons, on ne voit aucune issue par où elle auroit pû couler. D’ailleurs, comme cette espece de cire est fort abondante, & que souvent les bâtons sont très petits, il est visible qu’elle n’en est point produite. Enfin, le sentiment unanime des voyageurs le confirme.

Ils nous disent tous que les bâtons de la lacque ne sont autre chose que des branchages que les habitans ont soin de piquer en terre en grande quantité, pour servir de soutien à l’ouvrage des fourmis volantes qui viennent y déposer l’espece de cire que nous appellons lacque. Le mérite de la lacque de Bengale sur celle de Pégu ne procede que du peu de soin que les Péguans ont de préparer les bâtons pour recevoir le riche ouvrage de leurs fourmis, ce qui oblige ces insectes de se décharger à terre de la lacque qu’ils ont recueillie, laquelle étant mêlée de quantité d’ordures, est beaucoup moins estimée que celle de Bengale, qui ne vient qu’en bâtons.

Mais tâchons de dévoiler la nature de l’ouvrage de ces insectes ; M. Geoffroy, qui s’en est occupé, semble y être parvenu. Voici le précis de ses observations, insérées dans les Mém. de l’acad. des Sc. année 1714.

Il lui a paru, en examinant l’ouvrage de ces petits animaux, que ce ne pouvoit être qu’une sorte de ruche, approchant en quelque façon de celle que les abeilles & d’autres insectes ont coutume de travailler. En effet, quand on la casse, on la trouve partagée en plusieurs cellules ou alvéoles, d’une figure assez uniforme, & qui marque que ce n’a jamais été une gomme, ni une résine coulante des arbres. Chacune de ces alvéoles est oblongue, à plusieurs pans, quelquefois tout-à-fait ronde, selon que la matiere étant encore molle, a été dérangée, & a coulé autour de la branche qui la soutient.

Les cloisons de ces alvéoles sont extrèmement fines, & toutes pareilles à celles des ruches des mouches à miel ; mais comme elles n’ont rien qui les défende de l’injure de l’air, elles sont recouvertes d’une couche de cette même cire, assez dure & assez épaisse pour leur servir d’abri ; d’où l’on peut conjecturer que ces animaux ne travaillent pas avec moins d’industrie que les abeilles, puisqu’ils ont beaucoup moins de commodités.

Il y a lieu de croire que ces alvéoles sont destinées aux essains de ces insectes comme celles des abeilles ; & que ces petits corps qu’on y trouve sont les embrions des insectes qui en doivent sortir ; ou les enveloppes de ceux qui en sont sortis effectivement, comme on le voit dans la noix de galle, & autres excroissances provenant de la piqûure des insectes.

Ces petits corps sont oblongs, ridés ou chagrinés, terminés d’un côté par une pointe, de l’autre par deux, & quelquefois par une troisieme. En mettant ces petits corps dans l’eau, ils s’y renflent comme la cochenille, la teignent d’une aussi belle couleur, & en prennent à peu-près la figure, en sorte que la seule inspection fait juger que ce sont de petits corps d’insectes, en quelque état qu’ils soient ; ce sont eux qui donnent à la lacque la teinture rouge qu’elle semble avoir ; car quand elle en est absolument dépouillée ou peu fournie, à peine en a-t-elle une légere teinture.

Il paroît donc que la lacque n’est qu’une sorte de cire, qui forme pour ainsi dire le corps de la ruche, & cette cire est d’une bonne odeur quand on la brûle. Mais pour ce qui est des petits corps, qui sont renfermés dans les alvéoles, ils jettent, en brûlant, une odeur desagréable, semblable à celle que rendent les parties des animaux. Plusieurs de ces petits corps sont creux, pourris ou moisis ; d’autres sont pleins d’une poudre où l’on découvre, à l’aide du microscope, quantité d’insectes, longs, transparens, à plusieurs pattes.

On peut comparer la lacque, qui est sur les bâtons chargés d’alvéoles, à la cire de nos mouches, & dire que sans les fourmis il n’y auroit point de lacque ; car ce sont elles qui prennent soin de la ramasser, de la préparer & de la travailler pendant huit mois de l’année pour leur usage particulier, qui est la production & la conservation de leurs petits. Les hommes ont aussi mis à profit cette lacque, en l’employant pour la belle teinture des toiles qui se fait aux Indes, pour la belle cire à cacheter dont nous nous servons, pour les vernis & pour la peinture.

On a établi différentes sortes de lacques. Premierement, la lacque en branches, dont on peut distinguer deux especes ; une de couleur d’ambre jaune, qui porte des alvéoles remplis de chrysalides, dont la couleur est grise, c’est la lacque de Madagasear : Flacourt en a parlé le premier, & elle ne mérite aucune estime.

La seconde espece est d’une couleur plus obscure à l’extérieur ; mais entierement rouge, lorsqu’on regarde la lumiere à-travers. Cette belle couleur lui vient de ce que ses alvéoles sont bien remplis, & que les parties animales y étant en abondance, ont communiqué leur teinture à la cire à l’aide de la chaleur du soleil. On peut dire que c’est la lacque dans sa maturité ; aussi est elle pesante, plus serrée & plus solide que la précédente ; c’est-là la bonne lacque.

Les Indiens, sur-tout les habitans de Bengale, qui en connoissent tout le prix, & combien les Européens l’estiment, sont attentifs à sa préparation. Pour cet effet ils enfoncent en terre dans les lieux où se trouvent les insectes qui la forment, quantité de petites branches d’arbres ou de roseaux, de la maniere qu’on rame les pois en France. Lorsque ces insectes les ont couvert de lacque, on fait passer de l’eau par-dessus, & on la laisse ainsi exposée quelque tems au soleil, où elle vient dure & seche, telle qu’on nous l’apporte en Europe.

Cette gomme bouillie dans l’eau avec quelques acides, fait une teinture d’un très beau rouge. Les Indiens en teignent ces toiles peintes si sévérement défendues, & si fort à la mode en France, qui ne perdent point leur couleur à l’eau : les Levantins en rougissent aussi leurs maroquins. Elle doit être choisie la plus haute en couleur, nette, claire, un peu transparente, se fondant sur le feu, rendant étant allumée une odeur agréable, & quand elle est mâchée, teignant la salive en couleur rouge.

Quelques auteurs de matiere médicale lui attribuent les vertus d’être incisive, apéritive, atténuante ; de purifier le sang, d’exciter les mois aux femmes, la transpiration & la sueur ; mais ces vertus sont si peu confirmées par l’expérience, que l’usage de cette drogue est entierement reservé pour les Arts.

La lacque en grain, est celle que l’on a fait passer légerement entre deux meules, pour en exprimer la substance la plus précieuse ; la lacque plate est celle qu’on a fondue & applatie sur un marbre : elle ressemble au verre d’antimoine.

Tout le monde sait que la lacque en grain est employée pour la cire à cacheter, dont celle des Indes est la meilleure de toutes : c’est de la bonne lacque liquefiée & colorée avec du vermillon. Les Indiens font encore avec leur lacque colorée une pâte très dure, d’un beau rouge, dont ils forment des brasselets appellés manilles.

Pour tirer la teinture rouge de la lacque, au rapport du P. Tachard, on la sépare des branches, on la pile dans un mortier, on la jette dans de l’eau bouillante, & quand l’eau est bien teinte, on en remet d’autre, jusqu’à ce qu’elle ne teigne plus. On fait évaporer au soleil la plus grande partie de l’eau ; on met ensuite cette teinture épaissie dans un linge clair ; on l’approche du feu, & on l’exprime au-travers du linge. Celle qui a passé la premiere est en gouttes transparentes, & c’est la plus belle lacque. Celle qui sort ensuite par une plus forte expression, & qu’on est obligé de racler avec un couteau, est plus brune, & d’un moindre prix. Voilà la préparation de la lacque la plus simple, qui n’est qu’un extrait de la couleur rouge que donnent les parties animales.

C’est de cette premiere préparation, dont les autres qui se sont introduites depuis par le secours de l’art, ont prises leur nom. De-là toutes les lacques employées dans la Peinture, pour peindre en mignature & en huile, qui sont des pâtes séches, auxquelles on a donné la couleur de la lacque, selon les degrés nécessaires pour la gradation des teintes.

Ce mot de lacque s’est ensuite étendu à un grand nombre d’autres pâtes séches, ou poudres de différentes couleurs, & teintes avec des matieres bien différentes. Ainsi la lacque fine de Venise est une pâte faite avec de la cochenille mesteque qui reste après qu’on en a tiré le premier carmin. La lacque colombine, ou lacque plate, est une pâte qu’on préparoit autrefois à Venise mieux qu’ailleurs, avec des tontures de l’écarlate bouillie dans une lessive de soude blanchie avec de la craie & de l’alun. La lacque liquide est une certaine teinture tirée du bois de Brésil ; toutes ces lacques s’emploient dans la Peinture & dans les vernis.

Divers chimistes en travaillant la lacque, ont observé qu’elle ne se fond ni ne se liquéfie point dans de l’huile d’olive, quoiqu’on les échauffe ensemble sur le feu ; l’huile n’en prend même aucune couleur, & la lacque demeure au fond du vaisseau, en une substance gommeuse, dure, cassante, grumeleuse, rouge & brune ; ce qui prouve encore chimiquement que la lacque n’est point une résine.

Les mêmes chimistes ont cherché curieusement à tirer la teinture de la lacque, & l’on ne sera pas fâché d’en trouver ici le meilleur procédé : c’est à Boerrhaave qu’on le doit.

Prenez de la lacque pure, reduisez-la en une poudre très-fine, humectez la avec de l’huile de tartre par défaillance, faites-en une pâte molle, que vous mettrez dans un matras, exposez ce vaisseau sur un fourneau à une chaleur suffisante, pour sécher peu-à-peu la masse que vous aurez formée. Retirez ensuite votre vaisseau, laissez-le refroidir en plein air, l’huile alkaline se resoudra de rechef ; remettez la masse sur le feu une seconde fois, retirez une seconde fois le vaisseau, & réitérez la liquéfaction ; continuez de la même maniere une troisieme fois, desséchant & liquéfiant alternativement, & vous parviendrez finalement à détruire la ténacité de la gomme, & à la mettre en une liqueur d’une belle couleur purpurine. Faites sécher de rechef, & tirez la masse seche hors du vaisseau ; cette masse ainsi préparée & pulvérisée, vous fournira la teinture avec l’alcohol.

Mettez-la dans un grand matras, versez dessus autant d’alcohol pur qu’il en faut pour qu’il surnage, fermez votre vaisseau avec du papier ; remettez-le sur votre fourneau, jusqu’à ce que y ayant demeuré deux ou trois heures, l’alcohol commence à bouillir ; vous pouvez le faire sans danger, à cause de la longueur & de l’étroitesse du col du matras. Laissez refroidir la liqueur, ôtez la teinture claire, en inclinant doucement le vaisseau que vous tiendrez bien fermé : traitez le reste de la même maniere avec d’autre alcohol, & continuez jusqu’à ce que la matiere soit épuisée, & ne teigne plus l’alcohol.

C’est par ce beau procédé qu’on peut tirer d’excellentes teintures de la myrrhe, de l’ambre, de la gomme de genievre & autres, dont l’efficacité dépendra des vertus résidentes dans les substances d’où on les tirera, & dans l’esprit qui y sera secretement logé.

Ce même procédé nous apprend 1°. qu’un alkali à l’aide de l’air & d’une chaleur digestive, est capable d’ouvrir un corps dense, & de le disposer à communiquer ses vertus à l’alcohol ; 2°. que l’action de la désiccation sur le feu & de la liquéfaction à l’air, faites alternativement, agit sur les particules les plus insensibles du corps dense, sans toutefois qu’en poussant ce procédé aussi loin qu’il est possible, on parvienne jamais à les dissoudre toutes. (D. J.)

Lacque artificielle, (Arts.) substance colorée qu’on tire des fleurs, soit en les faisant cuire à feu lent dans une lessive convenable, soit en les faisant distiller plusieurs fois avec de l’esprit-de-vin. C’est de ces deux manieres qu’on tire les couleurs de toutes sortes de plantes récentes ; la jaune de la fleur du genêt ; la rouge, du pavot ; la bleue, de l’iris ou de la violette ; la verte, de l’acanthe ; la noire, de la laterne selon Clusius, &c. & cette lacque est d’un grand usage dans la Peinture, sur-tout aux peintres en fleurs, & aux enlumineurs ; nous allons parler de ces deux méthodes ; commençons par celle de la lessive.

Faites avec de la soude & de la chaux une lessive médiocrement forte ; mettez cuire, par exemple, des fleurs de genêts, récentes, à un feu doux, de maniere que cette lessive se charge de toute la couleur des fleurs de genêts ; ce que vous reconnoîtrez, si les fleurs dont on a fait l’extrait sont devenues blanches, & la lessive d’un beau jaune ; vous en retirerez pour lors les fleurs, & vous mettrez la décoction dans des pots de terre vernissés pour la faire bouillir ; vous y joindrez autant d’alun de roche qu’il s’y en pourra dissoudre. Retirez ensuite la décoction, versez-la dans un pot plein d’eau claire, la couleur jaune se précipitera au fond. Vous laisserez alors reposer l’eau, vous la décanterez & y en verserez de nouvelle. Lorsque la couleur se sera déposée, vous décanterez encore cette eau, & vous continuerez de même, jusqu’à ce que tout le sel de la lessive & l’alun ayent été enlevés, parce que plus la couleur sera déchargée de sel & d’alun, plus elle sera belle. Dès que l’eau ne se chargera plus de sel, & qu’elle sortira sans changer de couleur, vous serez assurés que tout le sel & l’alun ont été emportes ; alors vous trouverez au fond du pot de la lacque pure & d’une belle couleur.

Il faut observer entr’autres choses dans ces opérations, que lorsqu’on a fait un peu bouillir les fleurs dans une lessive, qu’on l’a décantée, qu’on en a versé une nouvelle sur ce qui reste ; qu’après une deuxieme cuisson douce, on a réitéré cette opération jusqu’à trois fois, ou plutôt tant qu’il vient de la couleur, & qu’on a précipité chaque extrait avec de l’alun ; chaque extrait ou précipitation donne une lacque ou couleur particuliere, qui est utile pour les différentes nuances, dont sont obligés de se servir les peintres en fleurs.

On ne doit point cependant attendre cet effet de toutes les fleurs, parce qu’il y en a dont les couleurs sont si tendres, qu’on est obligé d’en mettre beaucoup sur une petite quantité de lessive, tandis qu’il y en a d’autres pour qui on prend beaucoup de lessive sur peu de fleurs ; mais ce n’est que la pratique & l’expérience qui peuvent enseigner quel est le tempérament à garder.

Il ne s’agit plus que de sécher la lacque qu’on a tirée des fleurs. On pourroit l’étendre sur des morceaux de linge blanc, qu’on feroit sécher à l’ombre sur des briques nouvellement cuites ; mais il vaut mieux avoir une plaque de gypse, haute de deux ou trois travers de doigts ; dès qu’on voudra sécher la lacque, on fera un peu chauffer le plateau de gypse, & on étendra la lacque dessus ; ce plateau attire promptement l’humidité. Un plateau de gypse peut servir long-tems à cet usage, pourvu qu’on le fasse sécher à chaque fois qu’on l’aura employé ; au lieu de gypse on pourroit encore se servir d’un gros morceau de craye lisse & unie. Il n’est pas indifférent de sécher la lacque vîte ou lentement ; car il s’en trouve, qui en séchant trop vîte, perd l’éclat de sa couleur, & devient vilaine ; il faut donc en ceci beaucoup de patience & de précaution.

Passons à la méthode de tirer la lacque artificielle par l’esprit-de-vin ; voici cette méthode selon Kunchel.

Je prends, dit-il, un esprit-de-vin bien rectifié & déflelgmé, je le verse sur une plante ou fleur, dont je veux extraire la teinture ; si la plante est trop grosse ou seche, je la coupe en plusieurs morceaux ; s’il s’agit de fleurs, je ne les coupe ni ne les écrase.

Aussi-tôt que mon esprit-de-vin s’est coloré, je le décante, & j’en verse de nouveau. Si la couleur qu’il me donne cette seconde fois est semblable à la premiere, je les mets ensemble ; si elle est différente, je les laisse à part, j’en ôte l’esprit-de-vin par la voye de la distillation, & je n’en laisse qu’un peu dans l’alambic pour pouvoir en retirer la couleur ; je la mets dans un vase ou matras, pour la faire évaporer lentement, jusqu’à ce que la couleur ait une consistance convenable, ou jusqu’à ce qu’elle soit entierement seche ; mais il faut que le feu soit bien doux, parce que ces sortes de couleurs sont fort tendres.

Il y a des couleurs de fleurs qui changent & donnent une teinture toute différente de la couleur qu’elles ont naturellement, c’est ce qui arrive sur-tout au bleu ; il faut une grande attention & un soin particulier pour tirer cette couleur : il n’y a même que l’usage & l’habitude qui apprennent la maniere d’y réussir.

Finissons par deux courtes observations ; la premiere que les plantes ou fleurs donnent souvent dans l’esprit-de-vin une couleur différente de celles qu’elles donnent à la lessive. La seconde, que l’extraction ne doit se faire que dans un endroit frais ; car pour peu qu’il y eût de chaleur, la couleur se gâteroit, c’est par la même raison qu’il est très-aisé en distillant, de se tromper au degré de chaleur, & que cette méprise rend tout l’ouvrage laid & disgracieux ; un peu trop de chaleur noircit les couleurs des végétaux ; le lapis lui-même perd sa couleur à un feu trop violent. (D. J.)